Par
Christian Bouzols
Publié le
1 décembre 2024 à 11h29
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« Je suis né à Saint-Servan, j’habite à Paramé et je travaille intra-muros ». C’est ainsi que le « Le roi René »un surnom qui a longtemps accompagné celui qui se voulait la synthèse et l’incarnation de Saint-Malo.
René Couanau, maire de la ville depuis 25 ans, est décédé samedi 30 novembre à l’hôpital municipal qu’il n’a jamais quitté à 88 ans.
Le vieux lion s’était calmé
Battu en 2014 pour poursuite un mandat de tropl’emblématique adjoint au maire de la cité corsaire avait conservé la vivacité de son regard sur la politique locale, racontant ses humeurs et ses coups de gueule sur les débats qui secouaient la ville. Mais le vieux lion s’était calmé, le déclin du pouvoir ayant calmé les appétits de l’ogre qui avait fait Saint-Malo son plat principal et le cœur de toutes ses ambitions.
Panache et fort caractère
Le « Malouin Kennedy », un autre de ses surnoms, était Député pour cinq mandats. Il a amené tous les grands noms de la République à Saint-Malo mais ses grands mots, son indépendance et ses coups de gueule lui ont barré la route vers un éventuel ministère, un exploit jamais atteint.
Avec le recul, rien d’étonnant : René Couanau était un homme de panache avec un personnage de cochon. Maître de sa ville mais ingérable en haut lieu.
Banquets au milieu du conseil municipal
L’auteur de ses lignes l’a rencontré au début des années 2000. Et Saint-Malo a crié fort à chaque conseil municipal.
Dans le camp opposé, une gauche plus ou moins unie a offert le spectacle avec des acteurs de premier plan : Herri Gourmelenfigure historique de l’UDB à la voix de stentor, Michel Gendrot, le Radical avec la chemise à carreaux ornée de bretelles. Jacky et les hommesconseiller général puis sénateur socialiste. Jean-Charles Le Sager, le troubadour communiste. Et IsabelleThomas, l’étudiant passionaria de la loi Devaquet, une figure montante du PS et le bouc émissaire de René Couanau, qui n’aimait qu’à croiser le fer avec ses meilleurs ennemis.
Alors que les débats s’éternisaient et promettaient de se terminer en pleine nuit, un buffet était prévu avec de la charcuterie et du vin pour que les élus reprennent des forces à mi-mandat. Et la gauche et la droite trinquèrent aux querelles à venir.
Une garde rapprochée
Autour de René Couanau, une garde rapprochée formait un bloc. Henri-Jean Lebeau, énarque de sang-froid au poste de premier adjoint, gardien des finances. Catherine Jacquemin, qui, malgré son apparence de grande dame, avait la fibre sociale profondément ancrée dans son corps. Jean Sauvéel’homme de la sécurité qui connaissait toutes les ruelles d’Intra-Muros. Et bien sûr Gilles Lurton, tour à tour ou à la fois assistant parlementaire, vigile de quartier, yeux et oreilles du maire pour ramener dans son cabinet le pouls de Saint-Malo.
La campagne de trop
Le « Roi René » a toujours su bien s’entourer pour que rien ne lui échappe, à part cette petite voix dissonante pour lui murmurer en 2014 que 25 ans au château suffisaient.
« Ça sent la campagne électorale ! », aimait-il dire à l’épilogue de chacun de ses mandats. Il n’a perdu qu’une foisbattu par Claude Renoult, un de ses adjoints qui fut le seul à lui avoir tourné le dos pour oser l’affronter.
Un dernier rendez-vous manqué
Retraité de la vie publique, l’éternel combattant n’était pas avare de commentaires sur l’actualité de sa ville. Comme il n’y a pas si longtemps, c’est triste de voir fermé la Maison des Poètesun minuscule immeuble de la rue Pélicot, au cœur d’Intra-Muros, ayant accueilli, grâce à Dodik Jégou, les plus grands écrivains du monde, et qu’il a financé au-delà de toute raison.
René Couanau a piqué une colère contre le Pays Malouinmais en grand démocrate, il nous est resté fidèle. Le temps a passé et nous nous sommes réconciliés. Nous avions rendez-vous la semaine prochaine pour une superbe entrevue. Une cruelle coïncidence de la vie dont il pourra discuter avec Herri Gourmelen, Michel Gendrot, Jean Sauvée et tant d’autres amoureux de Saint-Malo partis avant lui.
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