Québec refuse d’inclure dans son régime public de couverture un traitement nécessaire pour prévenir le décès prématuré d’un enfant de Bellechasse atteint d’une maladie génétique rare. Malgré les prières adressées au ministre de la Santé, Christian Dubé, l’État refuse toujours de réviser sa position sous prétexte que le médicament est principalement utilisé pour lutter contre l’obésité, une indication que la Régie de l’assurance santé du Québec (RAMQ) rejette. tout de suite.
Xavier Renaud, 12 ans, n’a jamais eu une enfance normale. Les six premiers mois de sa vie, il les a passés presque entièrement au CHUL de Québec, hospitalisé pour une maladie rarissime : un déficit en PCSK1, une maladie génétique diagnostiquée, selon le NORD (National Organization for Rare Disorders, un organisme américain qui intéressés par les maladies rares), chez moins de 50 personnes dans le monde.
« Juste pour vous donner une idée, cela nous a coûté 1 000 $ pour le stationnement la première année », explique sa mère, Isabelle Asselin. Les allées et venues entre les neuf médecins spécialistes qui accompagnent Xavier continuent de rythmer la vie du garçon, de ses parents et de ses trois sœurs aînées, avec une vingtaine de rendez-vous à l’hôpital par an.
Le déficit en PCSK1 provoque divers troubles hormonaux et inhibe, entre autres, la fonction neurologique qui donne à l’organisme la sensation de satiété. Non seulement Xavier ressent le besoin constant de manger, mais son corps stocke les calories ingérées au lieu de les transformer en énergie.
“Cela signifie que la nourriture qui pénètre dans l’organisme n’est pas brûlée, elle n’est pas utilisée”, explique le Dr.r Nabil Seidah, directeur de l’unité de recherche en biochimie neuroendocrinienne à l’Institut de recherches cliniques de Montréal. Cela signifie également que ce jeune homme n’a pas d’insuline et devient donc sujet au diabète. PCSK1 est également impliqué dans la sécrétion de l’hormone de croissance : si le gène ne remplit pas ses fonctions, la personne risque d’être petite. »
Xavier présente tous les symptômes de cette maladie génétique : il souffre d’hyperphagie, d’obésité importante, de léthargie sévère et de troubles de croissance depuis son plus jeune âge. A 11 ans, son corps d’enfant pesait 130 kg. Il lui était impossible de bouger normalement : une simple marche était un exploit.
La fatigue a également compromis l’éducation de Xavier. «Ils nous ont parlé à un moment donné de l’envoyer dans une classe spéciale», explique son père, Jean-François Renaud. Non pas parce qu’il souffre d’un déficit – Xavier est premier de sa promotion – mais parce que son manque d’énergie l’empêchait de suivre le rythme des autres. »
Le diabète commençait également à apparaître et le foie de Xavier se détériorait rapidement. «Cela évoluait vers une cirrhose ou un cancer», poursuit son père. Cette détérioration de l’organe a entraîné deux issues : la transplantation d’un nouveau foie ou la mort.
« Un petit miracle » à gros prix
La maladie de Xavier était au-delà de tout espoir de rémission jusqu’en juin dernier et l’arrivée de l’Imcivrée et de son ingrédient médicinal, le setmélanotide, dans la vie du garçon. Six mois de ce traitement, approuvé en 2023 par Santé Canada, ont réussi à restaurer son foie, éliminer son diabète, relancer sa croissance et initier une perte de poids importante.
« J’ai beaucoup plus d’énergie qu’avant, souligne Xavier. J’ai un ami qui habite, enfin, ce n’est pas très loin, mais j’ai quand même réussi à marcher de chez moi jusqu’à là-bas. Cet été c’était aussi le 200e de Sainte-Claire : J’ai pu m’éclipser et aller à l’église faire une surprise à ma mère. » Une marche d’un kilomètre encore impensable il y a encore six mois.
