Le leader de l’OSM, Rafael Payare, rêvait depuis son arrivée à Montréal de lancer le programme d’enseignement musical El Sistema, dont il a bénéficié durant sa jeunesse au Venezuela. C’est ce qui se fait depuis novembre dans quatre écoles de Montréal-Nord. Et ce n’est qu’un début, promet-il.
Publié à 12h06
Mis à jour à 17h46
Rafael Payare rayonnait de bonheur vendredi lors de la conférence de presse annonçant officiellement l’implantation d’El Sistema à Montréal. « Cela m’apporte beaucoup de joie », confie le chef avec son enthousiasme toujours contagieux. « Dans ce monde sombre, je trouve que ça donne de l’espoir. »
Le projet est encore petit : deux écoles de Montréal-Nord y participent depuis novembre, Saint-Rémi au primaire et Calixa-Lavallée au secondaire. Deux autres établissements se sont ajoutés en janvier.
«Nous avons un projet pilote à Montréal-Nord, mais ce que nous aimerions, c’est créer des nucléos, comme on les appelle, partout au Québec», affirme la PDG de l’Orchestre symphonique de Montréal (OSM), Mélanie La Couture.
L’OSM vise à rejoindre 600 jeunes sur cinq ans. Actuellement, 69 sont inscrits, dont 48 à l’école de Saint-Rémi : c’est là que le projet Music for Children a été lancé par Kent Nagano en 2016, qui permet à 200 bambins d’âge préscolaire d’avoir accès à 30 minutes de musique chaque jour. Par la suite, une école de musique a été ouverte et un camp de jour a débuté en 2022.
“Nous élargissons ce qui a été développé ici”, déclare Rafael Payare, qui a repris cette devise d’El Sistema : pour lui, la musique n’est pas un privilège, mais un droit. Née au Venezuela, cette méthode intensive d’enseignement de la musique orchestrale pour tous, qui fête ses 50 ans en 2025, est aujourd’hui implantée dans une soixantaine de pays, et a contribué à former des millions d’enfants. Le directeur artistique de l’OSM en est un pur produit et il en connaît tous les bienfaits.
« Je sais par expérience que ce n’est pas une fabrication ! » Qu’est-ce que cela a changé pour lui ? ” Tous ! Si je n’avais pas découvert la musique, je ne serais pas la personne que je suis. Je n’aurais pas joué du cor d’harmonie, je ne serais pas devenu chef d’orchestre, je n’aurais pas déménagé à Montréal. Un autre monde est arrivé. » Mais le but n’est pas de faire de tous ces petits musiciens des professionnels, explique Rafael Payare.
Ce qui est important c’est qu’avec cette éducation, ils sachent qu’ils doivent s’entendre, s’harmoniser, pour que cela aboutisse à quelque chose de plus beau. Et si nous pensons de cette façon, cela peut changer beaucoup de choses dans tous les domaines. Cela ne sera jamais perdu.
-Rafael Payare, directeur artistique de l’OSM
Rafael Payare rêve de voir El Sistema se développer partout au Québec. ” Pourquoi pas ? C’est pour cela qu’on dit que c’est un système : ça commence par un, puis deux, et puis c’est comme des racines. Ça passe partout. »
Mélanie La Couture pense aussi que c’est possible. Le tout supervisé par l’OSM ? Le Québec est toujours grand ! « Nous sommes déjà en discussions avec des conservatoires régionaux, qui pourraient s’en charger. Nous aiderions avec la programmation, le programme d’études. Et nous avons un partenariat avec El Sistema Venezuela, nous pourrons en faire profiter le reste du Québec. Ils ont encore 50 ans d’expertise ! »
Mais la grande différence avec le Venezuela est que là-bas, El Sistema est financé par le gouvernement. «C’est vrai», dit-elle. Ici, c’est complètement privé pour le moment. Mais quand nous aurons prouvé les bénéfices de la chose, des financements publics viendront s’y ajouter. On ne pourra pas soutenir cela partout au Québec juste avec la philanthropie ! Mais nous sommes heureux que les donateurs s’impliquent et nous permettent de lancer le projet. »
Rafael Payare envisage déjà de diriger un grand concert sur l’esplanade du Stade olympique avec l’OSM et plusieurs centaines d’enfants entraînés par El Sistema. “Imaginer! » On a envie d’y croire : après avoir suivi les cours à l’école Saint-Rémi, mercredi après-midi, on a pu constater que cette première promotion avait bien progressé. A Noël, après à peine un mois et alors que la majorité d’entre eux n’avait jamais joué de leur instrument, ils jouaient déjà Vive le vent.
Le sourire de Rafael Payare en dit long sur sa fierté. “Et attention, ça va aller encore plus vite.” Attachez votre ceinture de sécurité ! Vous verrez. »