l’hommage de l’académicien Dany Laferrière

l’hommage de l’académicien Dany Laferrière
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PASdeux films, à revoir aussi bien via Cinetek, dont il fut l’un des fondateurs, que sur Arte TV, tous marqués par sa curiosité pour les autres et son profond humanisme, citons Ressources humainesOu L’emploi du temps, inspiré du personnage de Jean-Claude Romand. Laurent Cantet, décédé hier de maladie à l’âge de 63 ans, aimait la littérature. Entre les murs, son adaptation du roman de François Bégaudeau, lui vaut la Palme d’Or (2008). Il a travaillé avec Leonardo Padura pour Retour à Ithaquemais, entre-temps, Cantet était tombé sur un livre de Dany Laferrière (disponible aux éditions Grasset), dont une des histoires, notamment, devait inspirer ce film inquiétant et beau, avec une inoubliable Charlotte Rampling dans le rôle-titre : Au sud. L’académicien Dany Laferrière se souvient ici d’un ami cher dont il n’oubliera jamais la douceur. Revue de souvenirs.

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Pourquoi Haïti ?

Laurent était allé en Haïti pour voir ce que ses parents bénévoles faisaient chaque année dans le sud d’Haïti avec une ONG pour les écoles, pour la santé et toutes sortes de choses. C’est ainsi qu’il a découvert Haïti, il a été complètement choqué. En quittant Port-au-Prince, il a acheté mon livre La Chair du Maître, lis-le dans l’avion. Sa lecture l’a tellement bouleversé qu’il a dit à ses producteurs qui réalisaient Haut et court : « J’ai mon prochain film. » Je connaissais son œuvre par ouï-dire. Tout le monde disait qu’il avait fait un film merveilleux, Ressources humainesEt L’emploi du tempsadapté de l’affaire Jean-Claude Romand, qui a inspiré Emmanuel Carrère, je le savais donc lors de notre rencontre en Guadeloupe.

Travailler dans la piscine

Je l’ai vu pour la première fois dans la piscine d’un hôtel en Guadeloupe. Et je lui ai proposé de me rejoindre, ce qui n’était pas vraiment son style. Laurent était une personne studieuse que l’on imaginait dans son petit bureau, en train de travailler. Mais il a accepté de venir à ma table de travail qui était liquide, s’est enfilé en maillot de bain et nous avons discuté. Il adorait ça et prenait l’habitude de répéter les séances de travail liquide avec Robin Campillo, son scénariste et monteur. Il a appris qu’on pouvait travailler dans ce cadre qui, à mon avis, était à l’opposé de sa vision politique : être au sud du monde, dans la piscine d’un hôtel, pendant que ses parents faisaient du volontariat au fin fond du monde. ‘un village du sud d’Haïti. Il en était beaucoup plus proche, mais il comprenait que faire un film comme Au sud, il fallait être au plus près du corps, qu’il fallait travailler dans le plaisir du corps, dans l’eau, avec le soleil qui réchauffe la peau, qu’il fallait pénétrer cet univers du Sud.

Au sud

Ce qui m’a fait un peu sourire chez Laurent Cantet, c’est son extrême rigueur, et sa grande générosité de vision. J’aurais fait un film plus paillard, mais il a une vraie discrétion pour montrer cet univers, ces femmes blanches venues du Nord, du Canada, des Etats-Unis, à la rencontre des jeunes, quittant une Amérique du Nord où, après 50 ans, ils avaient l’impression qu’on ne les voyait plus. Pour moi, le roman c’était aussi la possibilité de parler du désir, de la sexualité, tout en sensualité, mais Laurent n’avait pas vu son film comme ça, avec sa grande sensibilité d’abord pour les femmes puis pour ces jeunes du Sud, il a fait quelque chose plus sérieux, plus intéressant, qui a des chances de rester.

Quand je lui ai dit qu’il aurait pu aller plus dans le sexuel, dans le tropical, il m’a dit en souriant : « Oui, oui, je sais que tu dis de moi que je suis un peu prêtre, mais c’est ça. comment je suis, je ne peux pas faire autrement. » Je lui ai dit cela avec beaucoup d’affection, car je passe ma vie à me rebeller contre le regard occidental parfois condescendant porté sur le Sud, mais il n’était pas du tout dans ça, a-t-il introduit le créole dans son film, la musique haïtienne à gogo. Son regard était généreux, enveloppant, d’une grande délicatesse. Ce n’était pas si évident, entre deux personnes qui ne sont pas du même pays. Il faut une immersion de chacun dans l’autre, déjà entre le livre et le film, ce n’est pas un exercice anodin, on prend des risques, on pourrait se sentir trompé, violé, mais avec Laurent, il ne pouvait y avoir que de la douceur.

Douceur

Nous nous sommes ensuite croisés, parfois. Il était venu pour que je lui parle de Yasujirō Ozu, le cinéaste japonais, d’un choix de films qu’il devait faire, je ne sais pas exactement. Toujours chaleureux, avec ce petit sourire narquois, un des rares qui ne soit pas cynique, un sourire de distance amusé. Son regard observe avec légèreté la surface du monde. C’est le look le plus doux que j’ai jamais rencontré, je pense. Je devrais me tourner vers ma mère pour trouver quelque chose de mieux. Sa douceur restera pour toujours.

 
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