Intégrer Innu-aimun dans des outils de traduction automatique comme Google Translate présenterait plus de risques que d’avantages, selon l’Institut Tshakapesh.
Google a annoncé le 17 octobre que l’inuktut, une langue parlée par plus de 39 000 locuteurs au Canada, serait désormais disponible sur son service de traduction en ligne.
C’est la première langue autochtone canadienne sur la plateforme.
« Bien sûr, quand nous le regardons, cela semble si beau que cela pourrait constituer un progrès pour les langues autochtones. […]mais la traduction automatisée cache une réalité qui n’est pas toujours belle », indique Jérémie Ambroise, conseiller en linguistique de la langue innue à l’Institut Tshakapesh.
Pour M. Ambroise, les traductions proposées par ce type de service ne sont pas toujours représentatives des réalités de la langue.
« Un problème qui a été souligné avec l’inuktut, c’est qu’il est vu dans son ensemble, mais il existe plusieurs dialectes et ces dialectes sont complètement différents les uns des autres », souligne-t-il. « C’est la même chose pour les Innus. Nous avons un langage standardisé à l’écrit, mais pas à l’oral. »
M. Ambroise évoque également la notion de « fossé lexical », qui désigne l’absence de plusieurs termes, concepts ou réalités dans la langue innue.
“On pense à “l’intelligence artificielle”, justement”, donne-t-il en exemple.
Au-delà du langage
Outre la question de la fidélité linguistique, M. Ambroise indique que l’acceptabilité sociale et la compréhension de la culture innue sont nécessaires pour qu’un tel projet puisse se concrétiser dans le futur.
« Les Innus veulent-ils que les machines parlent leur langue ? », interroge M. Ambroise. « Souvent, les seniors ne sont pas très à l’aise [avec de telles questions]. »
Le conseiller soulève également la question de la perte de la langue et des effets que pourrait avoir un outil de traduction imprécis sur sa préservation.
« Dans une communauté comme Uashat, où peut-être 10 % des personnes âgées de 20 ans et moins parlent la langue […] si ces personnes commencent à utiliser Google Translate, ou un autre programme et pensent avoir accès à un outil spécifique, on peut imaginer tous les problèmes que cela pourrait causer. »
M. Ambroise rappelle que l’Institut Tshakapesh travaille continuellement à son dictionnaire Innu-aimun. Il conseille également aux apprenants en langues de se méfier des contenus pédagogiques erronés, qui pullulent sur Internet.
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