Comment un meurtre sexuel commis à Perl a plongé la Grande Région dans la tourmente

Comment un meurtre sexuel commis à Perl a plongé la Grande Région dans la tourmente
Comment un meurtre sexuel commis à Perl a plongé la Grande Région dans la tourmente

C’était le 2 septembre 2006, un samedi soir, lorsqu’Ingeborg G., une femme d’affaires de 48 ans, se promenait avec son chien près du viaduc de Schengen, du côté allemand de la Moselle, près de Perl.

Mais ce qui était censé être une promenade avec le quadrupède se transforme en un meurtre sexuel brutal, qui devient une affaire transfrontalière dans la région des trois frontières. Vers 21 heures, trois jeunes hommes ont découvert près de Perl-Besch une femme couverte de sang et presque nue au milieu du trottoir, le Leinpfad. Le médecin urgentiste appelé sur place ne peut que constater son décès.

C’est ici, dans les herbes hautes, que le crime a été commis. © PHOTO : Marc Schoentgen/Archives

La victime, originaire de Nennig, est mère de deux enfants. Jusqu’au jour du crime, Ingeborg G. vivait à Schengen où elle tenait une parfumerie. Depuis qu’elle a divorcé, les soupçons se sont rapidement portés sur son ex-mari. La victime a été violée puis poignardée de douze coups de couteau, si gravement qu’elle s’est vidée de son sang. Selon le médecin légiste, l’arme du crime devait être un couteau de douze à quinze centimètres de long.

Cependant, l’ADN de l’ex-mari n’a pu être retrouvé sur le corps ni sur les lieux du crime. L’arme du crime est également restée introuvable, malgré des recherches approfondies menées par des plongeurs en Moselle.

Afin de faire la lumière sur cette affaire, les enquêteurs allemands ont mis en place la commission d’enquête « Schilf », composée de 25 membres, dont des policiers luxembourgeois et français. En effet, du fait de la proximité de la frontière, le coupable pourrait aussi être à l’étranger ou en être originaire. Cependant, les enquêteurs ont d’abord soupçonné le meurtrier de faire partie de l’entourage de la victime – et pour une raison particulière.

Un gentil chien ?

Le soir du crime, Ingeborg G. était en compagnie de son chien Beauceron, qui aurait théoriquement pu la protéger. Il semblait donc évident que le chien devait connaître l’auteur du crime et ne protégeait donc pas son propriétaire. L’animal ne s’est pas éloigné de la victime, mais n’a pas non plus montré d’agressivité envers les étrangers. Des tests ultérieurs effectués sur l’animal ont démontré l’absence de comportement protecteur de la part du chien. Presque tout le monde pourrait donc être considéré comme l’auteur du crime.

Recherche transfrontalière

La brigade criminelle « Schilf » a donc dû reconstituer le meurtre le plus fidèlement possible. En examinant les traces, il s’est avéré que le crime n’avait pas eu lieu sur le sentier lui-même, mais sur un côté. Après le viol, Ingeborg G., grièvement blessée, s’est traînée jusqu’au Leinpfad avant de mourir. Comme ce chemin est une zone très fréquentée, la police pourrait situer le moment du crime vers 20 heures. C’est à cette heure que la victime a été vue vivante pour la dernière fois. Elle avait laissé sa voiture dans un parking voisin.

Les enquêteurs ont tenté de faire la lumière sur le meurtre à l’aide de tracts. © PHOTO : Police de la Sarre/Archives

Afin d’obtenir des informations complémentaires auprès de la population, des affiches et des tracts avec des photos des vêtements, du chien et de la voiture de la victime ont été distribués dans la Grande Région ou affichés sur les aires de repos. Suite à cela, la police a reçu 80 informations qui n’ont abouti à rien. La piste du meurtre d’une prostituée à Wittlich n’aboutit également à rien. L’indice le plus probant était une Renault Mégane bleue immatriculée en France, aperçue à proximité de la scène du crime.

