Depuis plus de sept décennies, Deauville vibre au rythme de la chanson française

Par

Marie-Madeleine Remoleur

Publié le

4 janvier 2025 à 18h20

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Mistinguett, Édith Piaf, Charles Trenet, Juliette Gréco, Maurice Chevalier, Dalida, Charles Aznavour, Sylvie Vartan, Claude François, Joe Dassin… “ Ils sont tous passés par Deauvillemême ceux qu’on a oubliés », sourit Philippe Normand.

L’ancien directeur culturel de la Ville de Deauville (Calvados) et des Franciscains partage, dans dernier numéro deAthena on Touquesun ” histoire passionnante « . Celui de de belles heures de chanson française à Deauvillede 1912 à 1988.

Des lieux de chant

Cette histoire commence en 1912, à l’époque de la construction du casino par Eugène Cornuché qui avait également été directeur artistique de deux cafés-concerts parisiens.

Lorsqu’Eugène Cornuché conçoit le casino de Deauville, il imagine très vite des lieux de chant : il construit un théâtre dédié au music-hall, il prévoit que des danses et des chants puissent également avoir lieu dans la grande salle et que le salon des ambassadeurs puisse accueillir des dîners spectacles. .

Philippe Normand

Un lieu aux multiples espaces tournés vers la chanson… ce qui se confirme vite par la saison inaugurale du casino orchestrée par Gabriel Astrucpatron du théâtre des Champs Elysées. “Jusqu’à 1988la chanson était l’axe principal de programmation du casino », confirme Philippe Normand.

La grande salle du casino de Deauville. ©Collection Yves Aublet
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Un premier grand concours de chanson à Deauville

«C’est le premier festival organisé à Deauville », insiste Philippe Normand. De 1948 à 1956le casino de Deauville a organisé la grande et premier grand concours de chanson. Un événement qui fera l’expérience neuf éditionsavec un concours qui vise à présenter une chanson créée par un interprète. « C’est l’Eurovision qui, en 1956, a repris l’idée… dans une dimension européenne », note le passionné de chanson.

Ce concours qui « embrassera toutes les tendances et tous les registres de la chanson » révélera et récompensera de futurs grands noms, en lançant par exemple the careers of Juliette Gréco, Annie Cordy, Dario Moreno, Marcel Amont and Nicole Louvier. « C’est une chanteuse qu’on a oubliée et qui est pourtant très importante dans la chanson, Nicole Louvier. Quand nous avons interrogé Anne Sylvestre ou Barbara, elles ont dit que c’était Nicole Louvier qui leur avait ouvert la voie », ajoute Philippe Normand qui insiste :

Le Grand Concours de Chanson Française de Deauville reste le précurseur des grands festivals de chanson qui vont se développer et s’internationaliser à partir des années 1950 dans les stations balnéaires.

Philippe Normand

Un concours, mais aussi galasdans la tradition de Deauville, notamment celle de 14 juillet qui a animé la station de 1947 à 1971, en plein cœur de l’été. Au Salon des Ambassadeurs, le Gala Tricolor verra Édith Piaf, Charles Trenet, les Compagnons de la chanson et Mireille Mathieu.

Georges Moustaki et Edith Piaf sur la plage de Deauville, en août 1958. ©DR

Chanter à Deauville, un incontournable

Que ce soit pendant le « Visites d’été “, pendant ” Soirées jeunesse » ou tout au long de l’année… le casino a vu des grands noms de la chanson françaisejonglant entre chansons populaires et chansons d’auteurs. « Dans les années 1950 et 1960, c’était impressionnant », insiste Philippe Normand, prenant l’exemple de été 1955 où se succéderont à la Salle du Chant : Mouloudji, the Compagnons de la chanson, Charles Trenet, Charles Aznavour or even Dalida and Gilbert Bécaud. Ce dernier reviendra quelques années plus tard, notamment en 1962, le même été que Jacques Brel et Juliette Gréco.

