Le retour des annulés

Le retour des annulés
Le retour des annulés

Quand je lis un article de Journal de Montréal la semaine dernière à propos du chanteur Kevin Parent, qui disait regretter son comportement passé qui avait conduit à son annulation, je me suis dit : « Ça y est, nous sommes dans un nouveau mouvement, celui de retour d’annulé ! »


Publié à 00h57

Mis à jour à 7h00

À l’été 2020, une importante vague de dénonciations a touché de nombreux hommes, visés par des allégations à caractère sexuel. Parent était l’un d’entre eux. Quatre ans plus tard, il revient sur cette période qui l’a profondément troublé.

Il n’est pas le seul des Québécois annulés à tenter, initier ou réussir une remontée. Récemment, on a pu assister au retour de Maripier Morin à la radio. Betty Bonifassi a donné deux concerts à guichets fermés à la fin de l’été, son premier après l’annulation de SLAVE pour l’appropriation culturelle. Éric Lapointe remplit ses chambres et voit revenir ses fidèles. L’humoriste Julien Lacroix, issu des petites et moyennes salles, renoue avec le public en racontant son bannissement dans un spectacle réussi, selon moi.

Il commence à y avoir du monde. Là, on se demande : eh bien voyons, y avait-il une note officielle invitant tous les annulés de la province à revenir sous le taches ? Le temps de la thérapie est-il terminé ? Les peines ont-elles été levées par un comité secret de l’UDA ? Ai-je raté quelque chose ? Intriguant et soudain que ce phénomène de retours…

Mais avant de parler de retours, parlons d’annulation.

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PHOTO CHRIS YOUNG, ARCHIVES LA PRESSE CANADIENNE

Jian Ghomeshi, ancien animateur de CBC, lors de son procès pour agression sexuelle en 2016

Cela fait maintenant 10 ans que cette vague d’exclusion de la vie sociale en raison de comportements répréhensibles, pour diverses raisons, a pris de l’ampleur. En 2014, l’animateur à succès de la CBC, Jian Ghomeshi, à la suite d’allégations d’agression sexuelle, a lancé à contrecœur le bal annulé. L’affaire déclenchera les mouvements #BeenRapedNeverReported et #AgressionNonDdonné. En 2017, c’est l’affaire Weinstein, la vague #metoo, #metoo, #balancetonporc. En 2018, des accusations d’appropriation culturelle ont conduit le Festival international de jazz de Montréal à annuler le spectacle. SLAVE. En 2020 : Black Lives Matter donne lieu à des dénonciations pour des cas présumés de racisme, pensons à l’affaire du Lieutenant-Duval et au « mot qui commence par N »…

Les raisons de l’annulation sont multiples : sensibilité exacerbée, agressions ou viols avérés, incluant des postulats idéologiques parfois violents. Les interdits visent à exclure une parole, chez un individu, selon un axe du Bien ou du Mal qui ne laisse place à aucun doute.

Une fois que les « suspects » sont marqués du X de l’infamie et honteusement enfermés dans leurs sous-sols, que se passe-t-il ? L’espace public est-il « purifié » ?

Pendant ce temps, tout le monde est sur ses gardes. Les universitaires s’autocensurent de peur d’être « annulés ».

Cela fait donc 10 ans que nous nous annulons. Au début, il y avait très peu de doutes sur ce qui s’était passé APRÈS. Les annulés quitteraient-ils progressivement ou massivement leurs cachettes à une date officielle, ou devraient-ils rester cachés, modestes, pour toujours ? Oseraient-ils se représenter ? Tous ne sont pas passés par la justice officielle, beaucoup ont été dénoncés sur des listes anonymes, d’autres accusés d’appropriation culturelle alors qu’ils étaient de bonne foi, mais trop franchement.

Outre les personnes bannies et les victimes, les annulations ont aussi causé des dommages collatéraux : les familles, les proches des annulés. Beaucoup ont annulé leur emploi et se sont retrouvés sans Source de revenus et ont tenté de se reconvertir. La plupart ont conclu qu’ils savaient seulement comment – ​​et aimaient – ​​faire leur travail.

Cela explique sans doute cette vague de retours à laquelle nous assistons actuellement. Un véritable processus est en cours. Ceux qui, dans le monde culturel, tentent un retour empruntent tous le même chemin. Travail sur soi, thérapies, repentir, pudeur. Petites chambres. Puis une apparition médiatique calibrée, un article ou une interview exclusive dans une émission télévisée, avec l’espoir d’une rédemption prochaine.

Tout cela soulève de bonnes questions, voire fondamentales.

Et les victimes ? Que pensent-ils de ces retours ?

Qui pardonne ? Les pairs, le public, la société ? Est-ce du pardon à soi-même ?

Qui peut revenir au premier plan ?

Qu’est-ce qui n’est absolument pas pardonnable et qui ne reviendra jamais sur scène ou à l’université, sous aucun prétexte ? Qui sont les parias absolus maintenant ?

Dans tout ce processus, qui a accédé au pouvoir ? La société, purgée de ses pécheurs avérés et présumés, est-elle devenue moins impure, plus propre ? Beaucoup font désormais attention à ce qu’ils font et disent. Il y a eu des progrès incontestables, des changements sociaux se sont produits et sont visibles. De nouveaux codes de conduite sont nécessaires, les grandes organisations adoptent des programmes EDI (équité, diversité et inclusion).

Mais que dit de nous ce grand mouvement de retours ? Se pourrait-il que couve, parmi le grand public, un soupçon de ras-le-bol, une pointe d’exaspération, voire un début de retour de bâton face à des années d’annulations tous azimuts ? Poser la question, c’est marcher dans un champ de mines…

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