Le trafic de rue fait monter la tension à Yverdon

Le trafic de rue fait monter la tension à Yverdon
Le trafic de rue fait monter la tension à Yverdon

Habitants, policiers, toxicomanes et élus locaux s’accordent à dire que la situation s’est dégradée ces derniers mois dans le centre d’Yverdon-les-Bains. En cause : la banalisation de la cocaïne et de son dérivé, le crack. Reportage aux alentours de la gare, haut lieu du trafic de rue dans le canton de Vaud.

« Tout a changé en très peu de temps », explique Alex. Toxicomane depuis 35 ans, il se dit choqué par les violences dont il a été témoin ces derniers mois. « Il y a encore plus d’amitié. Vous pouvez être sur le terrain dans le besoin, les gens en profiteront quand même pour vous faire les poches au lieu de vous aider. Ce qui n’était pas le cas lorsque l’héroïne dominait le marché», raconte-t-il dans l’émission Mise au point.

Interrogé sur le marché du mardi, un commerçant rappelle que le Jardin japonais – le parc proche de la gare – a toujours été le carrefour de la drogue dans la capitale du Nord vaudois. “Mais les derniers mois ont été infernaux”, dit-il.

“Nous élisons les gens pour qu’ils cherchent des solutions”

« Je viens de la banlieue parisienne. J’ai été surpris de voir que c’était en plein jour, devant tout le monde, dans un endroit où il y a des enfants et des passants. Je me suis dit que c’était une drôle de situation”, raconte une femme à côté de sa poussette. Arrêtée sur place, elle a accepté de signer la pétition cantonale intitulée «Le trafic de rue, ça suffit!». Ce texte, qui se veut apolitique, sera soumis au Grand Conseil à la fin de l’année.

>> Lire à propos de cette pétition : Une pétition demande au canton de Vaud d’agir davantage pour gérer le trafic de rue

Les pétitionnaires souhaitent que le Parlement cantonal rédige une proposition pour la transmettre au Conseil d’Etat. Objectif : que le gouvernement cantonal « mette en œuvre les lois qui existent et qu’il mette les moyens » contre le trafic de rue, indique Samuel Dyens, le vice-syndic du village nord vaudois de Concise, qui récolte ce jour-là des signatures. « Je n’ai pas la solution, mais nous élisons les gens pour qu’ils cherchent des solutions », affirme l’élu libéral-radical.

La Ville se mobilise

Les autorités yverdonnaises ne sont pas restées les bras croisés face à la dégradation de la situation. La Kipole, ancien kiosque reconverti en refuge pour personnes marginalisées, vient de fermer ses portes. La ville a également condamné les toilettes publiques situées dans le même bâtiment. Cette situation centrale attirait trop de toxicomanes et de dealers, selon ses détracteurs.

>> A lire aussi : Yverdon ferme une structure pour personnes marginalisées gagnée par l’accord

La police a également accru sa présence sur place. Il réalise ainsi des opérations de poinçonnage. Lors de l’une d’elles, la police a encerclé la place afin d’arrêter les vendeurs présumés. En 15 minutes, les agents ont arrêté six suspects et les ont emmenés à part, dans un endroit discret, pour un contrôle d’identité. Tous ont été relâchés quelques heures plus tard, aucune drogue n’ayant été trouvée sur eux.

Par de telles actions, la police cherche à «tenir le terrain, empêcher le marché de la drogue de se développer et ramener un sentiment de sécurité dans le périmètre du commissariat», selon Marc Dumartheray, commandant de la police du Nord Vaud.

Lorsque la RTS s’est rendue sur place, la police est revenue vide : aucun des dealers présumés arrêtés au commissariat et à Place d’Armes n’avait de drogue sur lui.

Une aire de jeux inaccessible la nuit

Par ailleurs, l’accès à l’aire de jeux du parc est désormais interdit et surveillé la nuit, afin d’éviter que les toxicomanes n’y consomment des substances et n’y déposent leurs pipes à crack ou leurs seringues.

Le responsable municipal chargé de la sécurité, Christian Weiler, admet que ces actions visibles ne font que déplacer le problème. « Si le problème est apparu dans cette partie, c’est notamment parce que nous avions intensifié les actions à la gare », explique-t-il.

Les abords de la gare d’Yverdon-les-Bains, et notamment le Jardin japonais au centre, sont depuis des années un haut lieu de la drogue, mais la situation s’est récemment dégradée à cause du trafic de crack et de cocaïne. .

Les limites de la répression policière

L’élu PLR souligne également que la répression seule ne suffit pas. La municipalité assure s’appuyer sur l’approche des « quatre piliers » dans sa lutte contre les drogues : répression, prévention, thérapie et réduction des risques liés à la consommation.

«Nous avons demandé [avec les Villes de Lausanne et de Vevey] dans le Canton, une task force des quatre piliers. Arrêter davantage pour en libérer davantage n’a pas de sens. Nous pouvons arrêter 20 à 30 personnes avec la police cantonale. Au bout de trois jours, c’est à nouveau la même chose… Mais montrer aux dealers qu’ils ne sont pas là sur leur territoire, c’est vrai. C’est notre maison», explique Christian Weiler.

>> A lire aussi : Lausanne, Yverdon et Vevey demandent au canton de réagir au street deal

Plus de consommateurs

En Suisse, la consommation de drogues illicites est encore principalement liée au cannabis. La cocaïne et ses dérivés arrivent cependant en deuxième position, avec un nombre de consommateurs en forte augmentation en 20 ans.

Selon les chiffres de la Confédération, en 2022, 1% des 15-64 ans avaient consommé de la cocaïne au moins une fois par an.

La coke et le crack, drogues dures, se sont encore répandus depuis la période Covid, peut-être pour échapper à une société elle aussi de plus en plus « dure ».

Reportage TV : Christophe Ungar

Texte Web : Antoine Michel

 
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