Au 1er janvier 2025, la distribution de la presse nationale et internationale cessera en kiosque en Polynésie française : Hachette Pacifique, seul distributeur local, arrêtera leur importation.
“Ça me fait mal au cœur de voir que tout cela va disparaître”, déplore Monique Tautia alors qu’elle dépose sa dernière livraison de magazines mensuels dans les rayons de la maison de presse où elle travaille à Pirae, sur l’île de Tahiti.
Agée de 62 ans, elle a passé quatre décennies à ranger des magazines sans jamais les lire. “Je ne regarde que les titres et je vois les modes passer : par exemple, les revues d’histoire, on n’en avait presque pas il y a 40 ans.”
Bientôt, il n’y aura presque plus de magazines. L’unique distributeur de la collectivité, Hachette Pacifique, a annoncé dans une simple note aux buralistes qu’il cesserait de livrer la presse nationale et internationale après le 31 décembre.
L’entreprise n’a pas souhaité répondre à l’AFP mais a demandé en mars une aide financière au Haut-commissariat de France en Polynésie, arguant que le service était “largement déficitaire”.
La crise de répartition n’est pas nouvelle dans l’immense territoire du Pacifique qui s’étend sur une superficie comparable à celle de l’Union européenne. En 2020, en pleine pandémie de Covid-19, la livraison des quotidiens avait cessé.
En octobre 2024, la distribution par voie aérienne des hebdomadaires et mensuels avait également cessé mais ils continuaient d’être livrés par bateau, avec plus d’un mois de retard en France.
Le gouvernement local, de son côté, ne s’émeut pas de cette pénurie d’approvisionnement. Interrogé par l’AFP, il a simplement affirmé que la collectivité “n’est pas obligée de remplacer les acteurs privés”.
– Un seul par jour –
Dans les kiosques tahitiens, les quelque 600 titres encore en vente disparaîtront donc à partir du 1er janvier. Seuls subsisteront quelques magazines locaux et le seul quotidien de Polynésie, Tahiti Info.
Directeur du géant de la distribution de presse France Messagerie, qui expédie chaque jour 700 000 journaux et magazines en France métropolitaine et outre-mer, Eric Matton a déclaré à l’AFP qu’il étudiait avec son concurrent Messageries Lyonnaises de presse (MLP) “la possibilité d’organiser une distribution alternative via la Nouvelle-Calédonie”. ».
Mais la répartition en Nouvelle-Calédonie a elle-même été très affectée par les émeutes qui ont touché l’archipel après la tentative d’adoption d’un projet de réforme constitutionnelle visant à modifier le corps électoral, laissant planer le doute sur cette possibilité. .
Laurent Martinez, le patron de Monique Tautia, s’inquiète de ne plus pouvoir bientôt garder son employé dans la petite entreprise familiale qui porte le prénom de sa mère, Kina.
« La presse représente 20 % de mon chiffre d’affaires, mais c’est aussi un produit phare pour les clients réguliers qui viennent chercher un magazine puis achètent autre chose », explique-t-il.
Sa boutique s’est déjà diversifiée : elle propose un rayon presse, mais aussi de la papeterie, des jeux de hasard, du tabac, un service de reprographie ou encore des glaces.
Et il lui reste encore un mince espoir : l’impression des titres nationaux par un imprimeur local.