Après 16 ans d’attente, les habitants de la côte Nord en sauront davantage sur l’air qu’ils respirent

Après de longues années de revendications et une recommandation de la Santé publique régionale, la Ville de Sept-Îles se dotera enfin d’une station permanente d’échantillonnage de la qualité de l’air d’ici la fin de l’été. Ce sera également la seule station de ce type dans la région.

La première demande formelle pour l’installation d’une station permanente à Sept-Îles a été faite en septembre 2008 par l’ancienne députée péquiste de Duplessis Lorraine Richard. Depuis, des groupes citoyens et la municipalité elle-même se sont également mobilisés.

De plus, malgré la présence de plusieurs sources de contamination, comme les feux de forêt et certaines grandes industries, la Gaspésie et la Côte-Nord sont les deux seules régions du Québec où l’indice de la qualité de l’air n’est pas mesuré en continu par le ministère de l’Environnement.

Richard Fachehoun est le directeur de santé publique de la Côte-Nord.

Photo : Radio-Canada / Zoé Bellehumour

Cette nouvelle station est véritablement un outil de surveillance. Cela nous permettra de surveiller la qualité de l’air et, du même coup, cela permettra à la population de prendre des décisions éclairées concernant ses activités et sa santé.explique Richard Fachehoun, directeur de santé publique de la Côte-Nord.

La pollution de l’air est un facteur de risque majeur de décès prématuré ou de maladie.

Une citation de Richard Fachehoun

Patrick Hayes, professeur de chimie atmosphérique à l’Université de Montréal, est du même avis. Pour bien comprendre l’impact d’une mauvaise qualité de l’air sur la santé de la population, des stations permanentes de prélèvement d’échantillons sont cruciales, selon lui.

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Patrick Hayes, professeur à l’Université de Montréal et spécialiste des particules atmosphériques

Photo : Radio-Canada

On aurait dû installer la station de Sept-Îles depuis longtemps. Dans la recherche, il y a certainement un manque de données. Le Québec est une grande province, mais l’échantillonnage est vraiment concentré dans le sudse lamente-t-il.

60% de cancers de plus à Sept-Îles qu’ailleurs au Québec

En novembre 2020, la santé publique régionale a émis une recommandation indiquant la nécessité d’un poste permanent. On a pu constater que le taux d’incidence du cancer du poumon s’établissait à 163,3 cas pour 100 000 habitants à Sept-Îles entre 2006 et 2010.

Ce taux était de 98,5 cas pour l’ensemble du Québec au cours de la même période. Autrement dit, entre 2006 et 2010, le nombre de cas de cancer du poumon détectés pour 100 000 habitants était 60 % plus élevé à Sept-Îles que dans le reste de la province.

Taux d’incidence annuel moyen ajusté du cancer du poumon (2006 à 2010)

Lieux (Trier par ordre croissant) Lieux (Trier par ordre croissant) Nombre ajusté de cas pour 100 000 habitants (Trier par ordre croissant) Nombre ajusté de cas pour 100 000 habitants (Trier par ordre croissant)
CLSC de Sept-Îles 163.3
CLSC de Manicouagan 114.3
Côte nord 132
Tout le Québec 98,5

Source : Santé publique Côte-Nord

Le taux d’incidence annuel moyen du cancer de la prostate était également 58 % plus élevé à Sept-Îles que dans l’ensemble du Québec pour les mêmes années.

Il est toutefois particulièrement difficile d’identifier les causes de ces données, selon le Dr Richard Fachehoun.

Il y a de la pollution, certes, mais n’oublions pas que nous avons d’autres facteurs de risque importants. Par exemple, on fume plus sur la Côte-Nord qu’ailleurs.il explique.

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Une cheminée de l’Aluminerie Alouette, l’une des usines les plus polluantes au Québec, située à 7 km à vol d’oiseau de la nouvelle station d’échantillonnage.

Photo : Radio-Canada / Daniel Fontaine

Sans station de prélèvement, il est certainement plus compliqué de comprendre ce phénomène. Au moins, nous pourrons en savoir plus bientôtindique de son côté Patrick Hayes.

