Malentendante depuis sa naissance, la Franco-Ontarienne Ariane Millette recherche depuis longtemps des modèles positifs de personnes vivant avec la surdité. L’absence de romans jeunesse réalistes sur le sujet l’a convaincue qu’elle devait prendre la plume et les écrire. Mission accomplie avec son premier titre, Décrypter la tempêtepublié aux Éditions Hurtubise. Un roman sur les défis, l’acceptation de soi et le pouvoir de la différence.
Ariane Millette publie son premier roman jeunesse aux éditions Hurtubise.
Éditions Photo Hurtubise
Noah, 15 ans, subit un choc sonore après un concert. Son audition ne peut pas récupérer. Il n’a pas le choix : il devra porter des appareils auditifs et il les appelle sarcastiquement ses « crevettes ».
Il a beaucoup de mal à accepter son handicap devant les autres. Il faut dire que certains ne l’aident pas beaucoup… notamment Louis, qui est de plus en plus jaloux de l’attention que Léna, son ex, porte à Noah. Grâce à ses proches, il évoluera petit à petit vers l’acceptation de sa différence… et gagnera le cœur de sa petite amie.
Ariane Millette a eu l’idée d’écrire cette belle histoire en 2019, alors qu’elle travaillait à l’Association des personnes malentendantes. « J’étais le mieux placé pour le faire, avec ma formation littéraire et mon handicap. Et j’ai trouvé que ce que je lisais manquait de profondeur », explique-t-elle dans une interview par email.
Inspirée par son expérience
Sa propre expérience l’a aidé à écrire. « Comme Noah, je n’ai pas accepté mon handicap, puis j’ai fini par l’accepter comme Asma. Cependant, j’avais à coeur de ne pas utiliser ma vie autrement que pour mes symptômes ; Je ne voulais pas raconter mon histoire.
« Par exemple, Noah et moi n’avons pas été victimes d’intimidation de la même manière ou pour les mêmes raisons. C’est aussi pour distinguer entre moi, l’auteur, et le narrateur, Noah, que ce dernier est un mec.
« Pas comme les autres »
Est-ce stigmatisant de porter des appareils auditifs quand on est jeune (comme Noé et ses crevettes) ou de « ne pas être comme les autres » ?
« Pas toujours », explique Ariane. « Pour moi, oui, parce que je n’ai pas grandi en connaissant d’autres personnes qui vivaient la même chose que moi. Je me sentais donc minoritaire et incompris.
« Au lycée, un ami a entendu quelqu’un parler de moi en expliquant pourquoi j’étais bizarre et mes appareils auditifs ont été mentionnés. En revanche, j’ai beaucoup de respect pour ce « quelqu’un » car il s’est excusé après. »
De nombreux défis
Les défis auxquels sont confrontés les jeunes malentendants, sourds ou malentendants sont nombreux. Ariane donne quelques exemples.
« D’abord, l’impatience des gens. Les gens en ont assez de répéter plusieurs fois et trouvent étrange que quelqu’un répète ce qu’ils disent pour vérifier qu’ils ont bien compris. Ensuite, l’envie d’être comme tout le monde. Comme Noah le montre dans mon roman, les jeunes traversent une période difficile d’acceptation de soi.
« Ensuite, lorsque les piles des aides auditives meurent ou que les implants se cassent et que nous n’avons plus accès à l’amplification de nos aides auditives. Pour ma part, oublier d’avoir des piles de rechange dans mon sac à dos rendait les journées d’école doublement pénibles et le niveau de concentration requis me donnait mal à la tête.
La différence…un super pouvoir
Dans le roman, Ariane aime la ténacité, l’indépendance et même l’immaturité de Noah, qui s’est atténuée depuis la première mouture, assure-t-elle. “J’aime qu’il ne se laisse pas intimider.”
A travers son roman, elle voulait absolument transmettre ceci : la différence n’est pas quelque chose de mauvais, mais quelque chose d’extraordinaire.
« Il faut voir ce que cela nous apporte plutôt que ce que cela nous enlève. Est-ce que cela nous donne une solidarité, une communauté ? Ma surdité a entre autres contribué à un premier regard amical à l’université car une de mes meilleures amies m’a aussi dit qu’elle était malentendante lors de notre rencontre.
Décrypter la tempête
Ariane Millette
Éditions Hurtubise
190 pages
- Ariane Millette est née à Ottawa.
- Elle a étudié la littérature française, la traduction et la création littéraire (Université d’Ottawa, Université Laval et Université de Sherbrooke).
- Elle a terminé son dernier semestre universitaire à temps plein et réintègre le marché du travail.
- Elle est née malentendante.
- Elle conseille de regarder des documentaires Surdité (1981) et Mon baptême de sourd (2021).
« Et pour moi, c’est clair : mes difficultés auditives sont des vagues qui vont et viennent. Ils sont parfois bouleversants, comme aujourd’hui, parfois à peine perceptibles. Au moins, j’ai de la famille et de bons amis qui n’ont pas peur de se faire éclabousser.
– Ariane Millette, Décrypter la tempêteÉditions Hurtubise
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