La présidente de la FTQ, Magali Picard, n’a pris toute la mesure de la crainte qu’inspirait Rénald Grondin l’an dernier, qu’après avoir rencontré à deux reprises la femme qu’il a agressée. Si l’homme a fait d’autres victimes au sein du syndicat, il faut qu’elles sortent de l’ombre, estime-t-elle.
• Lisez également : L’ancien président de la FTQ-Construction Rénald Grondin est un « patron », selon la présidente de la FTQ, Magali Picard
« J’ai pris conscience à ce moment-là qu’il y avait un régime de terreur. Avant, je n’en avais aucune idée», nous a confié Magali Picard lorsque nous l’avons contactée pour commenter l’enregistrement obtenu par notre Bureau d’enquête.
“Elle m’a raconté son histoire qui, en tant que femme, m’a complètement bouleversée. […]. J’étais bouleversé et choqué», raconte M.moi Picard.
Climat de peur
Tout comme la victime, Magali Picard estime que les employés de la FTQ-Construction (FTQ-C) n’ont peut-être pas tout dit à l’enquêtrice Anaïs Lacroix, de la firme Latitude Gestion. Celui-ci a été mandaté en 2022 pour comprendre comment Rénald Grondin a pu accéder à la présidence du syndicat sans être inquiété par les attaques qu’il avait commises des années auparavant.
« Une fois qu’on quitte ce régime de terreur, j’imagine qu’on fait tout pour ne pas y retourner. Si, en tant qu’employé, j’étais rencontré pour me ramener à cette période, j’aurais peut-être peur. Si j’ai été témoin de situations inacceptables, si j’ai vu un collègue souffrir et subir du harcèlement, je peux essayer d’éviter cela à tout prix », illustre M.moi Picard.
Rénald Grondin, former president of the FTQ-Construction
Photo tirée d’une vidéo sur le site Le 2159
Après avoir rencontré une vingtaine de témoins, Me Lacroix a indiqué dans son rapport, rendu public à l’hiver 2023, qu’on ne pouvait conclure « de manière prédominante » que les dirigeants de l’Association des manœuvres interprovinciales (AMI) et de la FTQ-C étaient au courant des attaques de Grondin lorsque ce dernier est devenu président en 2018. Mais il était « probable » que certaines personnes aient acquis « une connaissance plus ou moins approfondie » de l’affaire, selon Elle.
Nous avons rejoint Me Lacroix de lui demander si elle avait eu accès à toutes les informations nécessaires pour réaliser son mandat.
« Dans le cadre d’une enquête, nous sommes limités par notre mandat, le rôle d’enquêteur en milieu de travail et le fardeau de la preuve applicable. Nous n’avons pas, par exemple, les pouvoirs d’un juge ou d’une commission d’enquête pour assigner des témoins, recueillir des preuves sous serment et exiger des documents », a-t-elle déclaré. commenté par écrit.
Le rapport de Me Lacroix a également souligné le fait que «plus d’un témoin a rapporté avoir subi des avances non désirées de la part» de M. Grondin au même moment.
“Ces agresseurs profitent de leur réputation”
Magali Picard appelle les autres victimes potentielles à sortir de l’ombre si elles le souhaitent.
La présidente de la FTQ Magali Picard devant l’hôpital Notre-Dame de Montréal, en novembre 2023, lors de la grève des travailleurs du Front commun (CSN, CSQ, FTQ et APTS).
Photo Agence QMI, Joël LEMAY
« J’encourage les personnes victimes de harcèlement à le signaler. […] Ces agresseurs profitent de leur réputation et de leur pouvoir pour museler [les victimes]et ce sont des répercussions à vie. Dans le cas du plaignant dont nous parlons, cette personne a été reconnue inapte au travail à vie», a indiqué à ce sujet le responsable de la centrale syndicale. « La période #MeToo m’a rassuré. Enfin, les femmes parlaient. Mais nous ne devons pas revenir à ces années où les gens faisaient carrière en abusant et en intimidant les autres. […]. Pour moi, c’est inacceptable. Nous sommes ailleurs. Il faut faire confiance à nos autorités et dénoncer», estime également Magali Picard.
Joël LEMAY/AGENCE QMI
Ce dernier assure que les règles de nomination et de déontologie ont été renforcées depuis les événements à la FTQ-C, qui fonctionne par ailleurs de manière indépendante, comme les autres affiliés de la FTQ. « Les normes sont désormais les plus strictes du pays », dit-elle.