Un juge ontarien a donné raison à la société minière canadienne Barrick Gold, qui demandait l’abandon des accusations portées contre elle concernant des allégations de violations des droits de la personne dans l’une de ses installations en Tanzanie. La société minière croyait que la justice canadienne n’était pas compétente pour trancher cette question.
Cette décision a été rendue un peu plus d’un mois après l’audience qui a eu lieu à Toronto.
Le juge Edward Morgan a statué que toute action en justice contre Barrick devait être intentée en Tanzanie.
Les éléments de preuve dont je dispose établissent que le barreau et le système judiciaire tanzaniens sont capables de mener un procès équitable, efficace et juste. Entre l’Ontario et la Tanzanie, la Tanzanie est sans aucun doute l’endroit le plus approprié pour juger les enjeux soulevés dans cette plainte.
peut-on lire dans sa décision rendue mardi.
Le siège social de la société minière canadienne Barrick Gold est situé dans la tour TD Canada Trust à Toronto. (Photo d’archives)
Photo: Radio-Canada / Rozenn Nicolle
Les avocats canadiens représentant plus de 20 plaignants tanzaniens ont soutenu que Barrick Gold, en tant que société enregistrée à Toronto et société mère de sa filiale tanzanienne, devrait plutôt répondre au Canada des allégations de violations des droits de la personne à son encontre.
Ces allégations concernent les Kurias, un peuple indigène du nord de la Tanzanie. Le procès de 2022 indique que Barrick Gold est lié à des allégations de violence contre les autochtones tanzaniens près de sa mine d’or en Mara du Nord.
Les avocats évoquent la mort d’au moins 77 personnes autour et à l’intérieur de la mine lors d’affrontements avec la police tanzanienne. Ils ont expliqué les liens entre la police et la société minière pour justifier leur poursuite contre Barrick.
Ce type de contrat de sécurité avec la police locale semble être un accord standard dans le secteur des ressources.
» a déclaré le juge Morgan dans sa décision.
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La mine à ciel ouvert North Mara est située tout près des villages de Kuria.
Photo : Google Earth
La société minière a pour sa part estimé que les faits reprochés s’étant produits uniquement en Tanzanie et concernant des citoyens tanzaniens, c’était vers la justice de ce pays d’Afrique de l’Est que devaient se tourner les victimes présumées.
Les avocats de Barrick n’ont eu aucune difficulté à établir que la grande majorité des preuves et des témoins nécessaires au procès proviendront de Tanzanie et que les témoins qui représentent Barrick viendront de Tanzanie ou de son équipe régionale en Afrique du Sud et non de l’Ontario.
a argumenté le juge.
Au cours des trois jours d’audience, les avocats de la défense ont fait valoir que la justice tanzanienne n’avait pas permis aux plaignants de bénéficier d’un procès équitable.
Si cette affaire n’est pas entendue en Ontario, elle ne le sera pas du tout
avait lancé Joe Fiorante, l’un des avocats des plaignants.
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L’audience a duré trois jours et le juge a rendu sa décision un peu plus d’un mois plus tard. (Photo d’archives)
Photo : Radio-Canada / Delphine Jung
Il n’existe toujours aucune possibilité réaliste de justice en Tanzanie. Même s’il y a eu des dizaines de meurtres à la mine Mara du Nord Au cours des deux dernières décennies, aucune poursuite n’a été intentée contre Barrick en Tanzanie pour ces décès.
clarifié Cory Wanlessl’un des autres avocats des plaignants, aux Espaces nationaux.
Le juge s’est toutefois montré réceptif aux arguments de la défense qui tentait, grâce à cette audience, d’éviter un procès au Canada. Il a notamment retenu un des arguments de Barrick selon lequel le système tanzanien est un héritage du système juridique colonial fondé sur le cdroit commun Anglais.
À mon avis […]le système judiciaire tanzanien est transparent et bien organisé, possède de grandes qualités et rend une justice impartiale, de manière juste et appropriée. Il n’y a aucune raison pour que le droit tanzanien, que ce soit sur le plan de la procédure ou du fond, soit inférieur à celui de l’Ontario.
Déceptions du côté des plaignants et des militants
Par écrit, Catherine Coumans, responsable de ce dossier pour le chien de garde de l’industrie minière au Canada, l’organisme MiningWatch, a exprimé sa très profonde déception.
Il est difficile d’accepter que lorsqu’il s’agit de rendre des comptes pour des préjudices allégués, Barrick n’est pas assez canadien, mais lorsque Barrick a besoin de l’aide d’Affaires mondiales Canada ou de l’ensemble des délégués commerciaux du monde, ils sautent sur l’occasion pour apporter leur soutien.
Barrick Gold a déjà été poursuivi pour des faits similaires en Grande-Bretagne. La société minière a ensuite réglé cette affaire à l’amiable.
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Barrick Gold possède plusieurs mines d’or dans le monde, notamment North Mara, en Tanzanie. (Photo d’archives)
Photo : Site internet de Barrick Gold
Anneke Van Woundenberg, directrice de l’organisation britannique RAID, souligne qu’au Royaume-Uni, il existe désormais un précédent juridique clair en matière de responsabilité de la société mère. Cela signifie qu’une entreprise basée au Royaume-Uni peut être tenue légalement responsable d’actions préjudiciables ou de violations des droits de l’homme commises par ses filiales à l’étranger.
.
Elle note qu’au Canada, en revanche, la responsabilité des sociétés mères est encore en développement et n’est pas aussi clairement définie
.
Cory Wanless, l’un des avocats des plaignants, a également exprimé sa déception. Nous sommes fortement en désaccord avec le jugement du tribunal. Nous avons été particulièrement surpris et déçus par la conclusion du tribunal
a-t-il indiqué.
Nous continuerons à lutter pour que justice soit rendue à nos clients.
Les avocats des Kuria disposent d’un délai de 30 jours pour faire appel de cette décision. Nous attendons les instructions de nos clients, mais nous comptons faire appel
» a mentionné M. Wanless.
Les avocats de Barrick Gold n’avaient pas répondu aux demandes de commentaires au moment de la publication.