Une sanction symbolique d’un euro mais pas si négligeable pour la victime. Le tribunal administratif de Melun (Seine-et-Marne) a annoncé ce vendredi 20 décembre qu’il condamnait l’État à verser cette modeste somme à Adel Amara, conseiller municipal d’opposition de Villiers-sur-Marne.
Ce dernier, qui s’était présenté aux dernières élections législatives sous la bannière du Nouveau Front populaire, s’est vu refuser l’organisation d’une manifestation sur la place de la mairie en mai par un arrêté de la préfecture du Val. -de-Marne.
“C’est un vrai soulagement que l’Etat de droit tient”, s’est réjoui l’élu, qui a lancé le mois dernier un appel à un “rassemblement citoyen animé par des valeurs écologiques, sociales et antiracistes”. en vue des prochaines élections municipales.
Prévenu le matin même de l’annulation
A l’époque, Adel Amara avait reproché au maire Jacques-Alain Bénisti (LR) de ne pas avoir pris de mesures administratives à l’égard d’un employé de l’Escale, l’espace socioculturel de la ville, soupçonné d’avoir proféré publiquement des insultes à caractère raciste.
Le 27 mai, l’opposant a déposé une déclaration en préfecture en vue d’une manifestation, intitulée “Vivre ensemble, stop au racisme à la mairie”. La manifestation était prévue quelques jours plus tard, le 31 mai devant la mairie.
Or, le jour J, l’élu avait été prévenu à 10h30 par la préfecture du Val-de-Marne que son rassemblement prévu à 15 heures devant la mairie pour protester contre la décision du maire de ne pas sanctionner les municipales. agent, n’aurait pas lieu.
« Aucun caractère antisémite avéré »
C’est « après avoir examiné le contenu et le contexte de cette publication, par rapport au conflit israélo-palestinien », a précisé le tribunal ce vendredi dans un communiqué, qu’il a considéré que cette manifestation « ne présentait pas de caractère antisémite avéré ni s’agit-il d’une incitation à la haine pour des raisons religieuses ? La justice a ainsi conclu que « la manifestation ne risquait pas de troubler l’ordre public ».
Dans son arrêté, Sophie Thibault, la préfète en exercice à l’époque, reprochait notamment à l’opposant d’avoir publié sur les réseaux sociaux un communiqué présentant une photographie du maire lors des vœux du 7 janvier 2024 avec la mention « À Villiers on aussi avoir un Meyer Habib», en référence aux propos de l’ancien député qui qualifiait la population de Gaza de «cancer». Adel Amara a également précisé « drapeau autorisé de la Palestine ».
Le représentant de l’Etat a ainsi estimé que « cette publication avait donc une portée ouvertement antisémite et constitue un appel à la haine pour des motifs religieux. »
Le tribunal reconnaît le « préjudice moral subi »
« Ce rassemblement interdit avait pour seul objectif de dénoncer l’inaction du maire face à un racisme avéré au sein de l’administration municipale », ajoute l’élu qui estime que « cette décision était une attaque politique pour criminaliser une voix antiraciste et solidaire de la peuple palestinien. La préfète s’est alignée sur le récit fallacieux du maire de Villiers, en prenant un arrêté arbitraire et illégal.
Par son jugement, et l’euro symbolique à payer, le tribunal a également reconnu “le préjudice moral subi” : en l’occurrence “l’intéressé avait été imputé à tort à des propos à caractère antisémite ou haineux”. Enfin, le tribunal souligne que « l’interdiction préfectorale a été prise trop tard et sans justification ». De sorte qu’Adel Amara n’a pas pu faire appel de la décision « en - utile » en saisissant le juge en référé. L’État devra également verser 1 500 euros à l’élu, pour frais de justice.