L’inquiétude s’était largement répandue parmi les 750 radios communautaires françaises après l’annonce de la réduction de 35 % du Fonds de soutien à l’expression de la radio (FSER), soit 10,4 millions d’euros d’aide, dans le cadre du Projet de loi de finances 2025 (PLF). Mais face à l’opposition unanime du secteur et à l’adoption d’un amendement par la commission des Affaires culturelles, le gouvernement a finalement fait marche arrière, mardi 29 octobre, en décidant de maintenir les crédits au niveau de l’année 2024, soit 35,7 millions d’euros.
Malgré le soulagement général, les syndicats restent néanmoins « vigilant » et « mobilisés», ont-ils prévenu dans un communiqué, le projet de loi n’étant définitivement voté par l’Assemblée que le 19 novembre. La vigilance est également de mise parmi les milliers de petites mains qui font vivre les radios communautaires. Ceux-ci ont en effet clairement souligné le caractère sans précédent de la proposition de coupe budgétaire. « Un coup de guillotine »selon Sylvain Delfau, co-président du Syndicat national des radios libres (SNRL). Jamais, jusqu’à présent, ces subventions n’ont été remises en cause. Et rien n’indique que la décision, dans les extrêmesleur entretien cette année empêche un rabotage dans le futur.
Un contexte « déjà difficile »
Le tollé met en lumière la place essentielle et fragile des radios communautaires dans le paysage français. Apparues clandestinement sous la forme de « radios pirates » ou de « radios libres » dans les années 1970, ces structures à but non lucratif et indépendantes se sont multipliées à partir de 1981, lorsque l’État a renoncé au monopole de la radiodiffusion. .
Aujourd’hui au nombre de 750, la plupart d’entre eux « radios du dernier kilomètre » sont implantées en zone rurale ou dans des villes moyennes, et mobilisent plus de 2 500 salariés et 30 000 bénévoles dans toute la France, selon un rapport Arcom de 2023. Contrairement à leurs cousins du service privé ou public, les financements des radios communautaires Les stations s’appuient en grande partie sur le Fonds de soutien à l’expression radiophonique (FSER), qui représente en moyenne 30 % de leur dotation globale. “ Le reste de nos financements provient des collectivités territoriales, des partenaires locaux, dons et la publicité, plafonnée à 20% », explique Sylvain Delfau, également directeur de Radio Laser, basée au sud de Rennes depuis 1992.
« Le FSER nous permet de conserver notre indépendance en n’étant soumis à aucunegroupe financier », souligne le directeur de Radio Laser, qui reçoit près de 220 000 € dans ce cadre. ” Nous retirer cette aide ? Cela conduirait à supprimer au moins un poste et à nous couper d’un bassin de population. », adds Stéphane Tremblay, director of the Savoyard branches of Radio Chrétienne Francophone (RCF).
D’autant que de telles coupes fragiliseraient les radios dans un « contexte financier déjà difficile « . En cause : la hausse exponentielle des prix de l’énergie et des émetteurs, les coûts imposés par le déploiement à grande échelle de la double diffusion – par DAB+ en plus de la FM –, la baisse progressive des contributions publiques aux contrats aidés ou encore la concurrence accrue des grandes écoutes en ligne. plates-formes. ” Faire beaucoup avec peu est dans notre ADN. Mais à faire plus avec moins, ça devient compliqué », deplores Stéphane Tremblay.
La voix des territoires
Au-delà de ces difficultés, les radios mettent avant tout en avant leur mission sociale locale. ” Nous cultivons l’écoute par l’information avec et pour les habitants », souligne Marie Picard, directrice de Radio Grenouille, basée à Friche la belle de mai, à la périphérie des quartiers nord de Marseille. En complément de ses programmes, Radio Grenouille organise des sets hors de ses studios et ouverts au public ainsi que des concerts : « Nous participons à l’émergence culturelle et artistique locale et ouvrons des espaces d’échanges. Une radio publique n’a pas ce lien avec ses habitants », appuie le réalisateur.
La garantie d’un lien “intime” auprès de ses auditeurs est aussi au cœur de la démarche de RCF et de ses 64 antennes locales, rappelle Stéphane Tremblay : « Nous nous efforçons de faire parler ceux qui n’ont pas de voix, et de connecter les chrétiens parfois isolés dans les zones rurales. » Armelle Roche, 64 ans, est une fidèle auditrice des radios chrétiennes depuis quarante ans. ” J’apprécie les informations de qualité et les temps de prière que je ne trouve pas ailleurs. Ça me donne envie de rester fidèle à RCF, à ma radio », raconte cette Lyonnaise.
Pour Marie Picard, de Radio Grenouille, la question du financement des radios communautaires a pris une dimension symbolique depuis l’épisode budgétaire : « Attaquer nos radios, c’est s’attaquer à la garantie du pluralisme médiatique et de la démocratie locale. » Une menace qui pèse sur l’ensemble du secteur audiovisuel, alors que le gouvernement s’apprête, selon Télérama, à réduire son budget annuel de 45 millions d’euros.