Le 10 octobre, une unité d’infanterie ukrainienne de 30 soldats tenait encore, pendant quelques heures, le village de Snagost, sur le flanc ouest de l’incursion des forces de Kiev vers Koursk, en territoire russe. Son chef, « Kolot » comme on l’appelait, fut blessé par un éclat d’obus, parvint à éviter l’encerclement et à battre en retraite avec ses hommes vers Lyubimovka, 4 kilomètres plus à l’est. C’est là que se situe, aujourd’hui encore, la nouvelle ligne de front latérale d’une attaque lancée par l’Ukraine début août, dans l’espoir de changer le cours de la guerre. « Les Russes avancent lentement, mais ils avancent »précise, ce 16 octobre, « Kolot », 37 ans, casquette vissée jusqu’aux oreilles, est rentré au bunker souterrain du deuxième bataillon du 17e brigade blindée, dans le village frontalier ukrainien désert de Younakivka.
A ses côtés, le chef du bataillon, dit « le Grec » – pour saluer sa pratique de la lutte gréco-romaine – n’est guère plus enthousiaste quant à l’opération ukrainienne menée sur le territoire russe. “Pendant les manœuvres autour de Lyubimovka, les documents et matériels abandonnés par les Russes nous ont fait comprendre leur niveau de renseignement sur nos forces et nos mouvements »dit-il. Il déplore également le manque de moyens : « Là où nous mettons une section, ils mettent une entreprise ; là où l’on creuse des abris rudimentaires, ils construisent des fortifications dignes d’un QG de bataillon. »
Trois mois après l’attaque surprise en direction de Koursk, les officiers, soldats et civils rencontrés par Le monde sont mitigés sur l’impact final de ce choix stratégique. « Le Grec » ne le cache pas : « Seuls 56 % des objectifs ont été remplis, les Russes ont réagi rapidement, ils s’appuient sur des renforts que nous n’avons pas et utilisent leurs soldats comme de la chair à canon. » Cette incursion en Russie a remonté le moral des troupes et modifié le regard de certains alliés sur le déroulement de la guerre, mais elle n’a pas inversé la tendance sur le plan militaire.
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Sur fond de grande lassitude, même les personnages les plus forts ne cachent pas leur espoir de mettre un terme à la guerre. Kiev voulait arriver à la table des négociations avec un gain territorial pour emmener Vladimir Poutine à son propre jeu. Le président russe prône un accord sur les lignes fixes du front. Mais acceptera-t-il de discuter avant d’avoir repris l’enclave de Koursk, surtout s’il reçoit l’aide de milliers de soldats nord-coréens, dont le déploiement en Russie a été confirmé le 23 octobre par les Etats-Unis et l’Otan ?
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