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Mort de Joyce Echaquan : “4 ans après, les émotions sont toujours présentes”

Il y a quatre ans jour pour jour, Joyce Echaquan, une mère Atikamekw de 37 ans, mourait sous les insultes du personnel de l’hôpital de Joliette. Pour commémorer sa mort, des dizaines de personnes se sont rassemblées à la Place du Canada, au centre-ville de Montréal, samedi après-midi.

La population, tant membres de la communauté atikamekw que alliés non autochtones, a été invitée à allumer une petite lanterne en sa mémoire et à prononcer quelques discours.

Quatre ans après, les émotions sont toujours présentes par rapport à la tristesse mais surtout à la colèrea indiqué Sipi Flamand, leader de la communauté atikamekw de Manawan.

Nous sommes confrontés à plusieurs situations qui semblent nécessiter un compromis, mais celui-ci est souvent de notre côté [le compromis]rarement du côté du gouvernement.

Une citation de Ghislain Picard, chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador

Beaucoup de gens portaient des pulls ou des foulards violets, la couleur préférée de Joyce.

Depuis cet événement tragique, les militants autochtones rêvent d’un système de santé et de services sociaux dans lequel les peuples autochtones se sentiraient respectés et en sécurité.

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

D’autres veillées sont également organisées près de Joliette et de Trois-Rivières samedi soir.

Le principe de Joyce

Depuis le décès de Mme Echaquan, les militants autochtones rêvent d’un système de santé et de services sociaux dans lequel les peuples autochtones se sentiraient respectés et en sécurité, mais le travail avance à pas de tortue.

Le droit d’accès équitable, sans aucune discrimination, à tous les services sociaux et de santé, ainsi que le droit de jouir du meilleur état de santé physique, mentale, émotionnelle et spirituelle possible pour les peuples autochtones, c’est ce que veulent instaurer les défenseurs du principe de Joyce, un appel à l’action lancé à la suite des événements du 28 septembre 2020.

Pour Alex McComber, Mohawk de Kahnawake et professeur adjoint de médecine familiale à l’Université McGill, il n’y a aucun moyen de mettre en œuvre rapidement le principe de Joyce : cela prend du temps. En effet, selon lui, celle-ci ne prendra racine que lorsque les Autochtones auront eu l’occasion de raconter pleinement leur histoire auprès des dirigeants des gouvernements, des ordres professionnels ainsi que des établissements de santé et d’enseignement.

Nous voulons raconter notre histoire – pas celle des colonisateurs – et dire qui nous sommes avec notre propre voix.ajoute-t-il.

Et cette histoire doit être entendue et comprise par tous les salariés du système de santé, du préposé au directeur de l’établissement, soutiennent les défenseurs du Principe. C’est pour eux l’occasion de commencer à changer leurs perceptions, explique McComber, afin qu’ils puissent fournir des soins médicaux complets et respectueux.

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Alex McComber est directeur d’un réseau de mentorat qui rassemble des chercheurs allochtones et autochtones, qui peuvent échanger sur la santé et le savoir-faire autochtone. (Photo d’archives)

Photo: Radio-Canada / Simon Filiatrault

Les peuples autochtones ne sont pas respectés dans un système censé les aider à guérirse souvient-il, évoquant l’histoire de Brian Sinclair, décédé aux urgences du Centre des sciences de la santé de Winnipeg en 2008 après avoir attendu 34 heures sans recevoir de soins.

À l’Université McGill, le principe de Joyce commence à s’implanter dans plusieurs départements, note M. McComber. Ces premiers pas sont significatifsil admet.

Pour lui, l’écoute et l’ouverture des étudiants et des nouvelles générations de professionnels de santé facilitent la tâche et donnent de l’espoir. Cependant, c’est plus difficile avec des professionnels de santé aguerris, car leurs habitudes sont bien ancrées.

Nous devons ouvrir les discussions, d’égal à égal, avec des interlocuteurs ouverts, patients et attentifs.

Une citation de Alex McComber, professeur adjoint de médecine familiale à l’Université McGill

Le seul indicateur de la sécurité culturelle du réseau de la santé, ce sont les patients autochtones, insiste Alex McComber.

L’objectif sera atteint non seulement lorsque les apprenants reconnaîtront qu’ils ont appris mais surtout lorsque les patients autochtones disent se sentir en sécurité et respectésil croit.

Une porte ouverte ?

Le gouvernement du Québec travaille sur un projet de loi qui met l’accent sur la sécurité culturelle dans le réseau de la santé et des services sociaux, mais il a été fortement critiqué par les communautés autochtones. Ils reprochent au gouvernement de ne pas les avoir consultés et de perpétuer des pratiques coloniales qui, selon eux, sont l’essence même de l’insécurité des Autochtones dans le système.

Dans ce contexte, le Bureau du Principe Joyce a claqué la porte aux audiences publiques de l’Assemblée nationale face au refus de reconnaître le racisme systémique et d’adopter le Principe.

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La directrice du Bureau du principe Joyce, Jennifer Petiquay-Dufresne, accompagnée d’autres représentants autochtones du Québec.

Photo : Radio-Canada / Sylvain Roy-Roussel

Nous devons travailler ensemble dès la planche à dessin dans une relation de nation à nation sur ce projet de loi si nous voulons envoyer un message clair aux usagers autochtones, dont plusieurs ont encore peur d’obtenir les soins que nécessite leur condition.» a ensuite expliqué le Bureau.

Le chef de l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador, Ghislain Picard, a refusé de participer aux audiences publiques. Encore une fois, le gouvernement du Québec s’arroge le pouvoir de légiférer sur un sujet qui relève de la compétence de nos gouvernements des Premières Nations.il a écrit dans une lettre ouverte.

Pour l’instant, les consultations du gouvernement sont insignifiantes et insultantes» dit sans ambages Alex McComber. C’est juste de la poudre aux yeux pour cocher des cases.

À la reprise des travaux cet automne, les parlementaires ont pris l’initiative de dépasser le cadre politique pour organiser une rencontre informelle et non partisane avec les représentants des organisations autochtones encore présents.

Cette approche pourrait rendre le texte de loi plus acceptable pour certains représentants indigènes, espèrent les parlementaires. Le Bureau du principe de Joyce a déclaré qu’il était ouvert à faire les choses ensemble différemment à la sortie des audiences.

Le gouvernement Legault ne reconnaît toujours pas l’existence d’un racisme systémique au sein de ses institutions.

Avec les informations de Jean-Philippe Hughes

 
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