Quel a été votre parcours jusqu’à présent ?
J’ai commencé comme menuisier, mais le cinéma m’a toujours fasciné. J’ai acheté un appareil photo Super 8 pour expérimenter et petit à petit, je me suis mis derrière l’appareil photo. J’ai eu la chance de travailler avec Jean Marboeuf et Luc Jacquet par exemple, et de réaliser des courts métrages sur le thème de l’art, ce qui m’a toujours attiré. Un jour, une société de production m’a appelé parce que le peintre Charles Belle cherchait quelqu’un pour réaliser quelques prises. Mais dès les premières images, j’ai compris qu’il se passait quelque chose de plus fort.
Votre film Au-delà des silences est le fruit de 16 années de tournage avec Charles Belle. Comment est né et évolué ce projet hors du commun ?
Quand nous avons commencé, il n’y avait aucune idée de film. Au début, c’était des captures, mais très vite, il y avait déjà un mystère. J’ai filmé, il a peint, dans son atelier, mais aussi en extérieur. Je l’ai filmé en forêt, en montagne, où il montait ses gigantesques toiles, parfois dans des conditions difficiles. Je n’ai jamais interféré avec son travail car cela aurait déformé ce qu’il faisait. Nous n’avions rien décidé, cela s’est fait naturellement, sans scénario, sans ligne directrice et sans jamais savoir où cela nous mènerait. Ce n’est ni un portrait, ni une biographie, ni un documentaire sur l’art. Ce film est véritablement une quête, une exploration.
Qu’est-ce qui vous a le plus frappé chez Charles Belle ?
C’est son engagement total. Lorsqu’il commence un tableau, il ne sait pas forcément où il va. Il ne se dit pas : « Tiens, je vais faire une fleur » ou « Je vais peindre un arbre ». » Il avance, il expérimente, il efface, il reconstruit. Je me souviens d’un tableau où il peignait simplement de l’herbe. Au début, on voyait des lignes, de la peinture sur toile. Et puis, je m’absentais pour régler un problème technique. En revenant, j’ai regardé la toile, et là j’ai senti une odeur d’herbe mouillée, comme un souvenir d’enfance. Passer d’une matière première à quelque chose d’aussi sensoriel est incroyable.
Le film ne contient aucun commentaire. Pourquoi ce choix ?
Le silence est quelque chose de central dans le travail de Charles. Quand il peint, il n’y a pas de mots. Mais il se passe beaucoup de choses. C’est ce que j’ai voulu mettre en valeur, ce silence habité. Je voulais que le spectateur puisse ressentir par lui-même car en insérant des commentaires, on guide, et ce n’était pas le but. La musique de Bernard Montrichard accompagne sans prendre le dessus ainsi que les sons de l’atelier : les gestes, la respiration de Charles, parfois les murmures.
-Le film revient en salles après avoir touché un large public l’année dernière. Comment vivez-vous ce retour ?
Au départ, nous pensions ne faire que quelques projections. Et finalement, le bouche à oreille a fonctionné et les séances se sont multipliées. Les projections reprennent cette année. Ce qui me touche le plus, ce sont les retours des spectateurs. Ce film est une expérience à vivre, pas seulement à regarder. Il y a des gens qui me disent qu’ils ont été bouleversés sans trop savoir pourquoi et qui reviennent voir le film. A chaque fois, ça m’émeut, car ça va au-delà de ce qu’on avait imaginé.
Au-delà des Silences à retrouver au cinéma Les Tanneurs le Le 21 janvier à 20h en présence de Charles Belle et François Royet, ainsi que les 24, 26 et 28 janvier.
BB
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