Sur les bords de Loire, tout le monde a le nez dans les prévisions de Vigicrue, le service d’information sur les fleuves. D’autant que les crues des différents affluents de la Loire continuent d’impacter le niveau du fleuve.
Parfois un impact soudain. Comme à Saumur (Maine-et-Loire), le week-end dernier, où plus d’une vingtaine de véhicules stationnés en bord de Loire se sont retrouvés piégés par une brusque montée des eaux, conséquence d’une crue de la Vienne.
« On ne s’attendait pas à ça. Vendredi dernier, la Loire était en récession, à tel point que j’ai été très surpris de voir ces voitures à l’eau dimanche matin » , » raconte Rémy Tixier, un riverain habitué aux aléas du fleuve. Les voitures ont été évacuées ce jeudi matin 4 avril par les pompiers, une fois les eaux suffisamment retirées.
A Gennes, deux mètres d’eau dans le camping
La Loire va-t-elle continuer à descendre ? « J’ai bien peur que ce soit non. Les prévisions prévoient une augmentation le week-end prochain », annonce Benoît Poitiers, sanglé dans une combinaison de pêcheur avec bottes et cuissardes. Il est le patron d’Au bord de la Loire, un beau camping à Gennes-Val de Loire. Mais aujourd’hui, le fleuve a tout envahi et il se promène en barque sur ses terres où il est dans l’eau jusqu’aux hanches.
« Nous vivons chaque année avec des inondations, surtout en hiver. La différence cette semaine, c’est que c’était plus tard et plus vite que d’habitude. » Les 4,63 mètres sur l’échelle de Gennes se traduisent par deux mètres d’eau en certains points du camping. « Pour nous, il n’y a aucun dégât. C’est surtout beaucoup de travail pour protéger et sécher le matériel avant l’ouverture de la saison le 19 avril. »
« La rivière dépose de la boue qui se transforme en mortier »
Le camping dispose de 27 hébergements, tous hors d’eau grâce à des pilotis. « Et nous avons quatre bungalows sur flotteurs. » Un investissement coûteux (10 000 €) mais qui s’avère indispensable quand on vit au bord de la rivière.
Même constat pour les collègues de l’autre rive, au camping Terre d’Entente, à Saint-Martin-de-la-Place. La patronne, Jessica Lancelot, gère le nettoyeur à eau haute pression du bloc sanitaire. « C’est douloureux… La rivière dépose de la boue qui se transforme en mortier et devient collante. »
La jeune femme est responsable de ce camping de 83 emplacements avec son partenaire, Mikaël Courjon. Eux aussi ont investi dans des mobil-homes sur flotteurs. « Ils peuvent remonter jusqu’à trois mètres d’eau. » Bien loin de la hauteur maximale (1,80 m) qu’ils ont connue en février 2021. « Nous devons nous adapter aux changements que la nature nous impose, surtout maintenant, avec le réchauffement climatique. »
« On passe notre temps à annuler des réservations »
A Saint-Saturnin-sur-Loire, la plus ancienne taverne du Maine-et-Loire, Chez Jojo, est les pieds dans l’eau. Une situation qu’elle a vécue à de nombreuses reprises. Pour l’instant rien d’inquiétant, la saison ne démarre qu’en mai. Ce qui n’est pas le cas du camping Loire plages, à Rochefort-sur-Loire, ouvert depuis une semaine.
« On passe notre temps à annuler des réservations », déplore Didier Crouin. Ce jeudi matin 4 avril, à l’accueil de ce camping familial de 116 emplacements, l’ambiance est plutôt morose. Certes, il a beaucoup moins d’eau que ses confrères de Gennes et de Saint-Martin, mais les grosses flaques d’eau qui inondent son camping le rendent impraticable.
« Quand j’ai signé l’acte de vente, en 2015, il était écrit que le camping pouvait être légèrement marécageux en hiver. Depuis, il a été inondé onze fois. » Didier Crouin a perdu son début de saison, mais il préfère en sourire. Car il sait qu’il y a bien pire ailleurs, comme lui l’ont dit ses seuls clients, Jean et Marie-France Demuynck.
Ces Nordistes font également leurs valises. Ils retournent dans leur région, le Pas-de-Calais, qui subit des vagues d’inondations successives depuis novembre 2023. « Des centaines de personnes ont quitté leurs maisons à cause de la montée des eaux. Et là, on s’attendait à retrouver la douceur angevine. »