Abidjan veut se « débarrasser » des vendeurs ambulants, des charrettes et des mendiants, mais le coût social fait débat

C’est une démarche entreprise à la veille de la récente CAN en Côte d’Ivoire. Dans le cadre de l’assainissement de la ville d’Abidjan, le nouveau gouverneur a lancé une vaste opération de nettoyage des rues et des grandes alternances de la ville vitrine du pays. Ainsi plusieurs quartiers furent réduits en poussière.

L’accent est désormais mis sur le commerce de rue, la mendicité sous toutes ses formes et l’utilisation de charrettes à bras communément appelées Wotro.

Cette interdiction est considérée comme une étape vers une ville plus propre, ordonnée et sécurisée. La mendicité, le commerce de rue et les charrettes à bras sont souvent associés à des problèmes tels que la délinquance, l’insalubrité, voire l’exploitation des personnes vulnérables. «Je suis entièrement d’accord avec cette décision. Pour moi qui habite à Cocody où la circulation est plus ou moins fluide, lorsque j’arrive à Adjamé, je constate que ces gens créent beaucoup de bouchons. dit Konan Mathurin, habitant de Cocody.

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Le Ministre Gouverneur a indiqué à juste titre que ces nouvelles résolutions visent à « assainir le cadre de vie des populations, assurer une plus grande sécurité des personnes et des biens, ainsi qu’une meilleure fluidité du trafic routier mais surtout redorer l’image d’Abidjan, la capitale économique du pays »»a déclaré Cissé Bakongo.

Cette décision du ministre gouverneur du district autonome d’Abidjan est sans doute la bienvenue pour certains, d’autant que cette opération contribuera à assainir la capitale économique du pays, en lui donnant une fière allure digne d’une métropole. Toutefois, la mesure ne plaît pas à tout le monde.

Pour d’autres, cette décision suscite des inquiétudes quant à son impact social. La mendicité est souvent le dernier recours des personnes en situation précaire, notamment des enfants et des personnes âgées. L’interdiction risque donc de les priver d’une Source de revenus vitale, sans proposer de solutions alternatives pour les aider à répondre à leurs besoins. De même, de nombreux petits commerçants dépendent du commerce de rue pour leur subsistance quotidienne. Cette interdiction pourrait les priver de leurs moyens de subsistance et les placer dans une situation financière précaire.

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Les concernés se plaignent car ils disent que cela ne sert à rien s’ils abandonnent leurs activités. « Cette décision ne nous convient pas. Nous sommes livrés à nous-mêmes et nous devons nourrir nos enfants et nos familles. Nous ne comptons pas sur l’aide des petits amis. Nous ne voulons pas circuler entre les véhicules pour vendre, mais nous devons le faire. Alors que deviendrons-nous si nous abandonnons nos activités ? Nous implorons leur clémence, que l’État vienne à notre secours »implore Sali Konaté, vendeur d’eau ambulant dans la commune d’Adjamé.

Plus mesurés, les citoyens réclament donc des mesures de soutien pour ces personnes qui font de ces activités désormais interdites leur Source de revenus.

« C’est bien de les écarter, mais où vont-ils ensuite ? Puisqu’ils ne vivent que de ces activités” ils s’interrogent. Et Youssouf Habib d’ajouter : il faut les encadrer, leur trouver un terrain où ils puissent continuer leurs activités sans ternir l’image de la ville. Concernant les mendiants, l’État pourrait allouer un fonds pour leur prise en charge et leur surveillance. Il faut aussi moderniser et structurer l’activité des wotrotigui (pousseurs de charrettes, ndlr) en leur créant une station dans les communes où ils opèrent car quoi qu’en disent les gens, nous avons besoin d’eux. En tout cas, tout cela contribue à l’économie du pays. L’essentiel est de lutter contre la pauvreté et non contre les pauvres. explique cet opérateur économique.

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A noter que les charrettes à bras sont souvent utilisées pour transporter des marchandises dans plusieurs quartiers où les véhicules motorisés ne peuvent pas facilement accéder et aussi en raison des coûts jugés excessifs des taxis. Leur interdiction pourrait entraver la circulation des marchandises et avoir des répercussions sur l’économie locale.

Depuis son accession à la tête de la circonscription autonome d’Abidjan, le ministre gouverneur a fait de la lutte contre le désordre urbain l’un des chantiers majeurs et s’y attaque notamment avec la vaste opération d’expulsion en cours et cette décision d’interdire la mendicité, la rue. le commerce et l’utilisation de charrettes à bras qui ne sont pas sans impacts sociaux et économiques. Il est donc essentiel que les autorités prennent en compte les préoccupations et proposent des solutions équilibrées pour assurer le bien-être de tous les citoyens.

Par Emmanuel Djidja (Abidjan, correspondance)

13/04/2024 à 15h51

 
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