C’est la guerre qu’on n’attendait pas ; qui a surgi sans crier gare dans un contexte proche-oriental déjà saturé par d’autres guerres, d’autres victimes.
À peine le cessez-le-feu était-il décrété au Liban que la guerre civile syrienne, jamais terminée, s’est réveillée
Des rebelles de plusieurs obédiences ont pris en trois jours, et sans grand combat, le contrôle d’Alep, la deuxième ville de Syrie, dans le nord. Ils ont poursuivi leur route en direction de Hama, plus au sud ; des vidéos authentifiées montrent leur entrée dans des villes désertées par leurs défenseurs. Sur l’une d’elle, on voit les véhicules de l’armée syrienne s’enfuyant à grande vitesse sur une autoroute. Les aviations syrienne et russe sont intervenues hier pour freiner l’avance des rebelles.
La surprise a été totale, surtout s’agissant d’Alep, que l’armée syrienne, appuyée par l’aviation russe, avait mis des années à reprendre en 2016, lorsqu’elle était aux mains de la rébellion anti-Assad. Les rebelles ne tenaient à l’époque qu’une partie d’Alep alors qu’ils l’ont cette fois entièrement capturée.
Cette offensive éclair a fait l’effet d’un électrochoc dans la région, et pose de nombreuses questions.
Première question : qui sont ces rebelles ? Au centre de cette offensive, le groupe armé Hay’at Tahrir el-Cham, l’organisation de libération du Levant, connu sous ses initiales HTC. C’était jusqu’en 2016 la branche syrienne d’Al Qaeda, dirigée par Mohammed Al-Jolani. Il a rompu avec Al Qaeda et s’est « syrianisé », contrôlant d’une main de fer la région d’Idlib, dans le nord-ouest de la Syrie, le dernier réduit des djihadistes et des rebelles depuis leur défaite face au régime de Bachar el-Assad et ses alliés.
Les hommes du HTC sont rejoints dans cette offensive par d’autres groupes, dont l’Armée de libération syrienne, la rébellion historique contre Assad, qui bénéficie des faveurs de la Turquie.
Sur les vidéos, on voit ces combattants avec des uniformes neufs, des armes lourdes et des véhicules, qui montrent un état de préparation et de soutien conséquents. Les regards se tournent vers la Turquie, toujours active dans cette partie de la Syrie, ne serait-ce que pour contrer les Kurdes syriens et turcs.
Pourquoi ont-ils agi maintenant ?
L’explication pourrait provenir de la guerre menée par Israël, et qui a considérablement affaibli le Hezbollah libanais et l’influence iranienne, deux des soutiens-clé de Bachar el-Assad. L’autre soutien, la Russie, est évidemment occupée ailleurs, en Ukraine !
Cette nouvelle donne régionale a sinon motivé, au moins permis cette offensive qui vient compliquer un échiquier déjà complexe. Les soutiens d’Assad ont-ils aujourd’hui les moyens, et la volonté, de le sauver à nouveau ? Quant à Israël, aura-t-il gagné au change à avoir éventuellement de tels nouveaux maîtres de la Syrie, à la place d’un adversaire qu’il connaissait par cœur, la dynastie Assad au pouvoir depuis plus de 50 ans ?
Le branle-bas de combat diplomatique est frénétique. Hier, le chef de la diplomatie iranienne était à Damas, le prince-héritier saoudien aux Émirats arabes unis, avant de rentrer retrouver Emmanuel Macron en visite ce soir dans son royaume.
Le Moyen-Orient était en crise, il est désormais en ébullition : cette guerre dans la guerre oblige tous les acteurs à revoir leur stratégie, et à se demander ce qui est mieux pour eux. La déstabilisation amorcée il y a un peu plus d’un an n’a pas fini de réserver des surprises.
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