L’interdiction de l’UNRWA, un précédent en droit international

L’interdiction de l’UNRWA, un précédent en droit international
L’interdiction de l’UNRWA, un précédent en droit international

Guerre au Moyen-Orient

L’interdiction de l’UNRWA, un précédent en droit international

La communauté internationale appelle l’État hébreu à suspendre sa décision qui viole le droit international et met en danger l’aide humanitaire à Gaza.

Cécile Lemoine– Israël

Publié aujourd’hui à 19h23

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Bref:
  • Israël interdit l’UNRWA, déclenchant l’indignation internationale et menaçant l’aide à Gaza.
  • La loi israélienne contre l’UNRWA viole le droit international, selon l’ONU.
  • Netanyahu affirme vouloir maintenir l’aide humanitaire sans compromettre la sécurité israélienne.
  • Le vote est considéré comme une attaque contre le droit au retour des réfugiés.

Deux petites heures ont suffi pour dénouer un vote dont les répercussions s’annoncent majeures. Réunis pour le premier jour de la session parlementaire d’hiver, lundi 28 octobre, les députés israéliens ont approuvé par 92 voix contre 10 un projet de loi interdisant à l’UNRWA d’opérer sur le territoire israélien, et par 87 voix contre 9 un autre texte limitant ses activités à Gaza et en Cisjordanie. .

Sans précédent, cette législation viole le droit international en ciblant directement les opérations d’une agence des Nations Unies et en menaçant le sort de l’aide humanitaire à Gaza. « Ce vote crée un dangereux précédent, qui s’oppose à la Charte des Nations Unies et viole les obligations de l’État d’Israël au regard du droit international », déplore Philippe Lazzarini, le secrétaire général de l’UNRWA.

“L’UNRWA n’est pas une agence d’aide aux réfugiés, l’UNRWA est une agence d’aide au Hamas”, a accusé Boaz Bismuth, député du Likoud à l’origine des textes, dans un communiqué publié à l’issue du vote. Une référence aux affirmations israéliennes selon lesquelles 10 % des employés de l’UNRWA seraient affiliés au Hamas, un calcul jamais accompagné de preuves. Une enquête de l’ONU publiée en août a révélé que « neuf personnes [de l’agence] auraient pu être impliqués » dans les massacres du 7 octobre.

« La pire décision possible »

Les attaques contre l’agence palestinienne pour les réfugiés ne sont pas nouvelles. « La campagne visant à mettre fin à l’UNRWA est antérieure de plusieurs décennies au 7 octobre et n’a rien à voir avec le terrorisme. Il s’agit et a toujours été question d’effacer la question du droit au retour des réfugiés palestiniens », explique Lara Friedman, présidente de la Fondation pour la paix au Moyen-Orient.

Créée en 1949 par un mandat de l’ONU, l’agence fournit une aide humanitaire aux réfugiés palestiniens, en attendant une solution politique juste et équitable. Pourvoyeur de santé, d’éducation et pilier socio-économique de l’écosystème palestinien, l’UNRWA est un État embryonnaire. Près de 5 millions de réfugiés vivent désormais dans 58 camps administrés par l’UNRWA à Gaza, en Cisjordanie, en Jordanie, en Syrie et au Liban. Ses 684 écoles assurent une éducation gratuite à 650 000 enfants et ses services fournissent du travail à 30 000 personnes, dont 13 000 à Gaza.

« Si ces réfugiés revenaient, cela créerait un problème démographique : Israël n’aurait plus de majorité juive », note Insaf Rezagui, doctorant en droit international et chercheur associé à l’Institut français du Moyen-Orient (Ifpo), qui estime que ce vote contre l’UNRWA est la « pire décision possible ». Selon elle, cela s’inscrit dans « une guerre plus générale contre les Nations Unies » : « Israël viole le droit international de manière progressive, testant les réactions de chacun et se permettant de prendre de nouvelles mesures face au silence ».

Trois mois séparent le vote d’une loi israélienne de son application. Avec la fermeture de l’organisation, c’est toute l’opération humanitaire à Gaza, déjà chaotique, qui est en danger. Considéré comme « l’épine dorsale » de l’aide dans l’enclave, l’UNRWA dispose d’entrepôts et de centres logistiques sans lesquels il devient impossible de gérer la distribution de l’aide.

