Il est le père de la version moderne du Stade Français, club professionnel et titré, qu’il avait récupéré en Fédérale 2 ! Depuis vingt ans, l’ancien avocat et président du conseil d’administration de NRJ, n’a cessé de faire grandir son « bébé ». Avant le choc de samedi à Jean-Bouin (16h30), Max Guazzini revient sur une époque marquée par la rivalité entre Parisiens et Catalans de l’USAP.
Max Guazzini, le pape François a rendu visite aux Corses le week-end dernier, et on a pu voir des prélats portant des chasubles roses. Rassurez-nous, vous n’y êtes pour rien, vous qui avez introduit cette couleur sur les maillots de rugby du Stade Français ?
Non, non ! C’est tout le contraire. C’est nous qui nous sommes inspirés de la religion catholique. Le rose est un signe de joie liturgique chez les catholiques, qui peut être porté le troisième dimanche de l’Avent et le quatrième dimanche du Carême. La venue du Pape correspondait à Gaudete, le troisième dimanche de l’Avent.
Comment vous est venue cette idée de maillot rose ?
Au début de la saison 2005-06, j’ai demandé à notre équipementier Adidas de nous trouver une tenue originale, qui se démarquait du classicisme des maillots de l’époque. Ils nous ont offert un maillot doré et un autre argenté. J’ai trouvé la couleur or prétentieuse, et j’ai trouvé que l’idée du maillot argent était une bonne idée. Mais quand je suis allé à l’usine pour voir le résultat final, j’ai été déçu. J’ai imaginé un plastron de style armure argentée. Leur gris était triste à mourir. Alors, je vous ai proposé un maillot rose ! J’ai dessiné un prototype que j’ai montré aux joueurs de l’équipe. Ils étaient ravis.
Et vous décidez d’exhiber votre nouvelle tenue à Perpignan ?
Certainement pas ! Je ne voulais pas qu’on joue en rose à Aimé-Giral. J’avais envie de présenter le nouveau maillot à une autre occasion, de l’utiliser comme outil de communication. Sauf que le jour où les maillots sont arrivés à Meudon, où on s’entraînait à l’époque, « Domi », Christophe Dominici, était là. En passant, n’oubliez pas qu’à cette époque, nous n’avions pas de stade d’entraînement propre. Nous sommes allés où nous pouvions… « Domi » est donc tombé sur le nouveau maillot. Ce qu’il fallait, il en a enfilé un et l’a montré à ses coéquipiers ! Je n’étais pas à Paris, et j’ai reçu un coup de fil de Pieter (Pieter de Villiers, pilier international du Stade Français), qui m’a dit : « Max, tu vas avoir une belle surprise à la télé… » Nous avons eu aller jouer à Perpignan (6 septembre 2005), que nous avions battu en finale du Top 16 quelques semaines plus tôt. J’ai insisté : « tu ne joues pas en rose ! »
Vous aviez envie de jouer avec vos couleurs traditionnelles ?
Oui ! J’avais demandé à Jean-Marie (Jean-Marie Chauvet), notre steward, de fournir la tenue rouge et bleue. Je n’imaginais pas un instant que les joueurs allaient affronter l’USAP à Aimé-Giral, en rose… Pour moi, ce n’était pas un bon plan de communication de jouer en rose à Perpignan. Déjà dans la semaine, j’avais été alerté par une fuite publiée dans les colonnes de L’Équipe, « et si le Stade Français jouait en rose ? J’aurais dû être plus prudent !
Quelle est votre réaction lorsque vous découvrez « le pot aux roses » ?
J’ai été déçu. Les joueurs ont entendu tous les noms d’oiseaux imaginables. Demandez à David Skrela, qui était assis sur le banc des remplaçants… Et en plus, on a perdu (1) ! Mais nous avons réussi une chose : briser la couleur rose, qui n’avait pas l’air très masculine, dans le sport. Aujourd’hui, le rose est partout. J’ai même vu que l’équipe de France de handball l’avait adopté lors des Jeux Olympiques de Paris !
« Le cargolade avec la famille Roucariès »
Connaissiez-vous bien Perpignan avant que le Stade Français ne devienne le rival de l’USAP dans les années 2000 ?
Oui, mon père, Yvan, était très ami avec Gérard Roucariès (2 ans), transporteur à Rivesaltes je crois… Il lui vendait des camions, et fabriquait aussi des chars. Mon père a même ouvert une agence Unic camions à Perpignan. J’étais alors étudiant à Paris et je prenais l’avion pour faire plaisir à mon père. Nous avons déjeuné tous ensemble au Lydia, un paquebot dans les sables… Les Roucariès sont venus chez nous, à Venelles, près d’Aix-en-Provence, et nous leur avons rendu visite chez eux. Je me souviens des cargos…
L’histoire du Stade Français-USAP se souvient de la première finale disputée au Stade de France, en 1998, entre Parisiens et Catalans (victoire 34-7 du Stade Français)…
Nous sommes venus de nulle part. C’était notre première saison en Top 16, et nous avons renversé les pronostics. En demie, on bat encore le Stade Toulousain (39-3), favori au titre.
Cette finale, c’était aussi le duel fratricide entre les frères Lièvremont, Marc que vous aviez recruté chez vous et son frère Thomas, capitaine de l’USAP ?
Lorsque nous sommes montés en première division à l’été 1997, nous avons dû nous renforcer. Marc, qui était international, n’était plus en odeur de sainteté du côté de Perpignan. Un manager, dont je ne dirai pas le nom, m’a même dit : « mais pourquoi tu prends Marc Lièvremont ? Il a fini ! Nous avons vu plus tard ce qui s’est passé…
Champion de France dès son retour dans l’élite, le Stade Français a étonné la France du rugby…
Je me souviens que pour notre première saison, nous étions invaincus à Jean-Bouin. Seule l’USAP est venue faire match nul chez nous (32-32). Ce tirage au sort nous a peut-être motivé le jour de la finale…
Quel regard portez-vous sur l’évolution du rugby ?
Je pense que nous avions beaucoup plus de liberté dans les années 2000. Je ne sais pas comment ce serait perçu aujourd’hui d’inviter les filles du Lido avant un match. Notre société est en déclin. Cacher ce sein que je ne vois pas… Demandez à Dan Carter, lorsqu’il venait jouer au Stade de France avec l’USAP (3)… Il se souvient encore de la haie d’honneur faite par les Pink girls ! Il m’en a encore parlé récemment !
Serez-vous à Jean-Bouin samedi ?
Non, je ne serai pas à Paris. Mais je suis resté un fervent supporter du Stade Français. Je vais à tous leurs matchs à Jean-Bouin, quand je suis à Paris. Et c’est le seul endroit où je porte du rose ! En général, je préfère le bleu ou le vert.