Détenu depuis son arrestation il y a neuf jours pour avoir grimpé sur la structure du pont Jacques-Cartier et bloqué la circulation automobile, le militant écologiste Olivier Huard a été libéré sous conditions jeudi.
Olivier Huard, 47 ans, et Jacob Pirro, 24 ans, qui ont grimpé sur la structure du pont le 22 octobre, ont été accusés de méfait pour avoir empêché l’exploitation légitime de biens publics et entrave au travail de policiers. Une troisième personne, celle qui faisait la liaison entre les policiers et les grimpeurs, Michèle Lavoie, 39 ans, a été accusée de méfait.
Ces militants liés aux groupes environnementaux Last Generation Canada et Collectif Antigone ont tous trois été détenus.
Si ses deux coaccusés ont été libérés ces derniers jours, Olivier Huard est resté en prison.
Le juge André Perreault, de la Cour du Québec, s’est finalement prononcé en faveur de sa libération après avoir entendu les arguments des avocats.
La Couronne a exigé que de nombreuses conditions soient imposées à M. Huard, dont plusieurs ont été rejetées par le juge. Même si ce militant aura le droit de parler aux médias et de participer à des rassemblements, il lui est interdit de s’arrêter sur le pont Jacques-Cartier.
Représenté par l’avocate Barbara Bedont, Olivier Huard a parlé, entre autres, de ses valeurs et de l’importance de sensibiliser le public à la cause environnementale.
Le juge a néanmoins souligné le préjudice subi par de nombreuses personnes en raison de la fermeture du pont, qui, quel que soit le bien-fondé de l’affaire, était inacceptable. Il y a beaucoup de gens qui ont manqué des rendez-vous médicaux, des traitements contre le cancer, donc le problème n’est pas le message : le problème est vraiment […] comment transmettre ce message
a ajouté l’avocate de la directrice des poursuites criminelles et pénales, Annabel Sheppard.
Des dizaines de personnes se sont rendues au palais de justice de Montréal pour assister à l’audience. Il y avait tellement de militants et de défenseurs de l’environnement que la salle d’audience était pleine à craquer et qu’une salle de débordement a été ouverte.
Une manifestation de soutien aux accusés a également eu lieu dans la matinée devant le palais de justice.
Lors du blocus du pont Jacques-Cartier, le 22 octobre, des militants ont déployé une banderole au sommet de l’ouvrage où l’on pouvait lire : Le pétrole nous tue
. Ils ont notamment appelé le gouvernement fédéral à adhérer au traité de non-prolifération des combustibles fossiles afin que l’extraction et la combustion du pétrole, du gaz et du charbon cessent d’ici 2030.
Des militants ont accroché une banderole au sommet de la structure du pont le 22 octobre.
Photo : Radio-Canada / Simon-Marc Charron
Le silence imposé à ses deux coaccusés
Contrairement à Olivier Huard, les deux autres militants accusés dans cette affaire n’ont pas le droit de parler aux médias dans le cadre de leurs conditions de libération.
Tout en dénonçant ne pas pouvoir manifester pacifiquement
une porte-parole du Collectif Antigone, qui se présente par son prénom seulement, Mathilde, a dénoncé cette dernière condition imposée à Jacob Pirro et Michèle Lavoie.
Le fait de ne pas pouvoir parler aux médias, de ne pas pouvoir nous exprimer sur ce qui se passe en ce moment sur la crise climatique et le processus judiciaire qui est en cours et la criminalisation, c’est une atteinte à la liberté.
Le président de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ), Éric-Pierre Champagne, a également critiqué cette condition.
Dans un communiqué publié cette semaine, il a écrit que le FPJQ considère que le silence imposé à ces militants est abusif et demande que cette condition à leur libération soit levée au plus vite
.
Le rôle des journalistes et des médias est avant tout d’être témoins de l’actualité. Ne pas interroger ces militants sur les motivations de leur acte de désobéissance civile créerait un dangereux précédent.
» a indiqué M. Champagne.
Amnesty International s’est également exprimée sur cette question dans un communiqué publié mercredi.
Les conditions imposées à l’officier de liaison et au militant libérés sous caution semblent également exagérées.
a indiqué l’organisation. Il leur est interdit de s’exprimer dans les médias et de poster des messages sur les réseaux sociaux, conditions qui limitent leur […] la liberté d’expression de manière disproportionnée.
Conditions de détention dénoncées
Amnesty International s’est également déclarée préoccupée par les conditions de détention des accusés.
L’organisation souligne que selon ses informations, les militants n’ont pas reçu de vêtements de rechange, ont eu un accès limité à l’eau potable et n’ont pas pu quitter leur cellule pendant plusieurs jours pendant leur détention
.
Les groupes Collectif Antigone et Last Generation avaient d’ailleurs annoncé dimanche dernier qu’Olivier Huard entamait une grève de la faim pour dénoncer sa situation.
Avec les informations de Marc Verreault
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