« Je m’engage dans un militantisme de rencontres, de manifestations, de lectures. Nous voyons une démocratie de plus en plus malmenée, et il ne se passe pas grand-chose. Pour moi, soutenir la famille d’Asya signifiait faire quelque chose d’utile, de concret, de visible. Il y a tellement de frustration, d’incompréhension et de colère ailleurs. C’est aussi très satisfaisant sur le plan personnel. » C’est ce qui anime Magali Cordeau, bénévole de l’association Cent pour un toit, en tandem avec sa collègue Olivia Gaillard.
L’engagement de ces professeurs du lycée Bernard-Palissy s’est forgé dans la précipitation. L’un de leurs étudiants, Aleks, risquait d’être expulsé. Avec sa mère Asya et ses trois sœurs, il a fui la guerre en Arménie. La famille s’est d’abord réfugiée à Belgorod, en Russie, où elle a dû prendre la nationalité, avant de rejoindre la France. En juillet 2023, Hundred for a Roof a choisi de faire connaître cette situation. Un retour en Russie pourrait signifier, pour Aleks, un engagement dans l’armée de Poutine.
«Détresse absolue»
« Un gouffre s’est ouvert devant nous. Nous avions des questions pratiques. Nous avons bénéficié de l’expérience de l’association. La société est devenue beaucoup plus dure ces derniers -. Ça fait du bien de savoir qu’il y a ces gens qui militent au quotidien», confie Olivia Gaillard. Les deux professeurs accompagnent la famille dans des démarches « labyrinthiques ». « Nous avons découvert, avec un grand étonnement, le parcours du combattant que vivent les réfugiés. Je ne pensais pas vivre dans un pays aussi maltraité», confie Magali Cordeau.
« Nous avons découvert, avec un grand étonnement, le parcours du combattant que vivent les réfugiés. Je ne pensais pas vivre dans un pays aussi maltraité.
Le principe de Hundred for a Roof est de soutenir des personnes « sans toit, mais pas sans droits » avec l’aide d’une centaine de donateurs. L’antenne de Saintes est née en 2019. « Nous avons reçu des personnes avec le comité anti-expulsion. C’était navrant de voir ces gens avec leurs enfants vivre dehors. Il nous fallait une structure pour les abriter», rembobine Emmanuelle Cantrel, qui accompagne une famille géorgienne.
Son engagement résonne avec son parcours personnel. « Mon père était violent, ma mère a dû s’enfuir. A 10 heures, tu viens de recevoir un ours en peluche et tu dois partir. Vous perdez tout, c’est quelque chose de terrible, tous vos repères sont perdus. Je peux comprendre la détresse absolue que ressentent les gens. »
À la recherche d’un logement
L’association travaille au cas par cas, en fonction de ses moyens. Aujourd’hui, elle soutient cinq familles. Pour Asya, la procédure continue. « C’est très difficile de chercher du travail sans avoir de papiers. Je ne peux pas faire mon travail de technicien en pharmacie et de comptable. Je fais le ménage, grâce aux chèques emploi-service. C’est mieux que de ne pas travailler », décrit l’Arménien, également bénévole au Solidarity Café.
A Saintes, Hundred for a Roof vient également en aide à deux familles géorgiennes. « La Géorgie est considérée comme un pays sûr, il faut apporter la preuve que si on y retourne, on va mourir, ce n’est pas facile », souligne Emmanuelle Cantrel. Elle fait appel pour leur trouver un logement. Le père, qui travaille, peut contribuer au loyer. L’autre famille vient d’arriver. « Ils ont un enfant extrêmement handicapé. Là-bas, les conditions d’accès aux soins se dégradent très vite. »
enfants soldats
Deux autres familles sont suivies vers la presqu’île d’Arvert. Concernant l’un d’entre eux, Cent pour un toit préfère rester discret. De l’autre, Francine Piou, relais de l’association avec son mari Gérard, a une bonne nouvelle. « Fatiah, originaire de Somalie, vient d’obtenir son statut de réfugiée. Elle a quitté le pays pour protéger ses enfants. Les Shebab voulaient transformer les garçons en soldats et imposer à sa fille un mariage arrangé. »
Francine Piou ne supportait pas « la tristesse des enfants et l’angoisse des parents » qu’elle accompagnait dans un centre d’accueil pour demandeurs d’asile. Elle souligne à quel point la stabilité offerte par l’association a facilité leur intégration. « Les enfants réussissent leur scolarité, l’avenir est bien meilleur qu’il y a quatre ans. Lorsque vous n’avez pas de logement, vous ne pouvez pas investir dans autre chose. Une famille ne peut pas dormir dehors, c’est hors de question. »
Concerts de soutien
La Sociale Chorale Punk se produit ce samedi 7 décembre à 11h au marché Saint-Pierre, et le lendemain à 11h au marché Saint-Pallais. Une contribution au chapeau sera reversée à Cent pour un toit. Pour contacter l’association, tél. 06 42 39 81 63 et email : [email protected].