Le nouveau modèle d’Hydro inquiète le secteur privé

Le nouveau modèle d’Hydro inquiète le secteur privé
Le nouveau modèle d’Hydro inquiète le secteur privé

Afin d’accélérer le déploiement de 10 000 MW de nouvelle capacité énergétique d’ici 2035, Hydro-Québec a annoncé qu’elle deviendra maître d’œuvre des projets éoliens de 1 000 MW et plus. (Photo : avec l’aimable autorisation)

La décision d’Hydro-Québec de contrôler la grande éolienne pour accélérer et coordonner l’ajout de 10 000 mégawatts (MW) de capacité énergétique installée d’ici 2035 surprend et inquiète le secteur privé, des producteurs privés aux consommateurs industriels d’électricité en passant par les instituts d’analyse économique.

Ce jeudi, le PDG de l’entreprise publique, Michael Sabia, a créé toute une onde de choc en présentant la nouvelle stratégie de développement éolien d’Hydro-Québec, alors que l’entreprise publique réalisera désormais des projets de 1 000 MW. avec les Premières Nations et les municipalités.

Cette annonce intervient environ une semaine avant que le ministre de l’Économie, de l’Innovation et de l’Énergie, Pierre Fitzgibbon, ne soumette à l’Assemblée nationale un projet de loi énergétique ambitieux.

Michael Sabia affirme que le modèle actuel de développement de parcs éoliens au Québec – qui repose sur de petits projets privés fonctionnant par appel d’offres – n’est plus adapté au nouveau contexte de la transition énergétique.

À ses yeux, le Québec a donc besoin d’une locomotive pour coordonner et réaliser plus rapidement et au meilleur coût possible des projets éoliens de plus grande envergure tout en décarbonant l’économie et en créant de la richesse.

« Le modèle actuel n’est pas une locomotive pour l’avenir. L’industrie continuera à jouer un rôle, mais probablement moins important que la locomotive, a déclaré Micheal Sabia, lors du point de presse qui a suivi sa présentation.

Les producteurs privés ne veulent pas être laissés pour compte

Rejoint par Offres Pour commenter cette annonce qui l’a surpris, Luis Calzado, PDG de l’Association québécoise de production d’énergie renouvelable (AQPER) a fait preuve d’une grande prudence.

À ses yeux, la production des producteurs privés « doit faire partie intégrante » de la stratégie éolienne d’Hydro-Québec à tous les niveaux. « Pour des projets plus importants, on s’attend à ce que nous soyons sollicités », a-t-il déclaré.

Il n’a en revanche pas voulu indiquer si la stratégie d’HQ aurait un impact positif ou négatif sur l’industrie éolienne privée, qui a contribué au développement de près de 4 000 MW de puissance installée au Québec depuis près de 25 ans.

C’est une question importante, car l’AQPER compte parmi ses membres environ 80 entreprises œuvrant dans le domaine éolien, avec des producteurs d’énergie bien connus comme Innergex, Boralex ou Kruger Énergie.

Dans le modèle actuel, la taille des parcs éoliens est en moyenne de 90 MW. Dans la nouvelle stratégie de HQ, il y aura toujours des appels d’offres destinés aux producteurs privés, mais pour des projets allant de 300 à 350 MW.

Reconnaissant qu’Hydro-Québec ne possède pas une grande expertise en production d’énergie éolienne, Michael Sabia a souligné que l’entreprise publique aura encore besoin de l’expertise du secteur privé pour construire de grands parcs éoliens totalisant 10 000 MW d’ici 2035.

Il a également donné l’exemple des projets hydroélectriques de la Baie James, une approche qui n’est pas très éloignée de la nouvelle stratégie de développement éolien.

« Ce n’est pas Hydro-Québec qui a construit les barrages. Nous avons fait appel à des entrepreneurs et des entreprises de construction », a souligné Michael Sabia.

Crainte d’une pression à la hausse sur les prix

De son côté, l’Association des consommateurs industriels d’électricité du Québec (AQCÉI) se dit non seulement surprise, mais aussi inquiète de la nouvelle stratégie éolienne d’Hydro-Québec et de son impact potentiel sur les tarifs d’électricité. .

«Il faudra voir comment il va travailler ensemble pour protéger toutes les classes de consommateurs, y compris les consommateurs industriels, afin d’avoir les meilleurs prix possibles pour l’électricité», affirme son président Jocelyn B. Allard.

Selon lui, le projet de loi que le ministre Fitzgibbon s’apprête à déposer la semaine prochaine pourrait apporter des réponses.

Dans le modèle actuel, ce sont les appels d’offres d’Hydro-Québec qui défendent en quelque sorte les intérêts des consommateurs en raison de la concurrence qui exerce une pression à la baisse sur les prix de l’électricité.

Or, dans la grande éolienne, on se retrouvera en situation de monopole. Qui veillera à ce que les prix de l’énergie soient fixés dans l’intérêt des consommateurs ?, s’interroge Jocelyn Allard.

Lors d’une conférence de presse, Michael Sabia a expliqué que la nouvelle stratégie permettra de réaliser des économies d’échelle, par exemple en obtenant de meilleurs prix auprès des fabricants d’équipements pour turbines – selon les estimations de l’entreprise publique, ces économies pourraient réduire les coûts. des coûts de production d’environ 20 %.

« Ces économies d’échelle sont très importantes. C’est une façon pour nous de réduire la pression sur les prix », déclare Michael Sabia.

Quelle place pour l’autoproduction ?

Soucieux de la disponibilité future de l’énergie, l’Institut économique de Montréal (IEDM) affirme pour sa part que la décision d’Hydro-Québec de se lancer dans la production éolienne « risque de coûter très cher » à la population québécoise.

« Les Québécois paient cher les erreurs de planification de la demande d’Hydro-Québec », a déclaré Gabriel Giguère, analyste des politiques publiques à l’IEDM, dans un communiqué.

« Pour cesser de refuser les projets de développement économique, il faut laisser un plus grand rôle aux producteurs indépendants », ajoute-t-il.

Dans sa nouvelle stratégie, Hydro-Québec se prononce sur l’autoproduction, affirmant que, dans un contexte de rareté des ressources, « celles-ci doivent être allouées en priorité à des projets éoliens qui permettront de répondre à des besoins d’intérêt collectif ».

L’entreprise publique affirme qu’elle travaillera avec le gouvernement pour analyser les projets d’autoproduction au cas par cas.

Cette position de la société d’État est vivement critiquée par l’IEDM.

« L’autoproduction est l’un des seuls moyens dont disposent nos entreprises pour assurer la satisfaction de leurs besoins énergétiques malgré les erreurs des prévisions d’Hydro-Québec », indique Gabriel Giguère. Hydro-Québec ne paie pas pour son développement, son transport ou sa production et ne devrait donc pas être présente à la table lors de l’évaluation de ces projets.

 
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