A priori, les entrepôts logistiques sont ces immenses plateformes avec leurs quais destinés aux camions que l’on croise souvent le long des autoroutes. Mais avec l’explosion de la demande de livraison, notamment au cœur des grandes villes, il est nécessaire de développer des modèles alternatifs moins consommateurs de mètres carrés. C’est ainsi qu’est né Connect Paris, un projet hors du commun qui doit prendre forme sur la dernière parcelle non bâtie de la ZAC Clichy-Batignolles, dans le 17ème arrondissement de la capitale.
C’est la société Prologis, leader mondial de l’immobilier logistique, qui a récemment dévoilé les contours de cet immeuble, quelques semaines après l’obtention définitive du permis de construire, purgé de ses recours. Un investissement estimé à près de 400 millions d’euros, dont une centaine pour le terrain. La nouveauté tient principalement au fait que ce « hub » est tout en hauteur, soit 5 niveaux pour aménager 67 000 m², une surface impossible à dégager d’un seul niveau à Paris.. « C’est un projet disruptif qui répond à de nouvelles attentes, souligne Vincent Sadé, responsable du déploiement immobilier chez Prologis France. Il limite son empreinte, accessible à tous les modes de transport, connecté au ferroviaire, parfait pour la logistique du dernier kilomètre à vélo ou même à pied, tout en minimisant son impact environnemental. Tout sera prévu pour accueillir un maximum de véhicules électriques, de vélos cargo, et même des livraisons à pied pour s’étendre sur un périmètre de quelques kilomètres. La verdure sera présente au maximum avec une micro-forêt à l’entrée et une toiture partiellement en bois mêlant verdure et panneaux solaires.
Façade blindée
C’est un peu un retour aux sources pour cette parcelle située derrière le nouveau palais de justice de Paris qui abritait en son temps les entrepôts logistiques de Calberson avant d’être vendue à un promoteur. Un emplacement stratégique au nord-ouest de Paris au service de 1,6 million d’habitants à fort pouvoir d’achat dans un rayon de 5 kilomètres. La place bordant le périphérique, à côté du centre de traitement des déchets ménagers (Syctom), sans habitation à proximité directe, avait également été réservée à un usage logistique.
Restait le défi de construire un tel bâtiment. L’agence parisienne DTACC s’en chargera sans avoir conçu au préalable une structure logistique. “C’est une typologie architecturale qui n’existe pas à cette échelle en Europe, » s’enthousiasme l’architecte associé Christian Sbeih. Mais c’est vrai que je n’ai jamais travaillé avec autant de contraintes simultanées à respecter, qu’elles soient urbaines, sécuritaires ou liées aux servitudes. Il a notamment fallu concevoir des niveaux élevés pour permettre aux camions de circuler dans les deux sens sur les rampes. Et il faudra encore concevoir avec la SNCF les modalités pour faire entrer le fret ferroviaire directement dans le bâtiment. Quant à la proximité directe du Tribunal de grande instance de Paris et des locaux de la préfecture de police de Paris (Brigade financière ou DPJ notamment), elle nécessitera des mesures de sécurité exceptionnelles pour un bâtiment de ce type à façade blindée et fenêtres pare-balles. .
Stockage d’œuvres d’art
Bien évidemment, le projet a été monté en bon accord avec la mairie d’arrondissement et la mairie de Paris qui ont suivi pas à pas l’évolution du projet. « Ce type de réalisation peut apporter une solution concrète aux problèmes actuels, estime Geoffroy Boulard, maire du 17e. C’est bon pour l’environnement en limitant la congestion urbaine, cela répond aux attentes de services de la population et c’est bon pour les entreprises et la création d’emplois. Maintenant que les obstacles réglementaires semblent levés, le dernier « détail » à régler concerne la commercialisation avec pour objectif de lancer un projet sur 2 ans dès le 3ème trimestre 2025.
Du côté de Prologis, on estime que ce bâtiment devrait accueillir 8 à 10 entreprises, sans préciser à quel seuil de commercialisation les travaux pourraient être lancés. Ce qui est sûr, c’est qu’avec cette immense surface, le bâtiment ne sera pas exclusivement destiné à la logistique. Si les étages inférieurs accueilleront forcément une activité de messagerie traditionnelle, les étages supérieurs sont conçus pour accueillir des bureaux ainsi que des activités de production et même du stockage. Et les concepteurs du bâtiment entendent faire de leurs contraintes de sécurité un atout. Ils imaginent notamment accueillir le stockage de maroquinerie de luxe et pourquoi pas la fabrication, voire le stockage d’œuvres d’art… Aux côtés de ses clients logistiques traditionnels, Prologis explore ainsi de nouveaux secteurs. Et imaginez volontiers des clients qui bénéficieraient simultanément de services de logistique, de bureau et de stockage.