Son sourire était proportionnel à sa grande taille, 1,78 mètres. Il vous a immédiatement enveloppé dans un cercle d’énergie positive. Radieuse, naturellement magnétique, la danseuse Judith Jamison a laissé des traces étincelantes partout où elle passait. Star d’envergure internationale, égérie d’Alvin Ailey (1931-1989) dans les années 1970, directrice de l’Alvin Ailey American Dance Theater, à partir de 1989, elle est décédée le 9 novembre, à New York, à l’âge de 81 ans.
Les témoignages se sont immédiatement multipliés sur Instagram pour le célébrer. Mikhaïl Baryshnikov se souvient “son éloquence émotionnelle et sa retenue” quand il l’a découverte sur scène. Le chorégraphe Wayne McGregor salue le«Judith Jamison inspirante, élégante et emblématique». Le danseur Yannick Lebrun, qui, adolescent, passait en boucle le DVD du ballet Hymnedans la maison de sa grand-mère en Guyane, a commenté la disparition de la femme qui l’avait embauché en 2008 : « Les mots ne peuvent exprimer l’immense quantité d’amour et de gratitude que j’ai pour toi, Judi… Merci pour ta grâce, ton courage, ta force, ta ténacité à perpétuer l’héritage d’Ailey. Merci d’avoir réalisé mes rêves… »
Judith Jamison est née le 10 mai 1943 à Philadelphie, en Pennsylvanie. Elle a appris à jouer du piano et du violon auprès de son père. Elle a 6 ans lorsqu’elle s’initie à la danse classique et moderne, puis aux claquettes, aux acrobaties, ainsi qu’à la technique de Katherine Dunham (1909-2006), une activiste afro-américaine pionnière. Une dizaine d’années plus tard, la voici étudiante à la Philadelphia Dance Academy, où cette curieuse et téméraire apprend tout ce qu’elle peut, perfectionnant un corps souple et réactif.
Pouvoir lyrique
La chorégraphe Agnès de Mille (1905-1993) l’engage en 1964 à l’American Ballet Theatre de New York. Un an plus tard, elle rejoint l’Alvin Ailey American Dance Theater : elle a 22 ans. Elle s’est rapidement révélée comme l’une des principales interprètes d’Ailey, électrisant par sa puissance lyrique de nombreux spectacles du chorégraphe, dont son best-seller, Révélations (1960). Dans le solo désormais historique Pleurer (1971), conçu pour elle le musique de John Coltrane et gospels, elle porte haut, entre douleur et morsure, le flambeau d’une pièce dédiée à la mère d’Ailey et à “toutes les femmes noires ».
Son talent séduit et lui vaut de nombreuses collaborations comme avec le Ballet Cullberg, en Suède, ou le Ballet du XX.e siècle, où Maurice Béjart lui demande d’approuver sa version de Fantôme de la roseen 1978. Deux ans plus tard, elle apparaît à Broadway dans Dames sophistiquéespuis fonde, en 1988, le Jamison Project, avant de prendre, à la demande d’Ailey, les rênes de sa troupe.
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