Après une année 2024 mouvementée, la politique suisse devrait connaître des temps plus calmes. Mais les débats sur des sujets brûlants vont se poursuivre, qu’il s’agisse de la question européenne, du financement de la 13e pension AVS, du budget de l’armée ou d’éventuelles démissions au sein du Conseil fédéral.
Avec quatre dimanches de vote chargés aux résultats inattendus, l’année politique 2024 a été mouvementée en Suisse. Les finances de la Confédération et ses dépenses supplémentaires pour l’AVS et l’armée tiennent le Parlement en haleine. La conférence sur l’Ukraine au Bürgenstock a réuni dans notre petite Suisse un nombre record de personnalités politiques internationales.
Enfin, comme bouquet final, le rapport de la commission d’enquête parlementaire (CEP) sur le naufrage du Crédit Suisse (CS) et le résultat des négociations sur un paquet d’accords avec l’UE ont été publiés… le même jour. Pour compléter le tout, il ne manquait plus qu’une démission du Conseil fédéral.
Une telle accumulation d’événements qui font la une des journaux est inhabituelle dans notre pays, connu pour sa monotonie. L’année 2025 s’annonce plutôt calme. Mais c’est peut-être le calme avant la tempête.
Vote
2024 a été une année mémorable en termes de votes : douze projets ont été soumis au vote. Cela est dû à un « effet de rattrapage » : aucune votation de fond n’a eu lieu au cours du second semestre 2023. Au final, le Conseil fédéral a dû compter le nombre élevé de cinq défaites, alors que la gauche était du côté des vainqueurs pour neuf des douze projets.
Le PS et les Verts se sont imposés à cinq reprises contre l’UDC, le PLR et le Centre, un record unique. Mais dès la première échéance de 2025, le 9 février, il faut s’attendre à un retour à la « normalité ». Selon les premières enquêtes de la SSR et de Tamedia, l’initiative des Jeunes Verts en faveur de la responsabilité environnementale est vouée à l’échec.
Par ailleurs, un seul projet est actuellement prêt à être soumis au vote : la taxe sur les résidences secondaires, approuvée en décembre, qui vise à compenser les régions de montagne pour les pertes subies suite à la suppression de la valeur locative. Cette mesure est soumise au référendum obligatoire et requiert donc la majorité du peuple et des cantons. Le vote devrait avoir lieu en mai ou septembre. Dans le cas contraire, l’abrogation de la valeur locative devrait également être revue.
Autrement, aucune initiative ni aucun référendum ne sont prêts à être lancés. En ce qui concerne l’identification électronique, le Parlement semble être parvenu à un compromis dès la deuxième tentative.
Si cette année de vote s’annonce calme, ce ne sera pas le cas en 2026, puisque trois objets liés à l’UDC pourraient être soumis au peuple : l’initiative pour la neutralité, celle pour la réduction de la cotisation SSR « 200 francs suffisent ». ! » et l’initiative populaire contre la Suisse de 10 millions d’habitants. La levée de l’interdiction de construire des centrales nucléaires pourrait également être soumise au vote début 2027.
Europe
La conclusion des négociations avec l’UE, annoncée juste avant Noël, a suscité de vives réactions. Le texte de l’accord, qui n’existe actuellement qu’en anglais, sera traduit dans les trois langues officielles. La version finale doit ensuite être approuvée par les négociateurs en chef.
Avant les vacances d’été, le Conseil fédéral pourrait mettre le paquet de traités en consultation et le soumettre au Parlement début 2026. Selon le planning actuel, une votation populaire n’aura lieu qu’en 2028, c’est-à-dire après les prochaines élections. Les discussions des partenaires sociaux sur la protection des salaires joueront à ce stade un rôle important.
Les représentants du syndicat protestent. Fin janvier, une assemblée des délégués devrait se prononcer sur des revendications concrètes. Et selon son président Thierry Burkart, le PLR souhaite consulter sa base sur le paquet d’accords à partir de juin.
Politique extérieure
Avec la conclusion des négociations avec l’UE, la politique étrangère devrait être plus sereine, d’autant plus que le mandat de deux ans de la Suisse au Conseil de sécurité de l’ONU touche à sa fin. Nous ne savons pas ce qu’il adviendra de la question ukrainienne après la conférence de Bürgenstock, certes réussie sur le plan organisationnel, mais plutôt faible sur le contenu.
Le thème récurrent de l’asile est également lié à la politique étrangère. Le nombre de demandes d’asile est en baisse. En novembre 2024, il était inférieur de 26 % à celui de l’année précédente. Ce serait un répit bienvenu pour le ministre de l’Asile Beat Jans, dont le bilan est jusqu’à présent considéré comme mitigé.
