« J’étais incapable de rien »

Après le succès de « Revivre » paru le 21 mars chez Broché, Lorie Pester fait à nouveau entendre sa voix. Plus connue sous son nom de scène « Lorie », la chanteuse sort ce vendredi 28 juin la version audio de son livre sur Audible.

Dans ce livre puissant et intimiste, Lorie se confie sur la maladie qui lui a volé plusieurs années de sa vie, les décisions irréversibles qui en ont résulté et leurs conséquences. Le discours puissant et honnête d’une femme qui a vaincu la maladie.

Paris Match. Votre combat contre l’endométriose a débuté en 2015. Vous aviez 33 ans lorsque votre gynécologue a détecté une anomalie sur vos ovaires. Opérée en urgence suite à une grossesse extra-utérine, le verdict est tombé : vous souffriez d’endométriose. Un mot peu utilisé à l’époque, le connaissiez-vous ?
Lorie Pester. Je n’en savais rien, je n’en avais jamais entendu parler. Je suis immédiatement allée sur Google pour me renseigner.

C’est ainsi que vous avez appris les conséquences de cette maladie, entraînant des difficultés à tomber enceinte. Vous avez enfin réussi en 2020 avec votre partenaire Yann Dernaucourt suite à une démarche de PMA (procréation médicalement assistée), un long combat ?
Avant d’essayer le PMA, nous avons essayé naturellement pendant 8 à 10 mois mais cela n’a pas fonctionné. On ne pouvait pas perdre trop de temps à cause de l’endométriose qui se propage à chaque retour de règles. C’est à ce moment-là que nous avons démarré la PMA. Nous avons eu beaucoup de chance. Je connais des couples qui luttent depuis dix ans. Pour notre part, au bout de la deuxième fois cela a fonctionné.

Vous avez surnommé votre endométriose « Endy »un moyen de vous familiariser avec lui ?
L’endométriose, c’est comme un appartement partagé. Une personne s’est invitée dans mon corps. Je dois organiser ma vie professionnelle et personnelle en fonction de cela au quotidien.

Le reste après cette annonce

En parlant de travail, dans votre livre vous racontez une journée de tournage de la série « Demain est à toi ». Sur le plateau, vous essayez de faire comme si tout allait bien, en cachant votre douleur aux autres. Pourquoi avez-vous choisi de garder cette maladie sous silence ?
Dans ce milieu, les choses vont très vite. Si nous apprenons que vous êtes malade, aucun rôle ne vous sera plus proposé. Je voulais garder le secret pour ne pas retarder le tournage. Le retard, c’est de l’argent. Quand on est choisi pour un rôle, on vous fait confiance, j’ai voulu rester professionnel jusqu’au bout.

Vous cachez vos souffrances au travail mais aussi à vos proches. Dans « Revivre » vous admettez avoir caché votre douleur à votre mère. Une manière de se convaincre que tout va bien ?
Les gens ont leurs problèmes, leurs soucis… Je ne vais pas les embêter avec les miens. Au début, je pensais juste que c’était normal d’avoir autant mal. J’ai toujours appris à voir le positif, le bon côté des choses. Au final, je me mentais un peu. Devant les médecins, je n’ai cessé de mentir, jusqu’à ce qu’ils me disent : « Écoute-toi ». C’est ainsi que j’ai pris conscience de l’ampleur de ma douleur et que j’ai commencé à vivre avec.

Laure Pester, Alexandre Brasseur et Ingrid Chauvin – Photocall pour « Demain Nous Belongs » lors de la 20ème édition du festival La Rochelle séries le 15 septembre 2018.

Jean-Marc HAEDRICH/SIPA / © Jean-Marc HAEDRICH/SIPA

Au cours de votre combat contre l’endométriose, vous avez dû faire face au mépris d’un médecin. Il a parlé de « maladie à la mode » et a réduit vos souffrances. À l’époque, vous dites ne pas avoir réagi. Aujourd’hui, s’il répétait ses propos, que lui diriez-vous ?
Déjà, je lui dirais de me parler sur un autre ton. Et puis « maladie à la mode », de quoi parle-t-il ? Il y a d’autres moyens d’être à la mode sans passer par la souffrance. S’il était devant moi aujourd’hui, je lui dirais de changer de métier. Il a de la chance, je ne me souviens plus de son nom, sinon je lui aurais fait beaucoup de publicité !

À cause de l’endométriose, vous passez à côté de plusieurs opportunités professionnelles. Comment avez-vous surmonté ces longues pauses médiatiques ?
Mes douleurs sont vite devenues quotidiennes. J’ai demandé à mon médecin de prescrire une prise de sang. J’étais persuadé qu’il me manquait quelque chose, j’étais épuisé et pourtant ni en promotion, ni en concert, ni sur le plateau. Il a simplement répondu : “C’est bon, tu es juste épuisé par cette douleur constante.” » Et c’est justement cet état qui m’empêchait de faire quoi que ce soit. Je n’étais capable de rien.

