« Je ne dis pas que l’emploi va baisser, mais les bonnes années sont derrière nous » – .

« Je ne dis pas que l’emploi va baisser, mais les bonnes années sont derrière nous » – .
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En évaluant le législateur en termes d’emploi, l’économiste Philippe Defeyt se veut nuancé. Et il émet aussitôt une réserve : «Faire le point sur une législature ou un gouvernement est délicat. Une bonne partie des évolutions peut s’expliquer par la situation économique ou par des évolutions structurelles.».

Pour Philippe Defeyt, également ancien cadre chez Écolo, «le bilan quantitatif est bon”. Taux de chômage, taux d’emploi, etc. les évolutions sont positives. Et de mentionner au passage que la croissance annuelle moyenne de l’emploi a été presque deux fois plus élevée sous cette législature que lors des deux précédentes. Selon ses calculs, entre le 4ème trimestre 2020 (début du gouvernement De Croo) et le 4ème trimestre 2023, l’emploi salarié a augmenté de 179.000 unités, dont 57.300 dans le secteur non lucratif (administration publique et défense ; enseignement ; santé humaine et action sociale).

Des emplois créés pour remplacer les travailleurs malades

Gros bémol cependant : «Il y a de plus en plus de patients de longue durée. Une partie de la création d’emplois vient du remplacement de ces travailleurs malades. ». En effet, il y a désormais un demi-million de personnes incapables de travailler pendant plus d’un an en Belgique (hors fonctionnaires). Sur ce point aussi, Philippe Defeyt apporte des nuances : «Parmi les malades, de nombreuses personnes travaillent à temps partiel. Nous appelons cela le temps partiel médical. Ce ne sont pas des paresseux ou qui ont trouvé la solution de s’installer dans un hamac social, comme on dit en Flandre. Une personne qui a eu un cancer et qui travaille à nouveau deux jours par semaine se retrouvera à la fois dans les statistiques de l’emploi et dans l’Institut national d’assurance maladie et invalidité.» Cela relativise le poids du handicap : « les malades de longue durée n’ont pas complètement quitté le marché du travail.»

Le nombre de personnes handicapées continue d’augmenter, notamment chez les femmes : le Hainaut et Liège sont les provinces proportionnellement les plus touchées

Cependant, ce problème de l’incapacité de travail a pris une ampleur inquiétante et doit figurer en tête de l’agenda politique. “Il faut avoir un discours courageux. D’un côté, il faut accepter l’idée que les conditions de travail sont parfois compliquées, qu’on ne peut pas conduire un bus à 60 ans comme à 35 ans. Mais il faut aussi dire que ces gens ne devraient pas prendre une retraite anticipée. Ils peuvent encore être utiles.

Moins de travail à temps partiel

L’économiste nie également l’idée selon laquelle l’emploi augmenterait parce que le travail à temps partiel augmenterait également. Entre 2019 et 2023, a-t-il calculé, la part des salariés à temps partiel est passée de 27,3% à 26,0%.

Cette législature qui s’achève a également été marquée par deux crises (la pandémie de coronavirus et la baisse du pouvoir d’achat suite à la guerre en Ukraine et à la hausse des prix de l’énergie). Philippe Defeyt estime que cela a eu un effet stabilisateur sur l’emploi. “Car l’évolution de l’emploi est toujours un équilibre entre emplois créés et emplois perdus. Cependant, grâce aux aides débloquées, nous avons perdu moins d’emplois. Mais nous avons dépensé beaucoup, nous avons gaspillé de l’argent. Lorsque nous inondons l’économie, lorsque nous protégeons le pouvoir d’achat, nous ne détruisons évidemment pas d’emplois. Mais la tendance pourrait rapidement s’inverser. Les faillites se multiplient. Nous devrons faire des restrictions budgétaires, ce qui aura inévitablement un impact sur l’emploi, notamment dans le secteur associatif. Et l’industrie européenne n’est toujours pas en très bonne forme. Nous allons également très vite épuiser les effets du plan de relance. D’abord, cela s’arrêtera, puis les effets se dilueront avec le temps. Nous ne sommes donc pas très loin d’un revirement. Je ne dis pas que l’emploi va diminuer, mais les bonnes années sont derrière nous.»

Un salarié sur dix est absent pour cause de maladie : « Une partie de la création d’emplois s’explique par la nécessité de remplacer les malades »

Augmentation du travail des étudiants

Parmi les causes de la baisse du chômage, l’économiste d’IDD pointe une démographie favorable. “Nous parviendrons progressivement à une stabilisation de la population âgée de 20 à 64 ans. Mais si cette population se stabilise, s’il faut remplacer les malades de longue durée et si en outre l’emploi augmente, cela réduit inévitablement le taux de chômage. D’autant plus que jusqu’à présent, le pourcentage de jeunes qui étudient continue d’augmenter, ce qui a également un impact positif sur le taux de chômage.»

Enfin, pour qualifier la performance de la Belgique en matière d’emploi, M. Defeyt met en avant la croissance de la part du travail étudiant dans le nombre total d’heures de travail travaillées : elle était de 1,77% en 2019, elle est portée à 2,2% en 2023. “Il s’agit d’une augmentation significative. Cela fait partie du travail.

Plus d’étudiants ont travaillé l’été dernier par rapport aux années précédentes

De même, la croissance des flexijobs doit être prise en compte. “Un flexijob effectué par quelqu’un qui a déjà un emploi n’augmente pas le taux d’emploi.»

Quant aux différences de performances entre la Flandre d’une part, Bruxelles et la Wallonie de l’autre, Philippe Defeyt constate que l’écart «ne se remplit pas”. “C’était pourtant l’objectif de la plupart des plans de relance wallons, mais nous ne rattrapons pas la Flandre.»

 
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