Marquée par des affrontements meurtriers, l’opération d’arrestation du général Mohammed Kanjo Hassan a été lancée mercredi par les forces de sécurité à Tartous, dans l’ouest du pays, bastion de la minorité alaouite dont est issue M. Assad, renversé le 8 décembre par une coalition de rebelles dirigée par par le groupe islamiste sunnite radical Hayat Tahrir al-Sham (HTS).
Le chef de la justice militaire de Bachar al-Assad, promu à ce poste en 2014, a été arrêté dans la localité de Khirbet al-Ma’zah avec 20 membres de sa garde rapprochée, a indiqué l’OSDH.
Mohammed Kanjo Hassan a condamné à mort “des milliers de personnes au cours de procès expéditifs”, a déclaré à l’AFP Diab Seria, co-fondateur de l’Association des détenus et disparus de la prison de Saydnaya (ADMSP).
Ce centre pénitentiaire, construit dans les années 1980 sous le règne de Hafez al-Assad – le père de Bachar – pour héberger des détenus politiques, est devenu un symbole du contrôle impitoyable de l’État syrien sur ses citoyens.
Selon l’ADMSP, environ 30 000 personnes étaient détenues à Saydnaya depuis 2011, certaines soumises aux pires tortures, parmi lesquelles seulement 6 000 avaient été libérées.
L’association estime la fortune constituée par Mohammed Kanjo Hassan à quelque 150 millions de dollars aux dépens des familles des détenus qui ont payé pour obtenir des informations sur leurs proches, qui n’ont jamais été divulguées.
L’arrestation de “l’un des criminels du régime Assad”, “représente une étape importante vers l’obtention de justice et la poursuite des criminels”, s’est réjouie sur X la Coalition de l’opposition syrienne, qui regroupe les principales formations politiques en exil.
Son arrestation a été marquée par des violences après que des hommes armés ont tenté d’empêcher les forces de sécurité de le capturer. Quatorze membres des forces de sécurité et sept hommes armés sont morts en 24 heures, selon l’OSDH.
L’opération de Tartous a permis de “neutraliser un certain nombre” de “miliciens” fidèles au président déchu, a indiqué l’agence officielle Sana. L’objectif est de « restaurer la sécurité »
Mercredi, des milliers d’Alaouites ont manifesté à Tartous, Banias, Jableh et Lattaquié (ouest) ainsi qu’à Homs (centre), après la diffusion d’une vidéo sur les réseaux sociaux montrant des combattants attaquant l’un de leurs sanctuaires à Alep (nord), selon l’OSDH. Cinq employés du sanctuaire ont été tués.
Ces manifestations alaouites sont les premières depuis le renversement de M. Assad, qui a fui avec sa famille vers Moscou au lendemain de l’offensive rebelle qui a pris le contrôle de la majeure partie du pays en 11 jours.
Les autorités ont déclaré que la vidéo concernait la prise d’Alep par les rebelles le 1er décembre, et le ministère de l’Information a averti jeudi qu’il était « strictement interdit de diffuser ou de publier toute information visant à semer la division ». « .
Les nouvelles autorités s’efforcent de rassurer la communauté internationale et les Syriens, en s’engageant à respecter les droits des minorités dans un pays traumatisé par 13 années d’une guerre dévastatrice, déclenchée en 2011 par la répression brutale des manifestations pro-démocratie, et qui a laissé plus de 500 000 morts.
L’analyste Sam Heller, de la Century Foundation, a évoqué à l’AFP un “certain degré d’anxiété” parmi les minorités. “Les informations sur les attaques (…) accentuent leur sentiment de vulnérabilité”.
Ailleurs en Syrie, des affrontements ont éclaté dans le nord-ouest de la province de Homs entre des hommes armés pro-Assad et les forces de sécurité, dont quatre membres ont été tués, a indiqué l’OSDH. L’agence Sana a affirmé que des « groupes hors-la-loi liés aux milices d’Assad » avaient attaqué les forces de sécurité.
Un témoin a fait état d’« un déploiement important d’hommes du HTS dans les quartiers où les habitants avaient manifesté la veille » dans la ville de Homs. “Les voitures sont fouillées, les gens ont peur.”
A Lattaquié, des combattants armés, pour la plupart cagoulés, ont tiré en l’air au milieu d’une circulation dense et d’immeubles résidentiels, selon un correspondant de l’AFP sur place. L’un d’eux appelle à « neutraliser » le mouvement pro-Assad.
Dans la capitale Damas, les routes menant au quartier à majorité alaouite de Mazeh 86 sont bloquées, a constaté un correspondant de l’AFP. « Entrée interdite », a déclaré un combattant HTS à un poste de contrôle.