Pendant votre grossesse en 2020, « Endy » s’endort et vous avez enfin un peu de répit. A la naissance de la petite Nina, les douleurs reviennent. Comment avez-vous concilié ce nouveau rôle de mère avec votre maladie très handicapante ?
On fait ce qu’on peut, on s’adapte. Mais bien sûr j’avais peur, peur d’être toute seule et de tomber dans mes bras avec elle. Ce n’était pas très lourd au début mais ça faisait quand même très mal quand je le portais. J’avais peur tout le temps.

Enregistrement du spectacle « La chanson challenge » au Château de Chambord, le 6 juin 2021.

Gaffiot-Moreau / Bestimage / © Gaffiot-Moreau / Bestimage

L’endométriose commence enfin à devenir un sujet important, pris en considération. Pendant longtemps cela n’a pas été le cas, les femmes atteintes de cette maladie ont été mal accompagnées, mal comprises… Pourquoi selon vous cette reconnaissance a mis autant de temps ?
Déjà, certains médecins ne sont pas du tout empathiques, ils n’écoutent pas. Ensuite, le chapitre sur l’endométriose n’existe que depuis trois ou quatre ans dans les ouvrages étudiés en médecine. Les médecins qui exercent depuis longtemps ne sont pas bien informés, ils ne savent pas de quoi il s’agit. En raison de cette errance médicale, l’endométriose peut mettre jusqu’à sept ans à être diagnostiquée.

Au-delà de votre vie professionnelle et de votre rôle de mère, la maladie a empiété sur votre vie intime. Vous confiez dans votre livre cette absence de libido et la souffrance des relations sexuelles. C’est un sujet très tabou chez les femmes malades, comment avez-vous surmonté ces difficultés ?
J’ai la chance d’avoir un compagnon qui m’écoute et me comprend. On communique beaucoup, je lui dis quand je vais bien, quand je ne vais pas bien et quand j’ai mal. C’est essentiel de communiquer, c’est le plus important.

Face à des douleurs constantes, la possibilité de se faire retirer l’utérus devient une solution évidente. Vous traversez alors de nombreux doutes, sauf un : vous ne voulez plus d’enfants.
A la maison, il y a Nina et le fils de mon compagnon. Donc un garçon et une fille, c’est déjà génial. Tous les deux ont beaucoup d’énergie et nos boulots avec Yann [il est manager d’artistes] prendre notre temps. Alors on s’est dit que deux enfants, c’était bien. Je ne me voyais pas revenir au processus PMA, avec les injections d’hormones, le doute, le stress, la déception…

Vous avez longtemps hésité sur cette opération d’hystérectomie. Quelles étaient vos craintes ?
Il y avait quelque chose qui me faisait peur mais je ne savais pas exactement quoi. J’ai appelé une amie psychologue que je vois de temps en temps pour des séances d’hypnose. C’est grâce à cela que j’ai compris que mon subconscient avait associé mon utérus à ma fille. C’est normal finalement, c’était sa première maison pendant la grossesse. J’avais inconsciemment l’impression que si on m’enlevait l’utérus, ma fille serait également enlevée.

Une fois votre peur passée, vous louez une maison proche de la clinique à Bordeaux pour héberger votre fille et vos parents pendant votre convalescence. A cette époque, Nina n’avait pas encore un an. Comment lui avez-vous expliqué ce bouleversement ?
Je lui ai toujours tout dit, je lui explique avec des mots d’enfants ce qui se passe. C’est important de parler aux enfants, même très jeunes. J’ai l’impression qu’elle me comprend, peut-être pas tous les mots mais le ton rassurant que j’utilise, elle le comprend.
Dernièrement, elle m’a demandé un petit frère. J’ai essayé de lui expliquer, du haut de trois ans et demi, que ce n’était pas possible. Je me souviens qu’elle m’a regardé, m’a dit « ok » et a recommencé à jouer.

Qu’avez-vous ressenti lorsqu’elle vous a demandé un petit frère ?
Oh mon Dieu… Mon estomac se serra et ma gorge se serra. Cela m’a fait beaucoup de mal, mais je pense qu’elle a compris. Elle a déjà un grand frère, c’est bien. J’étais fille unique et j’étais très heureuse.

Une fois votre opération terminée, c’est la libération, la douleur a disparu. Comment vous sentez-vous aujourd’hui ?
Si j’ai choisi ce titre pour le livre « Revivre », c’est justement parce qu’il s’agit vraiment d’une résurrection. Je me lève le matin, je n’ai plus de douleurs. Je n’ai plus ce stress de me demander « Est-ce que je vais tomber aujourd’hui ? Est-ce que je vais être opérationnelle sur le plateau ? Est-ce que je pourrai jouer avec ma fille et courir dans le parc ? »
Je découvre une vie normale que je ne connaissais pas et c’est génial.

Quel effet l’écriture de ce livre a-t-elle eu sur vous ? Était-ce thérapeutique ? Une délivrance ?
Cela m’a fait du bien d’écrire ce livre. Je suis d’autant plus heureuse que j’ai reçu plusieurs retours de femmes qui m’ont révélé que la lecture de ce livre leur avait également fait du bien. J’ai voulu montrer que l’espoir existe et j’ai voulu le donner avec ce livre, pour dire à toutes ces femmes qu’elles ne sont pas seules et qu’il existe des solutions.

 
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