Après trois mois et demi d’audience, les 51 hommes jugés dans le procès pour viol de Mazan ont eu une dernière occasion de s’exprimer, lundi matin. Dominique Pélicot, le principal accusé, a pris la parole en premier, suppliant sa famille d’« accepter ses excuses ».
“Avez-vous quelque chose à ajouter pour votre défense ?” : c’est par cette question que le président du tribunal, Roger Arata, a ouvert l’audience, en s’adressant aux 51 accusés qui ont abusé de l’inerte et drogué Gisèle Pélicot depuis une décennie par elle. ex-mari, Dominique Pélicot.
Le principal accusé a été le premier à prendre la parole : « Je voudrais commencer par saluer le courage de mon ex-femme », a-t-il déclaré devant le tribunal correctionnel du Vaucluse : « Je la prie, ainsi qu’au reste de ma famille, de bien vouloir accepter mon excuses”, a poursuivi l’homme de 72 ans : “Je regrette ce que j’ai fait, causant des souffrances pendant quatre ans [la date de la révélation des faits, en 2020, ndlr.]Je leur demande pardon.
>> Lire : “Je suis un violeur”, reconnaît Dominique Pelicot, principal accusé du procès pour viol de Mazan
Vêtu d’un jogging gris, assis dans le box vitré où il apparaît aux côtés des dix-sept autres prévenus détenus, Dominique Pelicot a réaffirmé avoir dit « toute la vérité » depuis le début de ce procès qui a débuté le 2 septembre à Avignon. . Il a également remercié le tribunal qui a accepté qu’il puisse rester assis sur une chaise spéciale en raison de son état de santé fragile, ce qui “aurait pu être interprété comme une désinvolture” mais qui ne l’était pas, a-t-il assuré.
Il a également eu un mot pour son avocat, Mᵉ Béatrice Zavarro, qui lui a permis de ne pas « lâcher la rampe ». Sinon, « cela aurait été une preuve de lâcheté envers mon peuple et aurait permis aux accusés de se mettre plus facilement d’accord avec eux. Alors j’ai tenu bon. »
“On m’a donné des titres, je compte plutôt me faire oublier”, a-t-il prévenu, sentant qu’il avait une “honte intérieure” : “J’ai une coquille que je me suis créée, sinon on meurt en prison”, a poursuivi celui qui a été décrit par plusieurs avocats des coaccusés comme « l’ogre de Mazan », un « loup » qui aurait piégé leurs clients en leur faisant croire au scénario d’un couple libertin où l’épouse ferait semblant de dormir.
Il a expliqué que « la privation de ne plus voir ses proches est pire que la privation de liberté » : « Je peux dire à toute ma famille que je les aime. Voilà, vous avez le reste de ma vie entre vos mains», a-t-il conclu à l’adresse des cinq magistrats professionnels du tribunal.
>> Lire : La sérialité, une notion juridique cruciale dans les affaires de viol
« Rien à ajouter »
Après Dominique Pélicot, tous les autres accusés ont défilé au micro, dans le box des détenus ou à la barre de ceux qui comparaissent libres, pour une dernière prise de parole. Mais la moitié se contentent d’un simple « rien à ajouter ».
“J’ai honte de moi, je suis dégoûté, désolé pour ma femme et ma famille”, a déclaré Jean-Pierre M., 63 ans, le deuxième à prendre la parole lundi matin. Seul parmi les 51 accusés à ne pas être poursuivis pour des faits sur Gisèle Pelicot, ce disciple de Dominique Pelicot avait violé sa propre femme en reproduisant le procédé de son mentor, et en sa compagnie.
«Je regretterai mes actes toute ma vie», a déclaré Mathieu D., 62 ans ; “On me reproche de ne pas être empathique, d’être un monstre”, a déclaré Redouan F., 55 ans. Par leurs propos, plusieurs accusés ont tenté d’expliquer leurs actes sur Gisèle Pelicot.
D’autres, allant plus loin, s’adressent directement à Gisèle Pelicot, reconnaissent leurs actes et tentent de s’excuser : « C’est bien à votre corps que j’ai fait subir ce viol », a déclaré Cédric G., 51 ans. “Je m’excuse auprès de Mme Pelicot, je regrette et je lui demande pardon”, a déclaré Romain V., 63 ans, l’un des quatre accusés à avoir répondu six fois à l’invitation que leur avait lancée Dominique Pelicot sur le site coco.fr. , désormais fermé par la justice.
Un autre prévenu qui s’est rendu six fois au domicile conjugal Pélicot à Mazan, Jérôme V., 46 ans, l’a prévenu que “quelle que soit la peine” qui lui serait infligée en fin de semaine, il ne ferait pas appel, “par respect pour la victime, pour qu’elle n’ait pas à revivre » un nouveau procès. Contre lui, le parquet a requis 16 ans de réclusion criminelle.
Sur le banc des parties civiles, Gisèle Pelicot était seule lundi, avec l’un de ses deux avocats. Aucun de ses trois enfants n’avait fait le déplacement pour entendre les dernières paroles de leur père. Et comme c’est désormais une habitude, elle a reçu une standing ovation du public à sa sortie de la salle d’audience.
Stéphanie Jaquet et l’AFP