Ce n’est pas le raz-de-marée qu’on redoutait tant. Mais c’est comme ça – .

Ce n’est pas le raz-de-marée qu’on redoutait tant. Mais c’est comme ça – .
Ce n’est pas le raz-de-marée qu’on redoutait tant. Mais c’est comme ça – .

Sans grande surprise, le Rassemblement national (RN), allié d’Eric Ciotti, est arrivé en tête du premier tour des élections législatives françaises. Il a remporté 37 sièges avec 9 377 297 voix, soit 19,01% des inscrits et 29,5% des exprimés. L’Union de la gauche (UG) s’est contentée de la deuxième place avec 32 sièges, soit 8 974 566 voix. Quant à la majorité présidentielle, elle a essuyé un échec retentissant avec 2 sièges (6 425 217 voix).

Olivier Faure, Premier secrétaire du Parti socialiste, et l’ensemble des dirigeants du Nouveau Front populaire ont appelé leurs candidats arrivés en troisième position à se retirer afin de bloquer le Rassemblement national. Comment expliquer ces résultats ?

Dynamique

« Il y a une dynamique clairement croissante depuis plusieurs années. L’année 2002 a été fondatrice puisque les élections présidentielles de cette année-là ont durablement marqué la vie politique française. En effet, lors de ces élections, le FN a réussi à attirer 4 millions d’électeurs au premier tour et 5 millions au second. En 2022, Marine Le Pen a recueilli 13 millions de voix », nous explique une source partisane française. Et de préciser : « Le RN dispose désormais d’un électorat standardisé qui s’étend sur tout le territoire national et dans toutes les couches sociales. Il ne s’agit plus seulement d’ouvriers ou de personnes en situation de déclassement social. Il touche aujourd’hui des professions qui étaient relativement épargnées, comme les enseignants de l’Éducation nationale. Selon certaines études, un enseignant sur trois se déclare adhérent du FN. »

Pour notre source, il est impensable que des personnes qui ont voté il y a 15 jours aux élections européennes changent d’avis. « Les presque 10 millions d’électeurs qui ont choisi le RN sont conscients que ces élections représentent la dernière opportunité d’accéder au pouvoir et qu’il faut se mobiliser davantage. Ils savent aussi que si le FN rate les élections de 2002, l’année 2024 sera favorable compte tenu de la fragmentation de la société française et de l’incapacité à former une union sacrée dans une société extrêmement polarisée. D’autant que la gauche a réussi à créer un cartel électoral sans parvenir à rassembler tous les points de vue et reste divisée parce que la société elle-même est divisée », a-t-elle observé. Et de constater : « Le RN gagne sur deux thèmes majeurs, à savoir migration-identité et sécurité. C’est ce contexte qui a mobilisé plusieurs électeurs, notamment avec le rôle joué par certaines presses proches des idées de l’extrême droite. En effet, les élections de 2024 se distinguent de celles de 2002 par l’émergence d’une industrie de l’information plus libérale et l’existence d’un acteur médiatique (Groupe Bolloré) qui a décidé de miser sur le FN. Ce qui est une nouveauté majeure.

Migration et sécurité

Selon notre source, le RN a réussi à faire de la question migratoire le facteur responsable de tous les maux de la société française. « Le problème, c’est que ce genre de discours résonne dans les esprits. En particulier les populations des zones rurales ainsi que l’électorat des villes moyennes et petites, qui se sentent les premières victimes de la mondialisation et du déclassement social. Ils se sentent démunis face à des fiches de salaire qui n’augmentent pas, des prix qui augmentent, un pouvoir d’achat qui s’affaiblit et un coût de l’énergie qui s’envole. Une étude a récemment montré que 64 % des personnes qui votent FN s’avouent racistes. Nous sommes donc dans un basculement qui risque de se poursuivre pendant les vingt prochaines années. Pire, les derniers résultats des élections législatives représentent un basculement majeur dont l’impact sera transposable à d’autres pays. »

Instrumentalisation

Michel Agier, anthropologue, directeur de recherche émérite à l’Institut de recherche sur le développement, directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales et chercheur affilié à IC Migrations, a publié mardi 25 juin 2024 une tribune dans Le Monde dans laquelle il dénonce l’instrumentalisation des questions migratoires par une partie de l’échiquier politique, qui continue de diffuser des idées sur les migrations largement niées par la recherche. « Le thème des migrations, présenté par le Rassemblement national comme un problème urgent de sécurité et d’identité […]masque une sous-pensée raciste réactivée face aux mouvements de personnes en provenance de pays anciennement colonisés. […] Faits […] parlent d’une réalité plus grande et plus ordinaire que tous les fantasmes véhiculés à leur sujet », explique l’anthropologue. « Depuis 2018, les nombreuses recherches réalisées par l’Institut Convergences Migrations décrivent l’ancrage des migrations internationales dans toutes les sociétés, de départ, de transit et d’arrivée, les transformations sociales et culturelles vécues par les personnes en migration et celles qui les accueillent, mais aussi l’ampleur des violences vécues par les populations des pays du Sud face aux politiques hostiles de la plupart des Etats européens », poursuit Michel Agier.

A la veille des élections législatives anticipées, Michel Agier nous invite à « regarder autour de nous » [nous]« Il est rare, voire exceptionnel, que chaque Français n’ait pas dans sa propre généalogie (ancêtres, descendants, collatéraux et conjoints) des personnes ayant une couleur de peau, un accent ou un nom « qui ne font pas de vous un Français ». Il est rare que cette altérité proche n’ait pas quelque chose à voir avec le passé colonial de la France, en Afrique, en Asie, en Océanie, au Proche-Orient ou aux Antilles. » Selon lui, « il n’est pas […] ce n’est pas la question de la migration qui inquiète l’extrême droite et la droite derrière elle. C’est la part d’étrangeté que chacun a en soi, chaque personne et le pays tout entier. Reconnaître cet aspect est la meilleure réponse à toute politique basée sur la peur des autres », conclut-il.

Catastrophe

Mais la France est-elle capable de coexister avec le RN aujourd’hui ? « Pendant un temps, il y avait le slogan : « La jeunesse se fout du Front national », scandé dans les manifestations contre l’extrême droite. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Plus d’un tiers des jeunes votent pour le RN. Mais ce n’est pas seulement la France qui a changé, c’est tout le continent européen. Et c’est pourquoi le second tour s’annonce catastrophique en raison du manque d’unanimité entre les différentes composantes de la société française”, a conclu notre source.

Hassan Bentaleb

 
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