Joséphine Baker, lors de son dernier récital au Salon des Ambassadeurs pour le gala du 31 décembre 1971. ©Coll. Yves Aublet

« J’ai fouillé les archives de la presse régionale et ce qui est fascinant, c’est que chaque concert était relaté à l’époque, s’enthousiasme Philippe Normand. On apprend des choses géniales. Par exemple, le jour où Sylvie Vartan chante à Deauville, en 1964nous avons dû renforcer la sonorisation de la salle et une ombre s’est glissée au début du concert, lorsque les lumières se sont éteintes. C’était Johnny Hallydayil avait profité d’une permission pendant son service militaire pour retrouver Sylvie à Deauville.

L’ancien directeur culturel raconte aussi l’arrivée de Léo Ferré en 1963 qui interprète Canne la mouche. «Il fustige un peu les bourgeois qui défilent lors des dîners de gala… qui sont les mêmes qu’à Deauville, ça avait offensé certains spectateurs partis», sourit Philippe Normand. Ce dernier raconte aussi comment la soirée jeunesse, où le public attendait avec impatience la fin du concert pour aller se déchaîner, a su jouer sur les paroles de Jean Ferratquelques mois plus tard, lorsqu’il enregistra Nuit et brouillard et écrit : “L’ombre est devenue humaine, aujourd’hui c’est l’été, je déformerais les mots s’il fallait les tordre.” «Je ne peux m’empêcher de penser que ce n’est pas une coïncidence», estime Philippe Normand, qui résume :

Dans mes recherches, j’ai trouvé des articles remplis d’anecdotes. Ils montrent que Deauville était une étape obligée pour ces chanteurs, et qu’un concert à Deauville n’était pas la même chose qu’un concert ailleurs.

Philippe Normand

Un passage obligatoire, mais aussi un lieu de vacances où chanteurs et paroliers aiment se retrouver. « Certains sont devenus véritables ambassadeurs de Deauville », insiste le passionné de chanson, énumérant les noms de Maurice Chevalier, Mistinguett, Suzy Solidor ou encore Charles Trenet. « Il est venu pour la première fois en 1939… et puis il est revenu sans cesse. On le voit dans les caricatures de l’Office de Tourisme avec les chiffres de l’été Deauville.

Régine et Maurice Chevalier lors de l'inauguration de la piscine.
Régine et Maurice Chevalier lors de l’inauguration de la piscine. ©Archives municipales / Ville de Deauville

Et aujourd’hui ?

Cette grande épopée de la chanson française à Deauville s’arrête à la fin des années 1980. 1986nous autorisons installer des machines à sous au casino de Deauville. Puis dans 1987le casino ferme pour cause de travaux», précise Philippe Normand.

En 1988, le nouveau casino transforme la Salle de la Chanson dans la grande salle des machines à sous. “C’est une autre époque qui s’ouvre.”

La chanson survivra sur la scène du Salon des Ambassadeurs et sur la scène du théâtre du casino. Mais rapidement, des critiques seront programmées, puis des émissions d’humour.

Pilier de Deauville depuis 75 ans, la chanson reste, par à-coups. LE festival musical Swing à Deauville permettra pendant 20 ans, durant une semaine en été, de réunir des chanteurs nourris de jazz et de swing. “Quand ce festival s’est arrêté en 2008, c’était un peu le désert des chansons au casino.”

Le programmation de la saison culturelle de la villealors Franciscainsa pris le relais, révélant un nouvelle génération de chanteurs et auteurs-compositeurs comme Vincent Delerm, Renan Luce, Camélia Jordana, Florent Marchet et Maissiat. La chanson fait aussi vibrer Deauville lors de la Festival du livre et de la ou de Musique Unie De Deauville.

Et l’histoire de la chanson à Deauville continue de se raconter en musique, lors de soirées organisées en hommage à des chanteurs ou de grands paroliers ayant fréquenté Deauville autrefois, comme Pierre Delanoë et Eddy Marnay. Avec ferveur, Philippe Normand conclut : « La chanson à Deauville est patrimoine vivant ».

Athéna sur Touques, n°243. Prix ​​: 8 €.

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