Les jours et les semaines passèrent, sans aucune piste. Il ne restait que des habitants inquiets, craignant que le tueur ne frappe à nouveau. Dans toute la Grande Région, l’incertitude s’est installée. Mais c’est alors que l’enquête a fait une percée. Sur un préservatif retrouvé à proximité de la scène du crime, nous avons retrouvé des fragments d’ADN initialement impossibles à attribuer. Des traces d’ADN qui ont également été retrouvées sur le corps d’Ingeborg G.

Distribué sur les lieux du crime : un dépliant pour élucider le meurtre. © PHOTO : Police de la Sarre/Archives

L’empreinte génétique n’étant pas clairement identifiable, 16 personnes du fichier ADN français et 12 auteurs potentiels allemands sont d’abord prises en compte. La piste a finalement conduit à la France. Par ailleurs, la Renault Mégane bleue, également aperçue sur les lieux du crime, est à nouveau aperçue plus tard à Thionville. La trace ADN correspond finalement à un certain Nicolas H., 37 ans, originaire d’Orange dans le sud de la France.

Qui est Nicolas H. ?

Nicolas H. est considéré en France comme un délinquant sexuel et un meurtrier reconnu coupable. Déjà en 1986, alors qu’il avait 17 ans, un tribunal pour mineurs l’avait condamné à six ans de prison pour viol et meurtre. Cependant, en raison de sa bonne conduite, il a été libéré après seulement trois ans. D’autres délits sexuels ont suivi, il a notamment menacé et violé une femme avec un couteau en 1995. Il a été condamné à 15 ans de prison pour cela. Il a purgé sa peine jusqu’à sa libération le 6 mai 2006, toujours pour bonne conduite.

Des proches avaient déposé des fleurs et des bougies funéraires sur les lieux du crime. © PHOTO : Tessy Hansen/Archives

Il s’avérera au cours de l’enquête que Nicolas H. est un pêcheur passionné et qu’il n’a pas peur des chiens. Mais où est cet homme de 37 ans ? Officiellement, l’auteur présumé résidait à Dieulefit, dans le sud de la France. Mais les autorités n’ont pas pu le localiser.

Or, à Thionville, il a utilisé un distributeur automatique, laissant ainsi une trace qui indiquait qu’il se trouvait dans la Grande Région. Son téléphone portable n’était activé que pour le réseau mobile français et ne disposait d’aucun accord de roaming. Un contrôle auprès de l’opérateur mobile a révélé que le téléphone mobile n’avait pas de réseau au moment de l’incident. Nicolas H. n’était donc pas en France le 2 septembre 2006.

Sept femmes violées, deux assassinées

Le 28 septembre 2006, il est finalement arrêté par la police française à Yutz. L’homme de 37 ans y suivait alors une formation de chauffeur professionnel. Nicolas H. a avoué le meurtre, affirmant qu’Ingeborg G. avait été victime du hasard. Il l’aurait choisie, comme ses précédentes victimes, lors d’une partie de pêche. Après son arrestation, il a conduit les enquêteurs dans une cachette proche de la scène du crime, où il a conservé l’arme du crime et des préservatifs.

Suite à ses aveux, Nicolas H. a été extradé vers l’Allemagne le 12 octobre 2006. En avril 2007, il a été jugé à Sarrebruck. Il y réitère ses aveux. Le 2 septembre 2006 vers 20 heures, il a maîtrisé la femme de 48 ans, l’a déshabillée presque entièrement, l’a violée puis l’a poignardée. Le verdict tombe rapidement : la réclusion à perpétuité suivie d’une mesure de sûreté. Le procureur a qualifié H. de bombe à retardement qui doit être désamorcée à long terme. Le travail exemplaire de la police au-delà des frontières du pays a été salué.

Mais depuis que Nicolas H. est de nouveau derrière les barreaux, une question reste en suspens. Pourquoi, malgré ses crimes, a-t-il quand même été libéré pour bonne conduite et a-t-il ainsi pu violer un total de sept femmes, dont deux ont perdu la vie ?

Cet article a été initialement publié sur le site Internet de Mot luxembourgeois.

Adaptation : Mégane Kambala

 
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