Un accusé « malade de la vie qu’il a vécue »

Un accusé « malade de la vie qu’il a vécue »
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Kamel Nouar, 29 ans, est jugé depuis jeudi 14 mars 2024 devant la cour d’assises des Pyrénées-Orientales pour avoir tué un autre jeune homme qu’il ne connaissait pas avec un tournevis en juillet 2020 au Palais des Rois de Majorque à Perpignan. Dernier récif tragique d’une « dérive mentale », nourrie par une enfance sans port d’attache.

Kamel Nouar plie sa silhouette dans le box, se cachant en permanence avec une main posée contre son visage potelé. «Je suis conscient de ce que j’ai fait. Mais je ne peux pas les regarder. chuchote-t-il à l’attention de la salle comble des proches de la victime. La honte, ultime preuve d’humanité pour cet accusé qui, reconnaît-il désormais, a ôté la vie à Jérémy Boutouba en lui plantant une dizaine de coups de tournevis dans le corps. Pour ce drame, pour la douleur infligée à la famille, cela ne fait aucun doute, il sera condamné. Mais Kamel Nouar bouscule la justice avec d’autres questions complexes : quelle peine pourrait guérir la société et ce jeune de 29 ans, “malade de la vie qu’il a vécue et jamais réparé » ? Doit-on reconnaître une altération du contrôle de ses actes et lui accorder des circonstances atténuantes au regard de son enfance ?martyr” ?

Né en Algérie, Kamel Nouar, aîné d’une famille de cinq enfants, est arrivé à Villelongue-de-la-Salanque à l’âge de 5 ans. À l’école du village “tout va bien”. Mais, en rentrant chez moi, “C’est la misère”. L’enfant est victime de « violence sadique », notent les aides-éducatrices. Frappé par son père, il est «attaché, nu, au pied de la table de télévision avec des fils d’acier », « fouetté avec une fronde »,forcé d’essuyer le sang de sa mère sur le sol » ou même “manger dans les poubelles”. A la piscine, quelqu’un voit les bleus. A l’âge de 10 ans, il fait l’objet d’une première mesure pédagogique. Un an plus tard, il est placé dans une famille d’accueil “parce qu’il veut se jeter par la fenêtre.” A l’âge de 12 ans, le père emmène de force toute la famille en Algérie. Là, le patriarche prétend qu’il se rend à la Mecque, y abandonne tout le monde, confisque les papiers d’identité et retourne à la P.-O. rejoindre sa maîtresse et reconstruire un foyer de cinq enfants.

“CONTREcette violence, elle ne m’a pas lâché, elle ne veut pas partir »

Le fils, resté dans une terre devenue inconnue, vit “enfer”. « Ma mère ne savait rien faire d’autre que pleurer. J’étais la victime. Je ne savais pas parler arabe. Je n’ai pas prié, j’ai mangé du porc. J’ai été soumis à des choses de la part des intimidateurs. J’ai été maltraitée, mon bras gauche a été brûlé, j’ai été violée. Je voulais à tout prix revenir en France. Kamel Nouar anesthésie ses malheurs avec un mélange d’alcool et de drogues comme le Lyrika, la drogue de la misère. En août 2019, il a récolté 60 euros pour les passeurs. Il met les voiles pour traverser la Méditerranée. “Je me suis dit où je meurs, où j’atteins la France« . Oran, Espagne et arrivée à Perpignan… dans un squat du quartier Saint-Mathieu.

Fouiller les poubelles. Continuer à consommer du Pastis et des pilules achetées dans la rue pour « soulager le stress » et « se sentir plus fort ». Comme ce 24 juillet 2020 où il a croisé par hasard la route de Jérémie Boutouba et d’un ami, victime d’une panne de voiture. « J’ai reçu un grand droit, ça a tout déclenché dans ma tête. Cette violence, elle ne m’a pas lâché, elle ne veut pas partir. Il y a cette peur en moi et j’ai toujours voulu m’en débarrasser. Je fais un effort mais ça ne pourra pas non plus tout effacer, il y aura toujours des blessures.» reconnaît Kamel Nouar.

“Et après ?” demande le président. « Parce que vous sortirez un jour de prison, Monsieur Nouar ? Et vous savez qu’on peut aussi vous fermer l’accès à la France ? « Si c’est votre décision, je l’accepterai mais je ne retournerai jamais en Algérie. Je suis français, c’est ici que j’ai grandi.

Suite des débats ce vendredi 15 mars 2024.
 
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