une opportunité manquée pour les générations futures ?

En septembre dernier, à l’issue d’un sommet visant à réformer la gouvernance mondiale, les Nations Unies ont adopté un « Pacte pour l’avenir ». Ce texte vise à répondre aux transformations actuelles et à venir, notamment celles liées au réchauffement climatique, et, selon la formule onusienne, à donner le coup d’envoi d’un nouveau multilatéralisme, plus légitime, juste et efficace. . La , malgré ses propres progrès dans ce domaine, est restée à l’écart des négociations sur le Pacte et ne semble pas proactive dans l’application des mesures qui en découlent.


Le Sommet de l’ONU sur le futur, qui s’est tenu les 22 et 23 septembre 2024 au siège de l’organisation à New York, n’a guère fait la Une des médias français. Cette réunion exceptionnelle a cependant abouti à l’adoption d’un Pacte pour l’avenir comportant deux annexes : le Pacte numérique mondial et la Déclaration sur les générations futures.

La France a certes participé aux négociations sur ces textes et voté pour leur adoption, mais sans jouer le premier rôle, loin de là.

La France en marge de l’événement

En tant que chercheur en sciences du développement durable et futuriste-prospectiviste travaillant au sein de la Coalition Unesco-MOST BRIDGES (via l’Université de Cologne) et à la School of International Futures (SOIF), et affilié en tant que chercheur associé à la CECILLE de l’Université de Lille, J’ai participé à plusieurs sommets connexes, au Pays de Galles, au Kenya, au Cameroun et aux États-Unis.

A l’exception d’une réunion, le 24 juin 2024, entre plusieurs experts des Missions Permanentes francophones pour échanger avec le Secrétariat des Nations Unies sur « l’avancée des préparatifs logistiques et des négociations du Pacte pour l’Avenir, du Pacte Numérique Mondial ». et la Déclaration sur les générations futures », la France n’a organisé aucun événement public en rapport avec les thèmes du sommet, ni avant ni après le sommet.

Publication de la Mission Permanente de la France auprès des Nations Unies sur le réseau social X du 24 septembre 2024.

A titre de comparaison, le Cameroun, pays d’origine du diplomate Philémon Yang qui est actuellement le 79e Président de l’Assemblée générale des Nations Unies, a organisé une consultation nationale avant le sommet pour affiner sa position face à cette échéance importante.

Le Pays de Galles, tout premier pays au monde à adopter une loi parlementaire en faveur des générations futures et à nommer un commissaire indépendant pour les générations futures (après la courte expérience d’Israël dans ce domaine, avec la commission de la Knesset pour les générations futures qui a existé entre 2001 et 2006) avant d’être définitivement supprimée en 2010 parce qu’elle avait trop de pouvoir selon ses détracteurs, a organisé le Forum du futur du Pays de Galles 2024 qui a abouti à l’adoption de Protocole du Pays de Galles pour les générations futures.

Pour sa part, le Kenya a accueilli la Conférence de la société civile des Nations Unies en mai 2024 pour préparer le futur Sommet. Le Sénat kenyan en a profité pour lancer son groupe parlementaire sur l’avenir.

Après l’adoption du Pacte pour l’avenir, le Sommet de la Francophonie 2024, accueilli par la France en octobre, n’a pas évoqué ces thématiques. En revanche, le G20, tenu au Brésil en novembre dernier, l’a fait, en incluant une référence aux générations futures dans sa déclaration finale.


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Sur cette lancée, on se demande si le Sommet sur l’intelligence artificielle (IA), que la France organisera en février 2025, prendra en considération le Pacte, notamment ses deux annexes.

Publication de la Mission Permanente de la France auprès des Nations Unies sur le réseau social X du 18 décembre 2024.

Mise en œuvre du Pacte pour l’avenir

Le Future Deal et la Déclaration sur les générations futures appellent les États membres et toutes les autres parties prenantes, aux niveaux local, national et international, à adopter une gouvernance à long terme fondée sur la prospective et la science, pour relever les défis complexes auxquels notre planète est aujourd’hui confrontée, tout en garantissant le bien-être des générations futures.

Entre autres mesures, la Déclaration appelle à « doter le système multilatéral, y compris les Nations Unies, des moyens nécessaires pour aider les États qui en font la demande à mettre en œuvre cette déclaration et à intégrer les besoins et les intérêts des générations futures et la réflexion à long terme dans les politiques. en encourageant la coopération et en facilitant une plus grande utilisation de la planification et de la prospective, fondées sur la science, les données et les statistiques, et en jouant un rôle de sensibilisation et de conseil concernant les « impacts intergénérationnels ou futurs probables des politiques et des programmes ».

Depuis début 2024, outre les quelques initiatives évoquées ci-dessus et une Commission parlementaire pour l’avenir créée en Finlande, plusieurs projets voient le jour pour accompagner la mise en œuvre du Pacte et de la Déclaration. Il s’agit notamment des groupes parlementaires pour les générations futures au Kenya (lancés en mai et bien avancés) et au Cameroun (encore en gestation) où la Commission pour les générations futures et la durabilité dans le Royaume a également été créée en octobre dernier. de Mbessa.