Les dernières données collectées il y a plus de 10 ans

Les dernières données continues sur la qualité de l’air dans le périmètre urbain de Sept-Îles ont été obtenues entre juin 2012 et juin 2013 par le ministère de l’Environnement. Une station d’échantillonnage temporaire avait été installée à Livingston Park, ainsi qu’une autre à l’est de la ville.

Cette étude a démontré que la qualité de l’air serait bonne environ 72 % du temps, acceptable dans 28 % et mauvaise pendant 0,3 % de la période analysée.

Ces données ne sont plus représentatives. En plus de 10 ans, les technologies ont évolué et on sait qu’avec le changement climatique, il risque d’y avoir davantage de feux de forêt par exemple.fait valoir Patrick Hayes.

Le ministère de l’Environnement avait néanmoins autorisé l’installation d’une station de prélèvement en juillet 2020, suite à la recommandation de la santé publique régionale, mais les résidents du secteur visé, à proximité du parc Livingston, s’y seraient opposés.

>>Parc Livingston.>>

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La station d’échantillonnage devait initialement être installée à Livingston Park.

Photo : Capture d’écran : Google Maps

Le maire de Sept-Îles Denis Miousse, qui était alors conseiller du district Marie-Immaculée, affirme avoir lui-même sondé la population. Des citoyens auraient présenté leurs doléances à propos de la station temporaire qui y avait été installée en juin 2012.

Les gens pensaient que c’était trop fort, alors ils n’en voulaient pas. Il nous a fallu du temps pour trouver un autre terrain en ville pour l’implanter, mais finalement ce sera sur la rue André Mathieu, près du Provigo.explique M. Miousse. Nous pourrons déterminer que la qualité de l’air est bonne à Sept-Îles.

>>Le maire Denis Miousse siège au conseil municipal.>>

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Le maire de Sept-Îles, Denis Miousse.

Photo : Radio-Canada / Charles-Étienne Drouin

Selon Patrick Hayes, la technologie d’échantillonnage a évolué rapidement depuis 2012, permettant aux stations actuelles d’être presque totalement silencieuses.

Aucune autre station prévue sur la Côte-Nord

Interrogé par Radio-Canada, le ministère de l’Environnement a mentionné par courriel que la nouvelle station de Sept-Îles pourrait être considérée comme représentative de la qualité générale de l’air de la Côte-Nordmême si la région compte plusieurs autres industries polluantes.

Dans ses autorisations ministérielles, le ministère de l’Environnement peut toujours exiger des usines émettant des contaminants dans l’air ambiant qu’elles déploient des stations de mesure. Ces sociétés ne sont toutefois pas tenues de rendre publiques les données collectées.

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La station Sept-Îles couvre un rayon de 100 à 150 km. Il existe également partout des capteurs plus petits qui peuvent nous donner une idée de la dispersion des contaminants. Si nous constatons des problèmes supplémentaires avec la nouvelle surveillance, nous pourrions évaluer la pertinence d’installer d’autres stations permanentes.note le directeur de la santé publique Richard Fachehoun.

Le professeur Patrick Hayes estime que d’autres types d’appareils sont déjà disponibles et pourraient permettre une meilleure analyse de la qualité de l’air sur l’ensemble du territoire.

>>Un laboratoire mobile est arrêté sur un parking.>>

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Le ministère de l’Environnement dispose de laboratoires mobiles capables de réaliser des analyses de la qualité de l’air.

Photo : Radio-Canada / Jean-François Deschênes

Nous pourrions utiliser des stations mobiles capables de se déplacer d’une ville à une autre. Nous disposons même de drones capables de prélever des échantillons. Il existe également des capteurs peu coûteux que les gens peuvent acheter et installer chez eux pour obtenir des informations.il mentionne.

Le ministère de l’Environnement a refusé de nous accorder une entrevue pour obtenir des éclaircissements sur ces questions.

 
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