Inspirés par la parfumerie de niche, Valentino, Bottega Venetta, Fendi et Balmain sortent une collection de parfums. Oublié la signature unique qui nous suit toute notre vie. Les jus peuvent être récupérés et portés à notre guise.
En juin dernier, Fendi rejoint le club de plus en plus fermé des marques de mode ayant choisi de lancer une collection de parfums. Au menu de ce vestiaire olfactif : sept cartes blanches confiées à des stars du parfum et toutes inspirées par une personnalité notable de la famille à l’origine de la marque romaine.
Depuis, rien qu’en 2024, Balmain, Valentino et Bottega Veneta ont emboîté le pas tandis que les maisons déjà installées dans ce modèle inspiré de la parfumerie de niche ont élargi leurs offres. Alors que Chanel et Hermès viennent chacun d’enrichir leurs lignes premium d’un opus – Comète en Exclusifs et Oud Alezan en Hermessence –, Dior a décidé d’ajouter cette année une véritable extension de gamme à sa Collection Privée.
Baptisés Esprit de Parfum (395 euros les 80 ml), ils revisitent cinq des « parfums totems » de la marque bousculés par le parfumeur Francis Kurkdjian. « Je voulais que leur écriture affirme un vrai parti pris esthétique, que leurs sillages soient puissants », assure-t-il.
Naissance d’une niche
« En vingt ans à peine, le modèle traditionnel de la franchise – un parfum star comme N°5 ou J’Adore sans cesse décliné et incarné par une égérie dans de coûteuses campagnes publicitaires – semble avoir perdu de son attrait au profit d’« un logique dite « à la Tom Ford », l’un des pionniers de la mode à avoir opéré un virage très lucratif vers la niche en 2006 », détaille Vincent Grégoire, directeur des tendances consommation chez Nelly Rodi à Paris. Avec une collection de parfums, les marques s’appuient sur la logique du « moins mais mieux et plus cher ».
Une démarche qui, selon les prévisions du cabinet de conseil en stratégie, devrait encore s’intensifier dans la décennie à venir. Évalué aujourd’hui à 3 milliards de dollars, le marché mondial des parfums de niche devrait atteindre 7,4 milliards de dollars d’ici 2031. « En tournant le dos aux best-sellers de la parfumerie sélective dont les prix flirtent désormais avec ceux de la niche, les jeunes de la Gen Z, notamment, entendent afficher leur envie de se démarquer en optant pour des senteurs qui reflètent leur personnalité » , poursuit Vincent Grégoire.
Construit comme un véritable « dressing olfactif », le Vestiaire des Parfums d’Yves Saint Laurent constitue un parfait exemple de ce mouvement. Ici, chaque jus fait référence à une pièce iconique – Tuxedo, Saharienne, Lavallière – renforçant ainsi l’idée qu’on se parfume aujourd’hui en s’habillant, selon l’humeur du moment ou les occupations que l’on exerce. ‘nous avons en vue.
Collectionite aiguë
Le design des flacons – un modèle quasiment identique, à un détail près, comme la couleur du verre ou du bouchon par exemple – incite également à les collectionner, faisant de cet alignement élégant un élément de décoration qui cartonne sur les réseaux.
« Pour les fans de labels comme Louis Vuitton ou Loewe, la collection de parfums est un bon moyen de marquer visuellement son appartenance à cette tribu… Même pour ceux qui n’ont pas les moyens d’acheter des vêtements ou des accessoires devenus de plus en plus chers ces dernières années, souligne Vincent. Grégoire. Ces lignes, souvent vendues dans les boutiques maison et non dans les parfumeries traditionnelles, leur permettent également de vivre une véritable expérience client, de repartir avec un sac logoté.
Choc des matières premières
Décomposée en une multitude de mini-histoires, la collection de parfums devient un formidable outil de « storytelling » pour les maisons au riche patrimoine, un fantastique support de création. Ainsi, lorsque Matthieu Blazy, actuel directeur artistique de Bottega Veneta, a décidé de lancer la première collection de parfums de la maison italienne, c’est sur l’héritage vénitien de cette dernière qu’il a choisi de s’appuyer, le flacon en verre translucide faisant référence à la lagune qui entoure Venise. .
Chez Balmain, Olivier Rousteing a même construit la gamme Les Eternels autour de quatre parfums iconiques de la maison tout droit sortis des archives et réinterprétés dans les codes d’aujourd’hui. Dries Van Noten l’a bien compris aussi : en proposant en 2022 non pas un mais dix parfums, il a voulu refléter au mieux sa vision artistique.
« Dans ma mode, je propose toujours des collections étendues et généreuses », explique-t-il. J’ai voulu rester dans une démarche de parfumerie de niche, avec des jus qui ne seraient pas testés, conçus autour de conflits de matières premières qu’on croirait a priori inconciliables. On dirait que ça marche… Le designer belge a ouvert une boutique à Paris exclusivement dédiée aux parfums et au maquillage. Et vient de proposer à ses fans quatre nouvelles combinaisons intrigantes.
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