Deux athlètes de 14 ans ont été exclus des activités de Gymnastique Québec pour une durée indéterminée, alors qu’une enquête détermine si les adolescents ont agressé sexuellement un jeune coéquipier âgé de seulement 11 ans, l’ont harcelé et intimidé.
Les allégations sont exposées dans une cause entendue l’été dernier en Cour supérieure. Je vous préviens, c’est choquant. Les deux jeunes sont notamment accusés d’avoir :
- a placé l’enfant sur le ventre, a enfoui son visage dans un trou, lui a tenu les chevilles et les poignets pour l’immobiliser avant d’enfoncer ses doigts dans son anus par-dessus ses vêtements, malgré ses demandes d’arrêt ;
- mettre l’enfant sous un tapis, puis lui sauter dessus ;
- incité un autre enfant à mettre un bâton enduit de miel dans les fesses de la victime pendant qu’elle s’entraînait à la barre fixe ;
- a soulevé l’enfant par les bras, s’est appuyé contre lui et l’a secoué sur les casiers du vestiaire pour que ses pieds ne touchent plus le sol, ce qui lui aurait causé des contusions et des blessures au dos.
Les histoires d’abus perpétrés par des enfants contre d’autres enfants dans le sport sont rarement diffusées publiquement. En effet, la plupart d’entre eux sont gérés de manière confidentielle par le responsable des plaintes. C’est quoi ? Un organisme gouvernemental qui enquête sur les plaintes pour abus et harcèlement dans le sport. Si l’agent considère la plainte recevable, il la soumet au Comité de protection de l’intégrité (CIP), qui enquête et propose des sanctions. Les décisions du CPI sont également confidentielles.
Alors pourquoi cette histoire est-elle entrée dans l’espace public ?
Parce que les parents des deux adolescents de 14 ans ont comparu devant la Cour supérieure pour contester la décision de l’agent des plaintes.
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Au fond, le responsable des plaintes est une excellente idée. Depuis sa création en 2020, les fédérations n’ont plus à enquêter sur leurs propres membres – avec tous les conflits d’intérêts imaginables. Cependant, dans cette histoire, sa compétence a été sérieusement mise à l’épreuve.
Ce qui s’est passé?
Le 3 juin 2024, l’agent a reçu une plainte de la mère de l’enfant de 11 ans*. Le lendemain, l’organisation la contacte pour plus de détails. Cela semblait sérieux. Dans les heures qui ont suivi, conformément à la loi, l’agent a signalé les allégations d’abus sexuels à la Direction de la protection de la jeunesse.
Tout s’est passé très vite, en moins de deux jours. Le 5 juin, l’officier a annoncé aux parents des deux gymnastes que leurs fils seraient exclus « immédiatement » de leur club de gymnastique, de leur programme sports-études et de toutes les activités de Gymnastique Québec « pour une durée indéterminée ». . L’un des enfants concourait alors hors de sa région. Le club a convoqué ses parents pour qu’ils viennent le chercher en pleine nuit.
A cette époque, les parents n’avaient aucune idée des accusations portées contre leurs fils. C’est resté ainsi pendant 12 jours. Pour quoi ? Car le Responsable des plaintes est tenu de respecter la « Politique de protection de l’intégrité », qui prévoit qu’une plainte pour inconduite sexuelle ne doit pas être communiquée à l’auteur présumé de l’abus.
Le 17 juin, l’agent leur fait finalement parvenir un résumé de la plainte. Les audiences devant la CPI étaient prévues pour la mi-juillet. Sauf qu’entre les deux dates, une plainte officielle contre leurs fils a été déposée à la police. Le CPI a donc dû annuler les auditions, car selon sa politique, il ne peut pas travailler en parallèle avec une enquête de la DPJ ou de la police.
Conséquence : un mois après leur expulsion, les deux gymnastes restaient suspendus, sans jamais pouvoir présenter leur version des faits.
C’est alors que leurs parents ont décidé de s’adresser au tribunal. Ils ont soutenu que si leurs enfants « avaient eu l’occasion de présenter leurs observations, le responsable des plaintes aurait vite compris que les actes reprochés ne sont que des enfantillages ou des taquineries de mauvais goût, que les garçons normaux de cet âge ont l’habitude de faire sans aucune méchanceté. ou l’intention de faire du mal.
Je remarque que les « taquineries » d’un « garçon normal » ont évolué pour le pire depuis mes 3 ans.e secondaire, mais bon, là n’est pas la question.
Les parents ont demandé que l’exclusion soit levée jusqu’à la conclusion de l’enquête de la CPI. Leurs fils, affirment-ils, n’ont pas bénéficié d’un procès équitable. Le tribunal a confirmé qu’il y avait « de sérieuses questions à soulever lors du contrôle judiciaire ».
Les deux gymnastes interdites sont également des « athlètes de haut niveau », et le fait d’être privées de leur entraînement au club constitue un « préjudice irréparable », ont argué les parents.
Le juge a reconnu que les deux adolescents pourraient subir un « préjudice grave » et que leur exclusion du club « retarderait leur progression ». En revanche, elle a précisé qu’il ne s’agissait pas d’un préjudice irréparable.
« Nous ne sommes pas en présence de sportifs privés de moyens de subsistance, ou privés de la jouissance d’un droit prévu par la Charte. Nous sommes en présence d’athlètes qui sont au niveau secondaire et qui performent bien dans leur discipline. »
Finalement, le tribunal s’est rangé du côté du responsable des plaintes et a confirmé la suspension. Il a estimé que la réintégration des gymnastes de 14 ans aurait été « une situation qui met en danger la santé, la sécurité et le bien-être de l’enfant de 11 ans, mais aussi celle des autres membres ainsi que la confiance ». de ces derniers envers la Fédération ».
J’ai contacté Gymnastique Québec pour connaître les derniers détails de l’histoire. «Une enquête indépendante et impartiale est actuellement en cours», m’a indiqué la directrice générale Josée Gélinas. Elle n’a pas précisé s’il s’agissait d’une enquête de la police, de la DPJ ou du CPI. « Afin de garantir la rigueur et l’intégrité de ce processus, les détails entourant cette enquête doivent rester strictement confidentiels. »
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Je l’ai écrit dans le passé, le responsable des plaintes et la CPI sont imparfaits. Une décision si confuse qu’elle pénalisait davantage la victime que son agresseur.
Lire la chronique « Une décision qui rate la cible »
Ces critiques et contestations sont normales. Après tout, le responsable des plaintes n’a pas encore cinq ans. Cela reste un travail en cours. De plus, le gouvernement le remplacera d’ici juin prochain par le Protecteur de l’intégrité dans les loisirs et le sport, qui aura plus de portée et de mordant. C’est le bon moment pour remettre en question certaines méthodes évoquées dans cette affaire, notamment le fait d’ajouter des justifications à ses décisions rétrospectivement.
Mais dans l’ensemble, nous pouvons être heureux que l’agent ait réussi ce test judiciaire. Une défaite aurait mis à mal cette institution devenue incontournable pour le sport québécois.
*Une interdiction de publication nous empêche de divulguer toute information permettant d’identifier les enfants, leur club de gymnastique et leur lycée.
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