C’était une plaisanterie, bien sûr, les troupes américaines ne sont pas à nos portes, mais cela portait beaucoup de mépris pour notre voisin du nord. Trump voulait humilier le Canada et il l’a fait devant le Premier ministre canadien, dans un lieu public et devant des témoins. Il récidive le lendemain en publiant un montage photographique le montrant dominant les fausses Rocheuses, une feuille d’érable à bout de bras, comme s’il venait de conquérir le Canada.
Nous avons choisi de trouver ça drôle… avions-nous le choix ?
Imaginons un instant que Trump fasse la même blague à propos du Royaume-Uni ou de la Corée du Sud. Cela n’arriverait pas. Mais le Canada, considéré comme un État faible par Donald Trump, est un sac de boxe de choix. Pourquoi s’en priver puisque nous ne pouvons pas recourir aux représailles.
Trump méprise particulièrement Justin Trudeau, surtout depuis le G7 de Charlevoix en 2018 où, une fois la réunion terminée et M. Trump bien assis dans Air Force One, Trudeau a déclaré en conférence de presse qu’il tiendrait tête aux États-Unis sur la question. question des tarifs douaniers sur l’acier canadien après être resté silencieux pendant les séances de travail.
Le président américain, ayant appris la nouvelle alors qu’il se rendait à Washington, a immédiatement envoyé un tweet meurtrier, se disant insulté par des propos du type « nous n’allons pas nous laisser bousculer par les Américains ». Lorsque Donald Trump se sent insulté, il a tendance à ne pas l’oublier de sitôt.
Ce ne sont pas seulement l’immigration clandestine, le fentanyl et les dépenses militaires qui nous séparent. Depuis, Trump en veut au Canada et nous allons en payer le prix un jour ou l’autre.
Je mets 20 $ sur la table pour que le taux de 25%, ou une version similaire, soit à l’ordre du jour le 20 janvier. Trump pourra ainsi prendre sa revanche et surtout montrer qui est le patron au Canada. -Relations avec les États-Unis. Sans compter qu’il estime que Justin Trudeau est un gauchiste radical et que le Canada est un pays socialiste, voire communiste.
Tout pour être aimé.
Le pire, c’est qu’il a raison sur notre déficit de crédibilité. Nous sommes à la merci des États-Unis et les hommes politiques américains de tous bords le savent très bien. Justin n’avait pas besoin de dire à Trump qu’il allait tuer l’économie canadienne avec ses tarifs douaniers, il le savait déjà. Voici sa réponse : « Le Canada ne peut donc pas survivre à moins d’arracher 100 milliards de dollars aux États-Unis ?
Celui-ci fait mal.
Une fois de plus, la réplique a été perçue comme de l’humour par les participants canadiens au dîner de Mar-a-Lago, mais elle était en réalité sinistre. C’est alors que nous avons compris que nos différences ne se limitent pas au fentanyl et aux immigrants illégaux. Trump ne peut pas supporter le fait que le Canada vend plus de marchandises aux États-Unis qu’il n’en importe, une situation inacceptable pour un homme qui aime les affaires « kif-kif », sinon il a l’impression de l’avoir fait.
Donald Trump ne se soucie pas de la santé financière du Canada, même si elle a un impact sur l’économie américaine. L’important est de remettre le Canada à sa place, de l’humilier, de punir ce cancer de gauche d’exister en Amérique du Nord. Pour lui dire comment se comporter, quoi faire et ne pas faire. Est-ce tolérable ?
Faire semblant est-il la seule posture à adopter pour être ami avec Donald Trump ? Je pense que c’est la pire chose à faire et je ne suis pas le seul. Un sondage de l’Institut Angus Reid publié jeudi dernier indique que si 86 % des Canadiens se sentent anxieux face aux menaces de Donald Trump, la moitié préfèrent que le gouvernement canadien agisse avec fermeté, que le Canada ne se laisse pas intimider. Seulement un Canadien sur dix croit que le Canada doit accepter toutes les demandes américaines.
Lorsque Trump parle d’intercepter du fentanyl transitant par la frontière canado-américaine, imaginons un instant que Justin Trudeau réponde : « M. Trump. Monsieur le Président, nous allons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour arrêter ce trafic et en échange, vous travaillerez à ce que le Canada ne soit plus envahi par des armes à feu venant des États-Unis. »
On peut toujours rêver.
Pendant qu’on y est, Justin Trudeau pourrait aussi suggérer que les États-Unis deviennent la 11e province canadienne pour voir s’il a le sens de l’humour… La présidente mexicaine Claudia Sheinbaum a d’emblée adopté un ton plus ferme que le Canada face à la menace d’un Tarif de 25 % sur toutes les exportations vers les États-Unis. Elle ne s’est pas non plus précipitée en Floride pour obtenir une audience avec Trump. Il sera intéressant de voir comment cette dernière réagira à la distance qu’elle a prise avec le président élu. Sera-t-il plus respectueux avec elle qu’avec Justin Trudeau à Mar-a-Lago ?
D’autant plus que Mme Sheinbaum fait les yeux doux à la Chine au cas où son partenaire de danse du Nord déciderait de la larguer. Une politique que l’on pourrait qualifier d’anti-humiliation.