Ils viennent de Nouvelle-Zélande, de Grande-Bretagne ou de Suisse. Pour cette raison 10ème édition de la tournée mondiale solo et non-stop, 11 nationalités sont représentées (dont la France). En 1989, pour le lancement du Vendée Globe, deux d’entre eux sont venus de l’étranger (l’Américain Mike Plant et Bertie Reed, originaire d’Afrique du Sud).
Denis Van Weynbergh a aujourd’hui un rêve : être le premier marin belge à réaliser un Vendée Globe à bord d’un monocoque sur lequel il navigue depuis 2018 (Groupe D’Ieteren). Mais réaliser cette ambition a demandé de la patience et quelques sacrifices. Le skipper, 57 ans, a répondu à franceinfo
franceinfo : Vous avez eu une histoire un peu mouvementée avec le Vendée Globe car il y a déjà 4 ans vous souhaitiez être au départ. Cela n’était pas arrivé. La persévérance finit parfois par payer !
Denis Van Weynbergh : La dernière fois, je n’avais pas d’argent, j’ai dormi sur le bateau, à l’ancienne. C’est amusant, mais bon, en hiver, c’est moins amusant. De plus, je n’ai pas fait les sacrifices nécessaires pour pouvoir être présent et peut-être n’étais-je pas entouré des bonnes personnes. J’étais par exemple moins présent aux Sables d’Olonne pour préparer le bateau. Je n’étais plus en Belgique. Là, je me suis dit que si je voulais réussir, je devais faire les sacrifices nécessaires. Tout cela fait partie du processus et du parcours pour arriver à la ligne de départ. Et aussi atteindre la ligne d’arrivée, espérons-le !
Quelles implications cela a-t-il sur votre vie personnelle ?
Je suis devenu skipper professionnel il y a 5 ans. Dans ce type de projet, il faut être 100% professionnel. C’est comme être un joueur de Ligue des Champions, on ne peut pas faire la moitié du chemin. Les sacrifices sont avant tout familiaux, puisque j’ai des enfants qui vivent en Belgique, je les vois moins. Des sacrifices également en termes de vie sociale : toute ma vie sociale se déroule en Belgique. Il a fallu repartir de zéro, passer de nombreuses soirées seuls, oser manger seul au restaurant, aller au bar, boire une bière seul… Il a fallu se remettre en question après l’échec de 2020 puis recommencer d’une autre manière.
Votre voyage prouve-t-il qu’on ne peut pas préparer un Vendée Globe en restant en Belgique ? Est-ce impossible ?
En Belgique, il n’existe pas de compétences nautiques. Ici, en Bretagne, tous les fournisseurs et tous les métiers sont à proximité. En Belgique, c’était illusoire. C’est vrai que mon réseau économique est dans mon pays, c’est comme ça qu’on a réussi à avoir un partenaire 100% belge. C’est aussi une vraie fierté, une vraie victoire d’avoir un bateau belge, un skipper belge et un partenaire belge dans une régate internationale. Mais naviguer ici est compliqué. Il n’y a qu’un seul port dans lequel je peux entrer avec le bateau, un endroit où il y a beaucoup de trafic.
Comment vous est venue l’envie de rêver du Vendée Globe ? Cette course trouve-t-elle un écho en Belgique ?
Non, cela reste assez confidentiel. Nous n’avons pas une culture de la voile comme dans d’autres pays, en France, en Angleterre ou même en Espagne. C’est aussi pour nous un véritable travail pédagogique car lorsque nous rencontrons des partenaires potentiels, ils ne se rendent pas compte de ce qui se passe. Quand on leur dit qu’il y a deux millions de personnes qui viendront voir le bateau, ils n’y croient pas. Même en Belgique on a souvent l’image que la voile est un sport d’élite, alors qu’on sait qu’en France elle est vraiment destinée au grand public.
J’imagine que vous allez applaudir quand vous verrez qu’il y a de plus en plus de skippers étrangers, que ça casse un peu cette partie franco-française.
Il est essentiel d’avoir cette ouverture ! Faisons un peu de sport pour regarder le nombril. On a déjà eu une révolution de palais puisqu’en 2020 ce n’est pas un Breton qui a gagné, mais un Rochelais (Yannick Bestaven, ndlr). C’était déjà une révolution dans le monde de la voile. L’autre vraie révolution, ce sera lorsqu’une étrangère remportera le Vendée Globe. Cela pourrait arriver cette année (avec la Britannique Samantha Davies, ndlr). Ce sport est le seul à avoir le même classement chez les hommes et chez les femmes. Je pense que c’est un vrai signe d’ouverture.
Vous aussi, vous souhaitez être ambassadeur de Belgique ?
C’est quand même une belle mission. Au début, je le fais pour mon propre plaisir. Ce qui est sûr, c’est que si dans 20 ans j’ai un fils qui me dit : je pars en bateau parce que j’ai entendu une de tes interviews, on aura tout gagné.