Conseil fédéral
En tant que présidente de la Confédération en 2025, Karin Keller-Sutter (PLR) prend les choses en main. On le croit capable de consolider l’exécutif suprême, ébranlé en 2024 par le décès brutal du vice-chancelier et porte-parole du Conseil fédéral André Simonazzi.
En revanche, il pourrait y avoir des démissions. Guy Parmelin (UDC), désormais conseiller fédéral en poste depuis le plus grand nombre d’années — dix ans — devrait effectuer sa deuxième année à la présidence en 2026, si son état de santé le permet. Il y a donc peu de chances qu’il veuille démissionner cette année.
Après Parmelin, le conseiller fédéral « le plus âgé » est Ignazio Cassis (PLR), élu en 2017. A 63 ans, il serait tenté de transmettre la patate chaude du dossier européen à un successeur. Mais le fait que la Suisse assumera la présidence de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) en 2026 plaide contre ce scénario.
A Berne, les spéculations vont également bon train sur le départ de Viola Amherd (Centre). Dans ce contexte, la bataille pour un deuxième siège centriste arraché au PLR pourrait aussi bouleverser la politique suisse dans les années à venir. Pour rappel, si les deux partis étaient au coude à coude en termes de pourcentages de voix aux élections fédérales de 2023, le Centre dispose de plus de sièges au Parlement.
AVS et LPP
Elisabeth Baume-Schneider (PS) a connu un bon départ au Département fédéral de l’intérieur, notamment grâce à une année de vote très exigeante pour elle. Mais il est maintenant temps de faire ses preuves. Le Conseil fédéral veut financer le 13e La pension AVS par une augmentation de la TVA, mais la droite veut résoudre cette question dans la prochaine réforme AVS.
Le Parlement l’a « ordonné » pour 2026. Baume-Schneider a annoncé sur le FRU qu’elle présenterait les valeurs de référence au Conseil fédéral au cours du premier semestre 2025. En revanche, en ce qui concerne la prévoyance professionnelle (LPP), rien ne se passera dans un avenir proche, après l’échec du projet de réforme en septembre. Les rentes des fonds de pension devraient donc continuer à baisser.
Budget
Contrairement à certaines craintes, l’année 2025 ne commence pas par un « budget d’urgence ». La majorité de droite au Parlement a pu adopter en décembre un budget conforme au frein à l’endettement. La ministre des Finances Karin Keller-Sutter présentera prochainement un plan d’allègement budgétaire, basé sur les propositions du groupe d’experts Gaillard.
Ses chances de succès sont douteuses. Les luttes pour la distribution devraient s’intensifier. L’armée, déjà gagnante sur le plan budgétaire, devrait recevoir encore plus d’argent, estime la droite. La part de la Confédération dans l’AVS va également augmenter, et pas seulement en raison du 13e rente. Des réductions de l’aide au développement sont prévues, mais elles ne suffiront probablement pas à compenser tout cela. Le conseiller d’État du PLR, Josef Dittli, a tenu des propos clairs à la fin de la session d’hiver :
«Développer rapidement l’armée et renoncer à des impôts plus élevés tout en respectant le frein à l’endettement n’est pas possible. Nous ne devons pas cacher nos visages »
Josef Dittli, conseiller aux Etats (PLR/Uri)
Les recettes supplémentaires ne semblent donc plus être un sujet tabou, même pour une partie de la droite.
La controverse monétaire a marqué l’année 2024 et se poursuivra jusqu’à l’année politique 2025. Dans les coulisses, même les partisans des militaires sont irrités par l’incapacité du ministère de la Défense de Viola Amherd à présenter un concept clair pour le réarmement de l’armée. Ils sont même d’accord avec le PS sur ce point.
Mais aussi
Le Département fédéral de l’environnement, des transports, de l’énergie et de la communication (DETEC) d’Albert Rösti recèle également un potentiel de conflit concernant la mise en œuvre de la loi sur l’électricité adoptée en juin 2024, l’extension des réseaux routiers et ferroviaires, y compris la chasse au loup. Dans le cas du développement routier et ferroviaire, des coûts supplémentaires importants sont apparus récemment.
Le rapport du CEP sur la faillite du CS continuera également à occuper le monde politique. Cette question devrait être traitée par le Parlement lors de la session du printemps 2025. En première position après sa publication, le Conseil fédéral lui a réservé un accueil plutôt défavorable.
Traduit de l’allemand par Anne Castella