” On pourrait croire, en voyant le nombre de personnes présentes aux événements liés à l’écologie, que les choses vont pour le mieux. Cependant, en regardant la situation écologique dans son ensemble, on comprend que les choses se détériorentt », déclare Julia Faure, présidente du Mouvement Impact France, mouvement qui représente les entreprises à impact. Elle a été invitée à une table ronde lors du Sommet Impact Measurement organisé le 18 avril à Paris.
Selon elle, une des raisons de cette dégradation est le fait que les règles économiques ne poussent pas les entreprises à être plus vertueuses : « Plus une entreprise fait mal les choses, plus elle externalise, plus elle est compétitive. C’est le bonus pour le vice », critique Julia Faure qui est aussi la fondatrice de Loom, une marque de vêtements éco-responsables.
En raison de cette prime au vice, elle estime que l’entreprise ne changera pas si elle n’est pas encouragée à le faire : « Nous avons besoin de lois », conclut-elle. Elle considère comme historique le projet de loi contre la fast fashion qui, s’il était définitivement adopté, introduirait une sanction pour les produits de la fast fashion.
Quel est l’impact des comportements individuels ?
Véronique Bédague, présidente-directrice générale du promoteur immobilier Nexity, se montre plus modérée sur l’impact des lois. Selon elle, c’est avant tout le comportement individuel des consommateurs qui fera évoluer les entreprises : « Si chacun de nous changeait son comportement, cela signifierait vraiment quelque chose. Nous ne pouvons pas demander aux entreprises d’arrêter de produire quelque chose qui est demandé par le consommateur, sinon ce serait une nouvelle entreprise », estime-t-elle.
Lire aussi : RSE et mécénat : les bonnes pratiques pour faire tomber les barrières
” C’est l’industrie qui crée les besoins des consommateurs », répond Julia Faure. ” En rejetant la responsabilité sur le consommateur, nous retardons la prise de décision. C’est une manière pour la classe politique et économique de ne pas prendre ses responsabilités. “, Elle ajoute.
” Vous relancez le débat entre Rousseau et Voltaire, à savoir : l’homme est-il naturellement bon et perverti par les industriels ? », s’amuse le président du Cercle des économistes, Jean-Hervé Lorenzi, également invité de la table ronde. De son côté, il estime que certaines contraintes sont nécessaires puisque pour le moment, « nous nous dirigeons vers un monde inégalitaire, peu sobre et qui ne permet pas aux jeunes de se loger. D’un autre côté, la question majeure est : dans quelle mesure doit-on contraindre ? « .
CSRD, fardeau et opportunité pour l’entreprise
Pour illustrer que les règles n’ont pas toujours que des effets positifs, Véronique Bédague prend l’exemple de la CSRD, une directive européenne applicable depuis le 1er janvier 2024. Cette législation impose à un certain nombre d’entreprises de fournir un reporting extra-financier. : ” le CSRD nous pèse. Il ne faut pas oublier le sens, les vraies transformations », juge le PDG.
Elizabeth Tchoungui, directrice exécutive d’Orange RSE, défend cette nouvelle législation : « On nous demande d’écrire précisément nos politiques RSE : cela nous oblige à réfléchir à nos impacts et à nos dilemmes. On ne peut pas avancer sans contrainte », juge-t-elle. Elle prend également l’exemple du devoir de vigilance, qu’elle qualifie de contrainte positive.
Actionnaires et clients, moteurs du changement
” Si les nouvelles lois réduisent la compétitivité, les entreprises feront faillite, ce qui créera des problèmes d’emploi. », estime Jean-Marc Borello, président et fondateur du groupe SOS, qui organise le sommet. Il estime que le changement peut aussi provenir de la pression des actionnaires et des clients. qui vérifient de plus en plus leurs engagements écologiques avant d’investir ou des candidats aux postes proposés par l’entreprise qui exigent, plus que jamais, que les entreprises pour lesquelles ils vont travailler s’engagent.
Théo Népipvoda