Le commissaire de la Commission européenne chargé de l’équité intergénérationnelle, de la jeunesse, de la culture et du sport joue également le rôle de commissaire chargé des générations futures.

Plusieurs autres initiatives similaires sont actuellement en cours en Espagne, en Australie et en Nouvelle-Zélande.

Un manque d’action malgré les nombreux atouts de la France

Dans un tel contexte, l’action insuffisante – voire l’inaction – de la France dans ce dossier est regrettable, compte tenu du poids diplomatique de la France dans le monde et surtout du rôle majeur que pourrait jouer Paris en matière de prospective. .

Plusieurs ONG françaises œuvrent pour les générations futures à travers la cause environnementale, et certaines universités françaises proposent des programmes de formation spécifiques – par exemple, la formation sur les générations futures et les transitions juridiques proposée à Sciences Po Rennes.


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La Cour constitutionnelle de France est également l’une des toutes premières instances judiciaires au monde, avec celle d’Allemagne, à s’être prononcée sur le droit des générations futures à vivre « dans un environnement équilibré et respectueux de la santé ».

La France est également réputée pour ses initiatives en faveur de l’enfance et de la jeunesse. Plusieurs mairies, comme Lille et Marseille, proposent des conseils municipaux animés par des jeunes. Au niveau national, la France dispose d’un Conseil d’orientation des politiques de jeunesse (COJ) qui a remplacé l’ancien Conseil national de la jeunesse (CNJ).

Mais curieusement, lors du Sommet du Futur, l’intervention de Jean-Noël Barrot, alors ministre de l’Europe et des Affaires étrangères, prononcée devant l’Assemblée générale des Nations Unies le 23 septembre 2024, a évoqué les enfants libanais victimes de la guerre mais n’a pas évoqué les l’avenir des générations futures au sens large.

Comme les États-Unis, la France possède une longue histoire et un héritage important en matière de prospective stratégique, avec notamment des personnalités telles que Gaston Berger, Michel Godet, Thierry Gaudin, Jean-Eric Aubert, Michel Saloff Coste, Carine Dartiguepeyrou, Nathalie Popiolek ou encore Férial Benachour-Hait. De nombreux think tanks de prospective existent également comme Futuribles, la Fondation 2100, la Société française de prospective, ou encore les programmes de prospective du CNAM.

Il est temps d’agir…

Il est donc crucial pour la France de saisir l’opportunité offerte par le Pacte pour l’avenir en termes de gouvernance anticipative et de promotion du bien-être des générations futures. Cet agenda peut pleinement prendre en compte la lutte contre le changement climatique et la transition écologique, pour lesquelles les dirigeants français ont affiché ces dernières années leur volonté de faire de la France un leader en la matière – notamment via l’Accord de Paris.


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Sur le plan international, la France pourrait mobiliser en ce sens l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), notamment la Conférence des ministres de la Jeunesse et des Sports de la Francophonie ainsi que les activités de la Fondation Innovation pour la démocratie, notamment les Assises de la Démocratie. dirigé par Achille Mbembe.

De gauche à droite, la première dame Brigitte Macron, le président du Conseil européen Charles Michel, le président Emmanuel Macron et la secrétaire générale de l’OIF Louise Mushikiwabo au Sommet de la Francophonie à Villers-Cotterêts, le 5 octobre 2024.
Cristi Dangeorge/Shutterstock

Il serait également important de soutenir l’adoption de pratiques de prospective stratégique dans les instances administratives et politiques de l’espace francophone, notamment en Afrique qui est le continent le plus jeune au monde. Notons au passage que l’Afrique abritera aussi bientôt la grande majorité des futures générations humaines et même non humaines compte tenu de la biodiversité du continent.

En France, depuis les élections législatives anticipées de 2024, l’Assemblée nationale connaît un tournant décisif où est testée la formation de gouvernements de coalition. Cette situation est une belle opportunité pour créer un groupe parlementaire mixte (et éventuellement une commission permanente) pour les générations futures en France. Il faudra aussi par la suite une loi française dans ce sens.

Le gouvernement de François Bayrou vient de retirer l’enfance de son ancien portefeuille ministériel, provoquant de vives critiques de la part de l’Unicef ​​et de certaines associations de défense de l’enfance. De ce fait, le président Emmanuel Macron a promis qu’un Haut-commissariat à l’enfance serait créé en janvier 2025. Juridiquement, un Haut-commissariat à l’enfance peut être facilement dissous par les futurs gouvernements car il résultera d’un décret ; mais il pourrait servir de base à la création d’une commission permanente pour les enfants et les générations futures, protégée par la loi parlementaire.

Les communes et les régions peuvent également reprendre et promouvoir cet agenda à un niveau plus local, en s’appuyant sur des initiatives telles que celles de Lille et de Marseille.


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La mise en œuvre du Pacte pour l’avenir doit pouvoir conjuguer les efforts en faveur de la durabilité en poursuivant les Objectifs de Développement Durable (ODD) dont la réalisation est fixée à 2030, et aller au-delà.

En France, presque toutes les conditions sont réunies pour appliquer une gouvernance de long terme pour les générations futures : mais reste à savoir si la volonté politique suivra.

 
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