Avec « Anime Parallele », son dernier album marquant ses 30 ans de carrière, Laura Pausini célèbre les âmes et les histoires qui l’ont touchée. Ce projet introspectif, décliné en versions italienne et espagnole, reflète son attachement à la diversité humaine. Plein de souvenirs d’enfance passés à Zurich et particulièrement attaché à la Suisse, le chanteur originaire d’Émilie-Romagne fera escale le 9 décembre aux Arènes de Genève, étape d’une tournée mondiale exceptionnelle.
Lors de notre entretien, l’artiste de 50 ans revient avec humour et émotion sur sa longévité, ses débuts dans la musique avec son père et Phil Collins, ses inspirations et la façon dont elle s’est réinventée au fil des années. Toujours aussi proche de ses fans, elle dévoile ses réflexions sur la célébrité, les réseaux sociaux et l’importance de rester authentique. Une conversation à son image : lumineuse et passionnée.
Vous avez eu 50 ans cette année. Comment les avez-vous célébrés ?
J’ai organisé une fête au coeur de Milan. En fait, j’ai même orchestré deux célébrations le même jour, dans un lieu où j’avais donné deux concerts pour mon fan club. J’ai donc partagé cette joie avec mes fans, créant une ambiance festive inoubliable.
Est-il vrai qu’on commence vraiment à vivre à 50 ans ?
On dit ça en Suisse ? Eh bien, je devrais peut-être venir vivre là-bas. (Rires.) Vous savez, je me sens un peu suisse. Une partie de ma famille, du côté de mon grand-père paternel, y est et j’ai encore des proches sur place qui assistent à mes concerts. Durant mon enfance, j’ai eu très peu de vacances et je les ai passées presque toutes à Zurich. J’en garde donc d’excellents souvenirs. Tout comme les concerts que j’ai donnés dans votre pays depuis 1997. Je me sens très proche de vous.
Vous retournerez également à Genève le 9 décembre. Comment se passe la tournée ?
Elle est très spéciale. Cela a commencé il y a un an et j’étais déjà venu à Zurich en mars dernier. Pour la première fois de ma carrière, j’ai joué à guichets fermés partout dans le monde, ce qui m’a surpris, surtout en vieillissant. (Rires.) C’est pourquoi j’ai décidé d’ajouter des dates en Europe en novembre et décembre, avec deux concerts en Suisse, à Genève et Bâle, que j’attends avec impatience. Genève est une ville importante pour moi. J’y ai beaucoup joué. Fêter 30 ans de carrière, c’est offrir un moment de souvenir et de joie à ceux qui m’ont soutenu.
Quels souvenirs gardez-vous du début de votre carrière ?
J’ai commencé à chanter à 8 ans, grâce à mon père, chanteur et musicien de piano bar. L’été, je l’accompagnais et c’est comme ça que j’ai été découvert. On m’a proposé de faire un disque, puis on m’a inscrit à Sanremo, que j’ai gagné à 18 ans avec « La Solitudine ». A cette époque, je ne rêvais même pas d’être célèbre, mais je me suis retrouvé dans un rêve immense. Ces 30 années ont été marquées par le respect, la discipline et l’amour de ce métier que je considère toujours comme une passion. Je n’aurais jamais imaginé une carrière aussi longue, mes idoles me paraissant inaccessibles.
Pouvez-vous mentionner l’une de ces idoles ?
Genève a joué un rôle crucial dans ma carrière internationale. Peu de temps après ma victoire à Sanremo, la première grande idole qui a cru en moi a été Phil Collins. En 1996, on m’a demandé avec qui je voulais chanter et j’ai immédiatement pensé à lui. Contre toute attente, j’ai réussi à le contacter, et il a été le premier artiste majeur à chanter avec moi et même à écrire une chanson pour moi. Nous sommes restés amis et avons collaboré à plusieurs reprises. Tout a commencé par un appel de lui alors qu’il vivait à Genève, un moment que je n’oublierai jamais.
Avez-vous des nouvelles de lui ?
Ces dernières années, il est devenu beaucoup plus fragile. Il a créé une importante association pour aider les jeunes qui souhaitent se lancer dans la musique. Chaque fois qu’il organise un concert en leur honneur, je suis à ses côtés.
Vous avez dit que votre dernier album, « Anime parallèle », est certainement votre projet le plus important. Pour quoi?
Cet album marque mon 30ème carrière. Une version est sortie en italien en 2023 et une autre en espagnol en 2024. Elle résume ce que j’ai appris, notamment sur le plan humain. J’ai compris que l’âme des gens est plus importante que leur apparence et qu’il est essentiel de respecter ceux qui sont différents de nous. J’appelle cela des âmes parallèles. Ces 30 années m’ont libéré du jugement et m’ont permis de raconter les histoires des autres à travers ma musique. Bien que ce projet ne soit pas très autobiographique, je me retrouve souvent dans la diversité des histoires que je partage.
Votre titre « Eppure non è così » avec ses paroles sensibles sort du lot. Pouvez-vous nous en dire plus ?
C’est l’une des chansons les plus autobiographiques de l’album. Il aborde le jugement constant que nous subissons, que nous soyons célèbres ou non, notamment à cause des réseaux sociaux. Nous sommes critiqués pour notre apparence, nos pensées ou nos paroles. En tant qu’artiste, je suis souvent dénaturé et cela ne reflète pas toujours qui je suis vraiment. Dans cette chanson, je confronte ma propre réflexion, affirmant qu’il ne faut pas avoir peur d’être soi-même. Il est dédié à ceux qui se sentent mal jugés et nous rappelle que le succès et le bonheur apparent ne signifient pas absence de solitude ou de tristesse.
Quelle relation entretenez-vous avec vos réseaux sociaux ?
Je gère quotidiennement mes propres réseaux sociaux avec l’aide de mon community manager. Lors de la sortie d’un album, la maison de disques peut exiger une présence sociale accrue. Cependant, je m’efforce de maintenir un contact authentique avec mes fans, comme je le faisais avant l’ère des réseaux sociaux. Mon fan club, actif depuis près de 30 ans et dirigé par mon père et deux collègues, compte 25 000 membres. Dans le passé, je répondais à des lettres et à des appels personnels. Aujourd’hui, je reste en contact via Twitter, Instagram et d’autres plateformes. Mon père et les membres de mon fan club gèrent ces interactions au quotidien, et nous décidons ensemble des réponses et des mises à jour à partager. Ces dernières années, j’ai réduit ma lecture quotidienne des commentaires, surtout après la période Covid, où la colère des gens était palpable et souvent exprimée de manière excessive sur les réseaux sociaux.
Vous avez présenté l’Eurovision à Turin en 2022. Avez-vous suivi la victoire de Nemo cette année ?
Vous savez, la seule déception que j’ai eue avec l’Eurovision, c’est que lorsque j’ai gagné à Sanremo, l’Italie n’a pas participé. Je n’ai donc jamais pu y concourir. Même si participer aujourd’hui peut paraître injuste après une longue carrière, avoir l’opportunité de présenter l’Eurovision était incroyable. J’ai toujours été un grand fan. Cet événement a enrichi la musique en nous faisant découvrir diverses chansons et langues. Cette année, Nemo a livré une performance extraordinaire et a véhiculé un message puissant. Je suis ravi que la Suisse ait remporté le Concours et porté un message aussi significatif. La musique a le pouvoir de laisser une profonde impression.