R.Odrigo Bruni a évoqué cette semaine le malaise qu’il a ressenti la saison dernière. Cette forme de dépression, née d’une profonde usure mentale, si difficile à admettre quand on est un sportif de haut niveau. « Je ne voulais plus jouer, je ne voulais rien connaître au rugby. J’étais à bout de forces”, a déclaré, lors du point de presse précédant le déplacement à Vannes (21-27), le troisième ligne international argentin (31 ans, 26 sélections), arrivé à l’Aviron Bayonnais à l’automne 2023, à la fin de la Coupe du monde en France. Un témoignage puissant. Mais qui retrace un état d’esprit appartenant bel et bien au passé.
A l’image de ce qu’il a produit depuis le début de la saison, sur ses huit titularisations, son comportement en Bretagne en témoigne. S’il a passé la majeure partie de son après-midi allongé par terre, sur la pelouse humide de Rabine, ce n’était pas pour prolonger cette introspection, dans un endroit où il a joué entre 2020 et 2022, sur un morceau de canapé. La troisième ligne est désormais proactive. Son traitement ? Du combat, du combat et, encore, un petit combat… Au point que c’est lui qui semblait finir par rentrer dans la tête des Vannais.
“C’est un joueur coriace, fort, capable de bloquer ses adversaires debout”
“En live, j’ai trouvé que les actions de Rodrigo étaient encore excellentes aujourd’hui (ce samedi)”, a déclaré Gerard Fraser, responsable de l’attaque de l’Aviron, au terme de ce qui est la deuxième victoire de l’Aviron à l’extérieur cette saison, après Lyon (38-49). . Nous n’avons pas la même capacité d’analyse que le technicien néo-zélandais. Mais on partage son jugement sans la moindre réticence : Rodrigo Bruni est l’homme incontestable du match côté Bayonne.
Travail de destruction
On pouvait évidemment rappeler qu’il avait contribué au succès de son équipe à travers un essai – le troisième de la première mi-- – marqué avec force juste avant la pause. Un exploit qui a pris toute son importance à la lecture du dernier procès-verbal de cette rencontre. Mais c’est d’abord par son œuvre de destruction qu’il se distingue.
Lorsque le manager du RCV Jean-Noël Spitzer cherchait les mots pour déplorer l’incapacité de ses joueurs à remporter les collisions, c’est le regard taciturne de l’Argentin qu’il semblait vouloir dessiner. « C’est un combattant, dur avec les hommes », décrivait cette semaine Grégory Patat. Il est indispensable dans les tâches obscures : récupérer des ballons, ajouter de l’intensité à la défense. » Ce sont avant tout ces qualités que Rodrigo Bruni s’est efforcé d’exprimer.
19 plaquages réussis
Certaines statistiques témoignent de cette efficacité. C’est vrai de ses 19 plaquages réussis, pour un seul raté, mais aussi des trois ballons qu’il a arrachés au sol. Mais certaines images sont encore plus frappantes. Que ce soit lorsqu’il a poussé l’ancien bayonnais Théo Costossèque vers l’avant. Ou quand il a étouffé, avec le soutien de Giovanni Habel-Küffner, l’ultime offensive des Vannetais qui sont passés à portée de tir d’une victoire dans le - additionnel de cette rencontre.
« Il a eu des actions importantes pendant 80 minutes, notamment défensivement », ne peut que constater Gérard Fraser : « On connaît ses qualités : c’est un joueur coriace, fort, capable de bloquer les adversaires debout. Il est également présent sur le terrain. » Un paradoxe gagnant. Puisque c’est dans ce combat dans l’ombre, au fond de la mine, que Rodrigo Bruni s’est levé.