quand les morts s’entassaient trop près des églises

« Il y a beaucoup de tombes sous nos pieds à l’Abbaye aux Dames », constate Muriel Perrin, responsable du service du patrimoine. Le Service du Patrimoine vous invite à une déambulation au fil des rites funéraires, vendredi 15 novembre, en écho au « Concert des Mortels ! » dans le cadre de la saison professionnelle du Conservatoire. Il faut imaginer la rive droite majoritairement habitée par des morts. « Nous sommes le long de la Via Agrippa. Dans l’Antiquité, c’était un quartier de nécropoles. Ils étaient situés en dehors de la ville, pour des raisons d’hygiène, mais pas trop loin, pour un accès facile. »

Au Moyen Âge, « on est passé d’un rituel de crémation à un rituel d’enterrement, pour disposer d’une enveloppe en cas de résurrection. Nous dirigeons également les corps en direction de Jérusalem », poursuit le chef du service du patrimoine. Elle montre l’image d’un squelette retrouvé lors de fouilles préventives en 2018, au pied de la basilique Saint-Eutrope. “S’il se lève, il aura la tête à l’est, vers le soleil levant.”


Un squelette retrouvé par l’Inrap lors de fouilles au pied de Saint-Eutrope à Saintes en 2018. Le tombeau est traversé par une canalisation installée bien plus tard !

Ville de Saintes

Plus près de toi, mon dieu

Les ossements s’accumulent souvent à la sortie des églises. « Au Moyen Âge, plus on est enterré près de la maison du dieu, plus on est protégé. » Cela finit par devenir problématique, si l’on en croit cette chronique du XVIIIe siècle.e siècle, à Saintes : « Trop de cadavres sur un terrain trop étroit empoisonnent les fidèles pendant la messe ». « C’est la naissance des politiques de santé. Un décret de 1804 interdit toutes les inhumations dans les églises, temples et lieux de culte », précise Muriel Perrin. Le cimetière Saint-Vivien a été créé en 1835, celui de Saint-Pallais en 1882.

« Trop de cadavres sur un terrain trop étroit empoisonnent les fidèles pendant la messe »


De nombreux ossements ont été découverts lors de fouilles préventives à Saint-Eutrope en 2018.

Thibault Seurin


Plan de la rive droite de Saintes en 1695. On voit la configuration de l’Abbaye aux Dames, avec le cloître encore intact et les petites croix au niveau de la place Saint-Pallais.

Service de la Ville d’Art et d’Histoire

Dans le cloître Saint-Pierre, on peut encore voir des stèles de chanoines et des sarcophages. Lors de fouilles menées à l’Abbaye aux Dames dans les années 1980, nous sommes tombés sur des tombeaux d’abbesses, enterrées avec leurs crosses. Celui-ci était situé dans le cloître, qui fait aujourd’hui partie de la cour, avec ses murets appréciés des enfants qui s’y ébattent.

En revanche, « nous n’avons pas retrouvé les tombes des religieuses ». Leur cimetière désigné se trouve probablement non loin de là, où pousse un jardin entretenu par le centre social Belle Rive. La mort est bien sous nos pieds, comme le suggère une carte de 1695, où l’on aperçoit des petites croix sur le parvis de l’église Saint-Pallais.

Une double offre gratuite

La « visite flash » part du théâtre Geoffroy-Martell, vendredi à 19h45. Au même endroit, à 20h30, quatre professeures du Conservatoire, Carole Frerebeau et Laurence Bailly (violon), Stéphanie Cuq (alto) , Anne-Roux Brochard (violoncelle) fera vivre un répertoire « Mortel ! » : « La Jeune Fille », de Schubert, « La Danse Mortelle » de Saint-Saëns…
Dans le même esprit, la Direction du Patrimoine évoquera les lieux où l’on dansait à Saintes, le 17 janvier, avant un concert de tango ; les fameuses Saintaises, le 4 avril, dans le cadre d’une programmation 100% féminine ; illustrateurs et l’image dans l’art en écho au « Concert Cartoon », le 16 mai. Les visites et concerts sont gratuits.

 
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