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Sur “Il n’y a pas d’alternative à l’UNRWA”, a déclaré le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, qui a appelé Israël “à agir conformément à ses obligations au titre de la Charte des Nations Unies et au regard du droit international, y compris ceux relatifs au droit humanitaire et au droit international”. les privilèges et immunités des Nations Unies. « Les lois nationales ne peuvent pas modifier ces obligations », a-t-il insisté avant d’annoncer son intention de « porter cette question devant l’Assemblée générale des Nations Unies ».

Il existe un scepticisme quant aux chances de succès d’une telle procédure. « Les Etats continuent de se cantonner à des déclarations, sans qu’elles soient suivies d’effets », soupire Insaf Rezagui. Sept pays alliés d’Israël, dont l’Allemagne, la et le Royaume-Uni, ont appelé l’État hébreu à suspendre sa législation, mettant en garde contre ses « conséquences dévastatrices » en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.

« Le droit international doit primer sur le droit national et surtout, il a déjà tout dit : les décisions de la Cour internationale de Justice fournissent les leviers et les outils pour contraindre Israël, rappelle le chercheur, spécialiste du respect du droit international dans le conflit israélien. -Palestinien. Nous sommes malheureusement confrontés à un manque de volonté politique et à l’inaction en raison des élections américaines.» Le doctorant revient sur une période charnière pour le droit international : « Sa survie est en jeu en Palestine, tout comme la légitimité des Occidentaux à en devenir les gardiens. »

Une décision qui divise en Suisse

En Suisse, la décision d’Israël divise. Carlo Sommaruga, conseiller d’Etat (PS/GE), juge ce vote inacceptable. «C’est naturellement un scandale. Ceci est contraire au droit international. De plus, nous assistons pour la première fois à la décision d’un État qui interdit par la loi la possibilité pour l’ONU et ses agences d’exercer leur mandat. C’est une expression supplémentaire du mépris et de la déshumanisation des Palestiniens par Israël et qui renforce le fait qu’il s’agit bien d’un génocide en cours.

Après un vote en mai dernier au National pour couper le financement de l’UNRWA, ce sera aux Etats de se prononcer en novembre. Pour l’élu, les financements ne doivent pas être supprimés : «Nous ne savons pas ce qui va se passer au niveau opérationnel dans les prochains mois, il n’est donc pas nécessaire de suspendre préventivement les financements suisses.» En outre, l’UNRWA ne s’occupe pas seulement des réfugiés palestiniens à Gaza, mais aussi en Cisjordanie, au Liban, en Jordanie et en Syrie, où il fournit des systèmes d’éducation et de santé de base.

Enfin, il estime que « verser une contribution à l’UNRWA est aussi une manière de soutenir politiquement son travail. Le Conseil fédéral a déclaré à plusieurs reprises que l’UNRWA est un acteur incontournable et essentiel de l’aide humanitaire à Gaza. La Suisse doit agir de manière cohérente.»

Mais à droite, nous estimons que les décisions de la Knesset ne font que valider le vote du Conseil national : « Cela confirme les propos que nous avions tenus il y a quelques mois lorsque nous voulions supprimer les financements suisses », réagit Pierre-André Page, conseiller national. (UDC/FR).

Car, selon l’élu, l’agence onusienne est trop proche du Hamas : « Il faut retrouver la sérénité et démanteler cette complicité qui existe entre ces deux organisations. C’est également ce que nous faisons au niveau suisse, en versant des sommes à d’autres associations en qui nous avons confiance. Il est clair que les gens vont souffrir de cette cessation de financement, mais je pense que nous devons vraiment éliminer ce mal qui frappe l’UNRWA. Il faut tout mettre en œuvre pour revenir sur des bases solides.»

Le conseiller national espère donc que le vote des Etats soutiendra l’avis du National : « Nous avons déjà gagné par cinquante pour cent. J’espère que le Conseil des Etats prendra la bonne décision.»

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