Une nouvelle approche expérimentale pour étudier les défauts des semi-conducteurs

Une nouvelle approche expérimentale pour étudier les défauts des semi-conducteurs
Une nouvelle approche expérimentale pour étudier les défauts des semi-conducteurs

Comme tous les matériaux dits « cristallins », les semi-conducteurs sont constitués d’atomes disposés de manière parfaitement régulière dans l’espace. Mais dans la pratique, les matériaux ne sont jamais parfaits. Même produits à l’échelle industrielle selon des procédés bien huilés, les semi-conducteurs présentent des défauts. Ceux-ci modifient la structure électronique locale du matériau, ce qui peut avoir des conséquences négatives, mais parfois bénéfiques pour les applications, d’où l’importance de comprendre la physique fondamentale qui les sous-tend. C’est ce que vient de faire une équipe du PMC, grâce aux travaux menés par Agatha Ulibarri lors de sa thèse et publiés dans la revue Physical Review Letters.

Le semi-conducteur en question ici est un alliage de gallium, d’arsenic et d’azote (GaAsN). Il arrive qu’un atome de gallium ne respecte pas la disposition régulière habituelle et se loge dans un interstice. Ce défaut « interstitiel » modifie les niveaux d’énergie que peuvent occuper les électrons du matériau. Dans un semi-conducteur, les électrons peuvent circuler dans des bandes d’énergie : la bande de valence et, à des énergies plus élevées, la bande de conduction. Par exemple, un électron qui gagne suffisamment d’énergie peut passer de la bande de valence à la bande de conduction, puis « retomber » dans la bande de valence, perdant de l’énergie sous forme de lumière. Entre les deux bandes se trouve une bande d’énergie interdite, appelée « espace », dans laquelle, en théorie, il n’y a aucun niveau d’énergie disponible pour les électrons. La présence de défauts conduit justement à l’apparition de niveaux électroniques dans l’interstice. Plutôt que de retomber directement dans la bande de valence, un électron dans la bande de conduction a donc aussi la possibilité de se recombiner en deux étapes, en passant par ces niveaux. Ce processus en deux étapes n’émet pas de lumière.

« Déterminer les énergies de ces niveaux est essentiel », souligne Alistair Rowe, physicien au PMC. Par exemple, si ces niveaux sont « profonds » dans la bande interdite, cela peut souvent être nocif pour les dispositifs conçus avec ces semi-conducteurs. Dans leur publication scientifique, les chercheurs de PMC, en collaboration avec leurs collègues de l’Université de Melbourne en Australie, ont caractérisé pour la première fois l’énergie de ces états dus à la présence de ce type de défaut interstitiel dans l’alliage. GaAsN. Surtout, grâce à une méthode expérimentale originale, ils ont réussi à montrer comment cette structure électronique dépend du spin. Comme la charge électrique, le spin est une propriété intrinsèque des électrons, qui ne peut prendre que deux valeurs. Avec leur méthode pol-PICTS utilisant de la lumière polarisée circulairement, les électrons passant de la bande de valence à la bande de conduction étaient principalement d’un spin donné, ce qui a permis d’étudier finement comment la recombinaison via les états gap était sensible au spin. Les résultats montrent qu’il n’existe pas un mais trois états induits par la présence de défauts interstitiels en gallium dans GaAsN. De plus, leurs énergies sont en désaccord avec les prédictions théoriques. « Ces valeurs dépendent de la nature exacte de l’environnement chimique autour du défaut, encore mal compris, explique Alistair Rowe. Nos données sur les énergies pourraient fournir aux théoriciens un point de référence pour dévoiler cet environnement en comparant les résultats de leurs calculs avec nos expériences. »

Ce travail, qui s’appuie sur la grande expertise du PMC en physique des semi-conducteurs, permet de mieux comprendre la physique due à ce défaut interstitiel, qui pourrait être mise à profit pour des applications telles que celles utilisées aujourd’hui. d’autres défauts appelés « centres NV » dans le diamant. Enfin, la méthode pol-PICTS pourrait s’avérer très utile pour sonder d’autres matériaux.

*PMC : unité mixte de recherche CNRS, École Polytechnique – Institut Polytechnique de Paris

En savoir plus :

Structure profonde du centre de recombinaison spin-actif dans les nitrures dilués

Agatha C. Ulibarri et al., Structure de niveau profond du centre de recombinaison spin-active dans les nitrures dilués, Physical Review Letters (2024)

https://journals.aps.org/prl/abstract/10.1103/PhysRevLett.132.186402

 
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