A Montpellier, la peur des électeurs de gauche se transforme en action

Montpellier (Hérault), rapport

Stupeur et tremblements. Devant un Emmanuel Macron projeté sur le mur blanc du bar associatif, Aude cherche ses mots. Quelques minutes plus tôt, cette électrice de gauche assurait qu’elle était “ fatigué de toutes les soirées électorales qui se déroulent de la même manière ». Mais ça c’était avant. Avant l’annonce par le Président de la République de la dissolution de l’Assemblée Nationale.

Dans la petite salle du café militant Le Quartier généreux à Montpellier, les cris ont vite noyé le discours du chef de l’Etat. “ C’est de la merde… » ; “ Mais il est fou ! » ; “ Quel connard. » Sur les visages, l’étonnement se mêle à la colère. Quelques câlins, “ câlins et double whisky pour tout le monde » » ironise une barmaid bénévole. Après le choc du score de l’extrême droite aux élections européennes, la gauche montpelliéraine accuse ce mauvais coup. Jordan Bardella a en effet réalisé un score historique en récoltant 31,5 % des voix.

Mais déjà, en terrasse, nous échangeons des analyses. “ Macron s’y essaie en vue de la présidentielle de 2027glisse Claude en ajustant ses lunettes bleues. Si le Rassemblement national se retrouve au gouvernement, cela l’épuisera, et peut-être le fera s’égarer. » Un pari risqué mais astucieux de la part du président ? “ Oh non, c’est super dangereux de jouer avec le feupoursuit le quinquagénaire. Les fascistes se sentiront pousser des ailes, cela les désinhibera. »

“ Je m’inquiète le plus pour mes enfants »

A côté de lui, Hassane hoche la tête. “ C’est le jeu démocratique, mais ça me fait peursouffle le père de famille. Je suis particulièrement inquiète pour mes enfants, car on sait comment ça commence, mais jamais jusqu’où ça peut aller… » Au bar, la voix du rappeur Diam’s qui chante J’emmerde le Front National reprend le discours de Marine Le Pen.

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Dans ce bar communautaire, les électeurs de gauche n’ont pas tardé à réfléchir à des pistes d’action.
© David Richard / Reporterre

“ Macron était en grande difficulté à gouverner, alors, plutôt que de subir une nouvelle motion de censure contre son gouvernement, il a tenté le tout pour le tout.estime Rémi, conseiller municipal socialiste de la commune de Castries – 36 % de voix pour la liste de Jordan Bardella. Maintenant c’est à nous, à gauche, de réagir ! »

A gauche, il faut qu’il soit temps d’agir

Oui mais comment ? Entre deux verres, la parole commence à circuler parmi la trentaine de personnes présentes : “ La gauche vient de démontrer que lorsqu’elle n’est pas unie, elle n’a aucune influence dans le débat publicobserve un activiste “ tendance La France insoumise ». Il n’y a qu’une seule voie : l’union de la gauche. »

Après l’étonnement, l’heure est à l’action. Et vite. A l’intérieur du café, l’écran géant qui projetait la soirée électorale en France la télé a été éteint. Tables disposées en cercle et pizzas commandées. “ Macron aurait pu nous prévenir, nous aurions été mieux organiséscommente, sarcastiquement, un trentenaire. Nous allons y passer la nuit, et je n’ai pas sorti mon chien. »

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“ C’est l’heure de vérité pour le Parti Socialiste », a glissé un homme dans le bar, favorable à une union de la gauche.
© David Richard / Reporterre

Sur la petite tribune, Rémi résume la situation à ses camarades : “ Nous vivons un séisme politique dans toute la France, nous sommes à trois semaines de l’arrivée au pouvoir de l’extrême droiteIl commence. Sommes-nous tous d’accord sur le fait que nous avons besoin d’un rassemblement de la gauche ? » Dans la petite assemblée, les mains s’agitent en l’air en signe d’approbation.

Militante écologiste, Julia ajoute : “ On est reparti divisés aux européennes, et on voit le résultatelle admet. Nupes était un mouvement d’espoir : il faut faire pression sur les partis pour le relancer. » A ses côtés, Rhany, membre de La France insoumise, soupire : “ Pour l’instant, c’est le chaos, Nupes n’existe pas “, il se souvient.

Appelez un “ citoyen éclaté »

Pour lui, “ c’est l’heure de vérité pour le Parti socialiste, ils devront faire un choix très clair ». Dans le collimateur, Carole Delga, présidente de la Région Occitanie, et Mickaël Delafosse, maire de Montpellier, tous deux membres du PS opposé à la Nouvelle Union Populaire Ecologique et Sociale.

“ Ok pour le rassemblement, mais comment fait-on ? ? » Regards hésitants et silence parmi les personnes présentes. On sort des post-it pour noter des idées. “ Nous pourrions organiser une manifestation lundi soir pour l’unitésuggère un activiste. Et appelons à un sursaut citoyen « . “ Et si on politisait la fête de la musique ? »murmure un autre. “ Pourquoi ne pas rédiger un appel citoyen ? »

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Peu avant 1 heure du matin, un petit groupe épuisé a proposé un texte intitulé « Unissons-nous pour un soulèvement populaire « .
© David Richard / Reporterre

En quelques minutes, des chemins se dessinent. Rassemblement prévu lundi à 19 heures, place de la préfecture – “ J’apporterai des cartons, nous ferons des pancartes ! » – avec un appel aux partis de gauche à se rassembler. “ Il faut leur dire de se sortir les doigts du cul »» dit une femme au fond de la salle animée. “ Nous devons nous unir sur un projet politique de rupture radicale “, dit un autre. Les idées coulent, notons-nous.

Peu avant 1 heure du matin, un petit groupe épuisé a rédigé un texte intitulé “ Unissons-nous pour un élan populaire » : “ Le moment est venu de nous mobiliser pour faire tout ce qui est possible, qui que nous soyons, en vivant·es, électeur·glaces, élu·es, pour empêcher l’extrême droite de prendre le pouvoirpouvons-nous lire dans le texte – lisible en ligne. Notre force est collective. »

 
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