Les premiers accusés entendus mardi par la cour d’assises spéciale de Paris, au procès des huit personnes impliquées dans l’assassinat du professeur d’histoire-géographie Samuel Paty, ont tous contesté leur participation.
“Je conteste les faits qui me sont reprochés”, a déclaré Azim Epsirkhanov, 23 ans, un jeune Russe d’origine tchétchène. « Cela fait quatre ans que je les conteste », a également déclaré Naïm Boudaoud, 22 ans. Les deux jeunes, amis du tueur Abdoullakh Anzorov, sont les deux seuls accusés poursuivis pour complicité de meurtre, un délit passible de la réclusion à perpétuité. Les six autres prévenus sont poursuivis pour participation à une association de malfaiteurs terroriste, un délit passible de 30 ans de prison.
La seule femme parmi ces prévenus, Priscilla Mangel, 36 ans, qui comparait libre, a elle aussi vivement contesté les accusations portées contre elle. “Je nie avoir eu la moindre influence sur Anzorov”, a-t-elle déclaré à la barre. Le parquet lui reproche d’avoir eu de nombreux échanges avec l’assassin de Samuel Paty sur le réseau Twitter (devenu X). Elle aurait notamment présenté le cours du professeur à Anzorov comme « une illustration de la guerre menée par les institutions républicaines contre les musulmans ». Elle est actuellement « religieusement mariée » à un homme définitivement condamné à 14 ans de réclusion criminelle pour association de malfaiteurs terroristes.
« Comment peut-on être marié à quelqu’un qui a été reconnu coupable d’association de malfaiteurs terroriste ? s’interroge Virginie Le Roy, avocate des parents de Samuel Paty.
«Je lui fais confiance. Il a toujours clamé son innocence», répond l’accusé. “La justice n’est pas infaillible”, insiste-t-elle.
Interrogée sur ses liens avec la mère d’un des agresseurs du Bataclan le 13 novembre 2015, Priscilla Mangel explique que cette femme, condamnée depuis par la justice, est “une bonne personne qui n’est pas responsable du fait de ses enfants”. .
Élégamment vêtu, Azim Epsirkhanov, arrivé en France avec sa famille à l’âge de 10 ans, s’exprime dans un français parfait. C’est dans un collège d’Evreux qu’il rencontre pour la première fois Abdoullakh Anzorov, un Tchétchène comme lui.
A propos de son ami, Azim Epsirkhanov avoue l’avoir vu changer d’attitude environ un an avant l’attentat. “Mais je n’ai jamais pensé qu’il se radicalisait”, assure-t-il. Epsirkhanov a accompagné Anzorov dans une coutellerie à Rouen la veille de l’attaque. “Il m’a dit que (le couteau) était un cadeau pour son grand-père”, explique le jeune homme.
Le déplacement à Rouen s’est fait avec Naïm Boudaoud, originaire d’Evreux et ami d’Azim Epsirkhanov. Entre Epsirkhanov, fort d’1,84 m, et Boudaoud, c’était une relation de grand frère et de petit frère. Même s’il affirme, comme Epsirkhanov, avoir totalement ignoré le projet meurtrier d’Anzorov, Naïm Boudaoud confirme avoir remarqué un changement chez lui. « On ne parlait pas de filles, pas de sexe, pas d’alcool, pas de fêtes », se souvient-il. “Je l’ai pris comme une blague”, a-t-il déclaré.
Le procès est prévu jusqu’au 20 décembre.