« Cela ne fait aucun doute », affirme Marie-Claude Simard, directrice de l’école primaire Morissette : « depuis l’automne, Xavier a perdu du poids, il bouge plus facilement, il est moins essoufflé et c’est un petit garçon plus joyeux. . »
« Ce médicament est un petit miracle », illustre le père du garçon, Jean-François. « C’est la première fois depuis la naissance de Xavier, ajoute sa mère Isabelle, qu’on a un remède qui n’apporte que du positif. »
L’horizon du garçon s’éclaircit enfin — mais il pourrait se retrouver de nouveau bloqué dans trois mois, car le miracle a un prix élevé : près d’un demi-million de dollars par année, ce que le Québec, en raison des règles en vigueur à la RAMQ, ne prévoit pas à rembourser.
Exception québécoise
Au Canada, le Québec est la seule province à exclure d’emblée l’étude des traitements contre l’obésité en vue de leur inclusion au régime public. Toutefois, l’Institut national d’excellence en santé et services sociaux (INESSS), chargé d’évaluer les demandes d’enregistrement des médicaments dans le but de faire des recommandations au ministre, place l’Imciivree et le setmelanotide dans cette catégorie. — au grand désarroi des autorités mondiales en la matière.
“Le message à donner aux autorités réglementaires qui ne connaissent pas ces maladies rares est que le setmélanotide est indiqué dans l’obésité génétique”, soutient le Dconcernant Karine Clément, docteur en médecine et directrice de NutriOmique, unité de recherche de Sorbonne Université et INSERM spécialisée dans la physiopathologie de l’obésité. Il ne s’agit pas seulement d’un médicament pour perdre du poids, mais d’un médicament qui agit sur le comportement alimentaire et sur la faim biologique irrépressible que ressentent ces patients. Nous ne pouvons pas le fusionner avec Ozempic, qui a un mécanisme d’action différent. »
L’INESSS refuse même d’étudier le dossier Imcivrée en raison de la politique d’exclusion en vigueur au Québec. Ailleurs au Canada, cependant, les provinces remboursent déjà le setmélanotide. « Pourquoi, au Québec, on ne change pas ça ? demande Isabelle. Dois-je déménager pour que mon fils ait le droit de vivre ? »
Une pétition déposée à l’Assemblée nationale à l’automne 2024 et parrainée par le Parti libéral demandait au gouvernement de réviser la politique québécoise pour permettre l’inclusion des traitements contre l’obésité dans le régime public. La Coalition Avenir Québec fait preuve d’une certaine ouverture et entend lancer un projet pilote pour évaluer l’efficacité de ces médicaments.
À la demande du ministère de la Santé, l’INESSS a produit un document qui recommande l’étude de quatre des cinq molécules contre l’obésité approuvées par Santé Canada. Le seul que l’INESSS exclut de ses recommandations : le setmélanotide.
« Ce médicament concerne une niche restreinte de personnes vivant avec une obésité génétiquement dépendante », précise l’INESSS dans Devoirce qui ne correspondait pas au contexte du projet pilote prévu et à sa clientèle cible. »
L’institut ajoute néanmoins que le ministère de la Santé « a toute possibilité de choisir d’inclure ce produit ou d’autres produits actuels ou futurs dans un projet pilote ».
Silence du ministre de la Santé
L’endocrinologue pédiatrique du CHUL qui accompagne Xavier depuis longtemps, le Dconcernant Julie Gagné, a écrit au ministre de la Santé pour le implorer d’inclure Imcivree au régime d’assurance médicaments du Québec. « Il existe un traitement efficace pour la grave maladie de Xavier », écrit-elle au ministre le 16 septembre, soulignant que la générosité du laboratoire pharmaceutique américain prendra fin d’ici quelques mois. “Il y a donc urgence” pour Xavier, a fait valoir le Dconcernant Gagné, car sans setmélanotide, « son pronostic vital est en jeu ».
Le Dconcernant Gagné a également souligné que le coût du traitement ne reviendrait pas à l’État puisque l’assurance privée du père de Xavier pourrait le couvrir. Le médecin a cependant exposé l’absurdité de la situation en soulignant que « la compagnie d’assurance du patient refuse de prendre en charge Imcivrée ». […] compte tenu du manque de couverture de la RAMQ.
«Au nom du ministre de la Santé, M. Christian Dubé, nous accusons réception de votre courriel», a répondu le cabinet le lendemain. « Nous vous assurons qu’une suite appropriée sera donnée à votre correspondance. »
Xavier, son médecin et sa famille attendent depuis 116 jours.