Hommage à une personnalité –
Pierre Veya, la voyance au service du journalisme
Figure de la presse suisse, experte dans le domaine des énergies, l’ancien chef de notre section économique est décédé.
Commentaire Publié aujourd’hui à 13h11
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- Pierre Veya, journaliste suisse, est décédé le week-end dernier à l’âge de 63 ans.
- Elle a révélé la vulnérabilité électrique de la Suisse, influençant ainsi les décisions politiques.
- Pierre a mené des enquêtes sur le Crédit Suisse, contribuant ainsi à l’analyse économique suisse.
- Il a créé Swisspowershift.ch et se consacre à l’énergie même après sa retraite.
C’était un matin de janvier 2022. Pierre Veya nous racontait en séance de rédaction que le géant Alpiq, propriétaire entre autres du barrage de la Grande-Dixence, avait frôlé la catastrophe à Noël. En cause : un mécanisme de garantie exigé par la réglementation boursière et du commerce de l’électricité. Sa direction n’avait pas d’autre choix, nous explique Pierre, de se rapprocher des plus hautes sphères de la Confédération. L’entreprise pourrait avoir un besoin urgent de plusieurs centaines de millions de francs. Dans le cas contraire, il risque un défaut de paiement.
Choc autour de la table : personne parmi nous n’a entendu parler d’un tel scénario. Mais Pierre est sûr de son fait. Il enquête, vérifie, écrit. L’article est publié sur les sites des « 24 Heures » et « La Tribune de Genève » le 18 janvier 2022, puis le lendemain dans nos éditions papier. La vulnérabilité de la Suisse en matière d’approvisionnement électrique se révèle. Trois mois plus tard, alors que la Russie vient d’envahir l’Ukraine, le Conseil fédéral clôture un plan d’urgence ce qui permettrait de débloquer jusqu’à 10 milliards de francs en cas d’explosion des prix de l’énergie.
Cet épisode résume à lui seul ce que Pierre Veya nous a apporté : expertise, clairvoyance, détermination. Il a su anticiper les grands enjeux de notre époque. Il a identifié et analysé des problématiques complexes, puis décrypté leurs conséquences pratiques dans nos vies. Le journalisme, pour lui, n’était pas frivole. Elle devait être un repère, un révélateur, un point d’ancrage pour la société.
Chercheurs, entrepreneurs, décideurs: son réseau dans le domaine de l’énergie était sans équivalent en Suisse romande. Mais Pierre Veya excellait aussi dans la surveillance des affaires bancaires. Si l’on a pu décortiquer précisément les origines et les évolutions de la débâcle du Crédit Suisse, jusqu’à son rachat extremis par l’UBS en 2023, c’est grâce à lui. Chaque année, on pouvait aussi compter sur ce grand connaisseur de la géopolitique mondiale pour aller au WEF de Davos afin de détecter les dernières tendances des marchés.
C’est peu dire que la presse suisse a perdu un grand serviteur le week-end dernier. Pierre Veya, né à Saint-Brais (JU), a fait ses armes dans le Jura (« Le Démocrate », « L’Impartial »), puis a travaillé à « L’Hebdo » et « L’Agefi », avant de rejoindre “-”dont il fut rédacteur en chef de 2010 à 2015. Par la suite, il rejoint « Matin Dimanche », qui s’associe aux « 24 Heures » et à « La Tribune de Genève » en 2018. Ce chroniqueur hors pair aura été le très chef respecté de notre section économie jusqu’à sa retraite anticipée en avril 2024.
Fier de ses racines
Pierre a succombé à une maladie aussi dévastatrice qu’impitoyable. Alors qu’il menait un projet ambitieux, Swisspowershift.chune plateforme d’information dans le domaine des énergies lancée avec son ami Olivier Wurlod, qu’il avait connu au sein de notre rédaction. Même à la retraite, Pierre Veya reste à l’affût des évolutions constantes des secteurs qui le passionnent. Membre influent du Conseil Climat établi à Genève, il écrit encore régulièrement des chroniques dans nos chroniques. La dernière, publiée il y a tout juste un mois, concernait l’élimination artificielle et massive du CO₂ de l’atmosphère. Il a vu là « la solution de la dernière chance » pour tenter de résoudre la crise climatique.
Tout comme notre cher collègue et ami Pierre Veya : un journaliste lucide, pugnace et brillant. Mais c’était aussi un homme attachant, resté proche de la terre, fier de ses racines paysannes jurassiennes. Lorsqu’il parcourait les routes de campagne à vélo, il observait toujours les cultures et les champs, il admirait les forêts. Il aimait prendre soin de sa maison et de son magnifique jardin. Il aimait plus que tout sa famille, son épouse Donatienne, leurs trois filles et leurs petits-enfants.
Pierre leur a été retiré bien trop tôt, à l’âge de 63 ans. Nous partageons modestement leur douleur et leur présentons nos plus sincères condoléances.
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