“Je regrette profondément ce que j’ai commis depuis plusieurs mois”

“Je regrette profondément ce que j’ai commis depuis plusieurs mois”
“Je regrette profondément ce que j’ai commis depuis plusieurs mois”
Clicsouris, CC BY-SA 2.5 via Wikimédia Commons

Aujourd’hui, c’est une audience pour des faits de violences conjugales, le tribunal judiciaire de Bobigny les voit presque tous les jours en comparution immédiate… A la différence que le profil de la personne dans le box sort de l’ordinaire : c’est une femme, avec un un casier judiciaire vierge, socialement intégrée, qui reconnaît tous les faits et regrette ses actes.

Avec sa voix douce et son air effacé, difficile de deviner ce qui a poussé Madame D., 32 ans, à atterrir sur le banc des accusés du tribunal judiciaire de Bobigny. La liste est pourtant longue : menaces de mort contre son ex-compagne et la fille de cette dernière (« je vais te baiser », « je vais te tuer », « je vais te baiser »), le port d’une arme de catégorie D, violences habituelles et violences volontaires entraînant 7 jours d’ITT (incapacité totale temporaire) sur sa compagne avec la circonstance aggravante d’avoir été commises en présence de mineurs.

C’est l’un des enfants qui, deux jours avant cette audience, a appelé la police après que Madame D. s’est rendue avec un couteau et une bombe lacrymogène au domicile de Madame R., sa compagne depuis deux ans, en proférant des menaces de mort contre cette dernière. fille. Depuis plusieurs jours, Mme D. lui envoyait des messages menaçants et la relation était verbalement agressive depuis longtemps. « Je ne savais pas quoi faire quand elle est arrivée avec le couteau. J’ai pensé à ma fille, je me suis tenue devant sa chambre, elle m’a frappé pour entrer”, raconte Madame R. en sanglotant.

« …Vous aviez l’impression qu’elle avait l’intention de tuer votre fille ? » a demandé le président du tribunal.

(Sanglotant) — Oui, ce n’était pas elle. Elle découpait les photos accrochées au mur.

— Qu’est-ce qui l’a empêchée de venir dans la chambre de votre fille ?

(Mme R. pleure) — J’étais là, j’étais là. Devant sa porte. »

Lorsque les policiers sont arrivés, ils ont constaté que Mme D. s’était blessée au doigt (le sang coulait sur le sol) et qu’elle ne tenait plus le couteau. Les policiers s’y prennent à deux reprises pour que le Taser produise l’effet escompté, laissant penser que Mme D. est hébétée.

Lorsque la présidente du tribunal demande à l’accusée de s’exprimer sur les faits reprochés, elle ne cherche à aucun moment à minimiser et dit d’une voix tremblante : « Je regrette, je n’aurais jamais dû faire ça. Je m’excuse.

— Quand on vient avec un couteau, ça sert à quoi ?, demande le juge.

— Je n’ai jamais voulu tuer la fille de Madame R.

— Tu voulais faire du mal ? Effrayer?

— Non.

— Avez-vous frappé Madame R. ?

—Oui.

— Comment l’expliquez-vous ?

— Je suis très en colère. La relation est toxique pour moi. J’ai de la colère et de la jalousie envers ses enfants. Je suis désolé, j’ai pris conscience de l’atrocité.

— D’où vient le conflit avec la fille de Madame R. ?

— Elle ne participe à rien et n’aide pas Madame, avec le loyer, la lessive…

— On pourrait dire que ça ne te regarde pas.

—Oui. »

Mme R. explique que la relation avec Mme D. était « excellente au début », avant que les violences ne surviennent au bout d’un an, car elle n’aimait pas ses trois enfants (l’aîné a 27 ans). ) : gifles, coups de poing, coups de chaise. «Quand elle a commencé à être agressive, j’ai réussi à la calmer. Je me suis défendu, je n’ai pas laissé ça arriver. Et je revenais à chaque fois, parce que je l’aimais”, explique la victime.

Tous deux assurent au public qu’ils souhaitent mettre fin à leur relation. Mme R. décrit la terreur qui l’a saisie depuis deux jours et la survenance de l’épisode de violence qui a donné lieu à cette audience : « Tout a changé ces deux derniers jours. J’ai peur pour mes enfants”, sanglote-t-elle.

Une fois les faits établis et la personnalité de Madame D. abordée – casier judiciaire vierge, domiciliée chez sa mère à Paris et en CDI – le président du tribunal demande à la victime si elle souhaite se constituer partie civile pour elle-même et pour ses deux enfants mineurs témoins des violences. « Non, non. J’ai besoin que mes enfants soient suivis par un psychiatre, c’est tout », répond-elle. Pas convaincu que Mme D. ait bien compris les enjeux (elle n’est pas assistée d’un avocat), le juge s’explique à nouveau et lui pose à nouveau des questions. «Je ne comprends rien», explose enfin en larmes ce quadragénaire. Le juge reprend ses explications et insiste sur la pertinence de se constituer partie civile, notamment pour ses enfants. Madame R. opte finalement pour cette option sans quantifier sa demande et ajoute : « Je veux qu’elle [Madame D.] être suivie par un psychiatre car elle a un problème dans la tête. Et si elle sort, j’ai peur. Nous ne savons pas ce qui se passera dans six mois, dans un an. Elle a peut-être un bracelet ou quelque chose comme ça, je ne sais pas… »

Le procureur commence par saluer le courage de Mme R. d’être venue à l’audience et évoque le « cercle vicieux de l’amour » qui a entretenu cette relation malgré les violences. « La justice doit répondre de manière adéquate pour protéger la victime », insiste le magistrat, demandant une peine mixte de 30 mois de prison : 10 mois fermes sous forme de détention à domicile. Et 20 mois avec suspension probatoire accompagnée des obligations de soins, de travail, de l’interdiction de contact et de déplacement au domicile de la victime, de la participation à un cours de sensibilisation aux violences conjugales, de l’indemnisation des victimes et de l’interdiction du port d’arme.

“Le tribunal devra faire preuve d’équilibre et d’équité”, rétorque la défense, qui estime qu’une peine de prison n’est pas appropriée et demande une peine avec sursis avec obligation de soins. En l’absence de certificats médicaux ou de témoins, l’avocat estime également que le dossier ne permet pas d’établir la matérialité des faits de violences habituelles reprochées à son client.

Des efforts immédiatement mis à mal par les derniers mots de la prévenue : « Je regrette profondément ce que j’ai commis depuis plusieurs mois », a-t-elle déclaré aux juges. Puis elle regarde son ancien compagnon : « Je ne m’approcherai plus de toi. » Le président du tribunal lui demande de ne pas s’adresser à la victime, alors elle ajoute : « Je n’existerai plus pour elle. Et je n’ai pas bien compris mais je ne veux pas être condamné à dix mois. »

Après une brève suspension de l’audience, Mme D. a été reconnue coupable de toutes les accusations, y compris de violence habituelle, sur la base des photos fournies par la victime et des déclarations faites à l’audience. Elle est condamnée à deux ans de prison avec sursis probatoire pendant trois ans et aux obligations et interdictions requises par le parquet, ainsi qu’à une interdiction de paraître en Seine-Saint-Denis. Mme R. et ses enfants sont constitués parties civiles et une audience ultérieure aura lieu pour statuer sur leurs demandes.

 
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